Les patrons déterminés à «sauver l'économie du pays», mais entendent rester «loin des tiraillements politiques»
Historique : le XIXe Congrès de l’UTICA qui s’est tenu ce jeudi l’a été à plus d’un titre. D’abord le cadre. C’est la première fois que ces assises se tiennent au siège de la Centrale. Une bâtisse imposante de sept étages située en plein cœur de la zone administrative de la cité El Khadra. Elle est dotée d’une immense salle des congrès d’une contenance de 2000 personnes, soit le nombre de congressistes alors que le parking, tapissé pour l’occasion a été réservé aux box des 24 unions régionales. Historique aussi, parce qu’il est le premier à se tenir après la révolution avec tout cela implique comme changements au niveau du ton des débats, plus libre, de la transparence des élections et probablement de l’arrivée probable, à la tête de la centrale, d’une femme élue démocratiquement (pour l’instant, elle est simplement cooptée par ses pairs à titre provisoire pour assurer la transition).
Dans son discours d’ouverture, le Chef du gouvernement provisoire Hamadi Jebali a appelé «les hommes d'affaires tunisiens et acteurs économiques à renforcer le rythme d'investissement et ancrer les valeurs du travail et de l'abnégation au service de l'intérêt supérieur du pays. Il a souligné son engagement à pallier les difficultés entravant la promotion de l'investissement », tout « en comprenant l'hésitation à investir au cours de cette période transitoire ». En présence de plusieurs ministres, il a indiqué que « le gouvernement comptait sur les efforts des professionnels et des chefs d'entreprises économiques pour consolider leur contribution aux efforts d'investissement et de réduction du chômage ».
Le Chef du gouvernement a fait savoir que les principaux défis de cette période de transition, sont « le renforcement de la confiance de toutes les parties en les institutions de l'Etat et la lutte contre la corruption qui freine le développement économique et social ». Il a précisé que « la promulgation de la loi sur la justice transitionnelle permettra d'accélérer le rythme du traitement des dossiers des hommes d'affaires interdits de voyage ».
M. Jebali a évoqué les efforts déployés par le gouvernement, dont la mise en place d'une stratégie de promotion de la transparence, de la gouvernance et de lutte contre la corruption, outre la publication du cadre juridique régissant le Partenariat Public/Privé (PPP). Il a, par ailleurs, mis l'accent sur les inconvénients de l'économie parallèle laquelle ne répond pas aux règles de concurrence loyale avec le secteur organisé, affirmant que le traitement de ce phénomène exige un consensus dans la prise de décisions courageuses et positions responsables afin de préserver le secteur structuré.
Le Chef du gouvernement provisoire a réitéré « l'attachement du gouvernement au renforcement de la concertation et de la coopération avec le nouveau Bureau Exécutif qu'élira le congrès ».
Wided Bouchammaoui, la présidente sortante, a proposé au gouvernement de remplacer les mesures d'interdiction de voyage imposées aux hommes d'affaires par d'autres qui ne paralysent par le travail des entreprises et ce, jusqu'à la résolution finale de cette problématique. « Il est inconcevable de priver les hommes d'affaires de leurs passeports pour une période de deux ans laissant leurs entreprises aller à la dérive sans trouver de solutions équitables à cette question et au profit des parties qui en sont affectées », a-t-elle avancé.
Elle a fait part de la crainte des hommes d'affaires et investisseurs tunisiens du phénomène de l'économie parallèle, soulignant que "ce fléau" touche quotidiennement de nouveaux sites, provoquant la fermeture des entreprises et le chômage des employés.
L'économie tunisienne, a-t-elle poursuivi, «se trouve encore dans une situation dangereuse et l'action du secteur privé pour contribuer à sauver l'économie nationale se poursuivra bien que cela s'avère plus compliquée aujourd'hui».
Mme Bouchamaoui a passé en revue les étapes que l'organisation patronale a traversées après la Révolution, estimant qu' « elles ont été difficiles et que la réorganisation de l'UTICA après les perturbations enregistrées n'a pas été une sinécure ». Elle a signalé que «l'UTICA a retrouvé de nouveau son équilibre », et rendu hommage à ses prédécesseurs, faisant, notamment applaudir le nom de Hédi Djilani.
Elle a tenu surtout à préciser que « l'organisation patronale restera une organisation nationale indépendante loin des tiraillements politiques et se tiendra à égale distance de tous les partis politiques ».
Les élections du nouveau bureau exécutif ont démarré dans l’après-midi. Les résultats devraient être proclamés ce vendredi.