Remaniement : Les vraies exigences d'Ettakatol
Mustapha Ben Jaafar et son parti Ettakatol laissent la voie ouverte à un ultime arrangement avec Ennahdha, mais précisent leurs exigences. C’est ce qui ressort d’une longue réunion du bureau politique tenue jeudi soir jusqu’à tard dans la nuit, dans le nouveau siège à Montplaisir. Si, dès le début de la réunion, une bonne partie des dirigeants étaient pour la rupture avec la Troïka, les longues discussions ont permis de pondérer la position officielle en la fondant sur une série de principes à convenir et d’exigences à satisfaire. Ettakatol sait maintenant, affirme à Leaders une source interne, que son véritable vis-à-vis ce ne sont pas les dirigeants d’Ennahdha, mais son Majlis Echoura qui détient les vrais pouvoirs et verrouille la marge de manœuvre.
Loin d’un simple jeu de chaises musicales, il s’agit pour Ben Jaafar et ses coéquipiers de réunir le consensus le plus large possible afin de réussir la finalisation de la Constitution et l’organisation au mieux des élections. D’où l’importance qu'il y d'ouvrir la coalition à d’autres partis et à des personnalités indépendantes et de redéfinir les conditions de participation effective aux concertations et à la prise de décision. Ceci, pour le principe général.
Plus dans le détail, la grande exigence est de refuser la notion d’un chef adjoint du gouvernement, avancée sous forme de coordinateur, mais perçue comme un plombage de l’action de Hamadi Jebali. Certaines fuites avaient en effet laissé entendre que l'actuel ministre de l'Agriculture, Mohamed Ben Salem, sera en charge de cette fonction, dans l'habit d'une sorte de chef de gouvernement bis.Inacceptable pour Ettakatol qui considère que Jebali prend de plus en plus de distance vis-à-vis des radicaux, faisant preuve d’une indépendance plus grande vis-à-vis de l’aile dure et bannissant tout extrémisme, d'où qu'il vienne. Lui adjoindre un « coordinateur » risque de réduire ses attributions, alors qu’il s’agit de défendre les institutions officielles, de faire respecter leurs prérogatives et d’asseoir encore davantage leurs pouvoirs.
Les autres exigences d’Ettakatol portent sur la désignation d’une personnalité indépendante à la tête du ministère de la Justice, le remplacement de l’actuel ministre de des Affires étrangères, Rafik Ben Abdessalem, et l’évaluation objective de plus de 300 nominations décidées par Ennahdha à la tête d’entreprises publiques et de gouvernorats ainsi que dans l’administration et les grands corps de l’Etat.
Au-delà des simples tractations pour l’attribution de portefeuilles ministériels et de négociations y afférentes où Mustpaha Ben Jaafar ne semble pas pouvoir y entrer pour le moment, tant que les questions de principe ne sont pas tranchées, c’est la configuration générale de la nouvelle coalition et la cohérence de sa vision qui priment, affirme notre source. La réponse d’Ennahdha sera alors déterminante. Mais aussi celle des autres partenaires actuels ou futurs…