Adieu, Serge Guetta
Adieu, Serge,
Serge Guetta vient de s’éteindre après une longue maladie. Il nous quitte discrètement, à sa manière, sans déranger personne. Né en Tunisie à Gabès et y ayant vécu jusqu’à l’âge de 41 ans, Serge est resté toute sa vie profondément tunisien.
Modeste, affable, proche des gens et attentionné, il a toujours fait preuve d’une grande curiosité intellectuelle, doublée d’une intelligence hors pair.
Serge est un développeur, au service de la collectivité.
En Tunisie d’abord, et aux côtés de son ami et premier patron, Feu Azouz El Mathari, il a fondé la Société Tunisienne de Banque, baptisée La Banque ! Il en a assumé pendant de longues années les plus hautes responsabilités. Il en a fait un instrument irremplaçable de financement du développement. Visionnaire, il l’a lancée avant l’heure, sur les routes de l’Afrique pour y installer de multiples filiales, en partenariat avec plusieurs Etats africains.
En 1969, il part pour une nouvelle aventure à la Banque Mondiale, aventure qui lui permet de retrouver les chemins de l’Afrique, de s’y installer de longues années durant, notamment à Kinshasa et à Abidjan. Ses relations avec les chefs d’Etats des pays hôtes ne sont pas toujours simples. Il en est proche, tout en conservant la distance nécessaire à l’exercice serein de ses fonctions et à la clairvoyance objective de ses jugements et de ses conseils.
Parti en 1990 à la retraite, Serge retrouve rapidement le chemin de l’Afrique et du développement en assumant les fonctions d’administrateur délégué du groupe Chanic.
Au-delà de ses responsabilités professionnelles, et j’en ai oublié beaucoup, Serge était profondément humain, avait le sens de la famille et de l’amitié. Il se préoccupait des autres, était toujours curieux de se qui se passait en Tunisie. Il demandait des nouvelles de tous. Il était heureux de savoir que les autres faisaient leur chemin et avançaient. Il avait mis beaucoup de ses amis, simplement et spontanément sur les voies de la réussite, mais il n’en parlait jamais. Il n’était jamais avare d’un conseil éclairé, mais en même temps, il n’était jamais demandeur de quoi que ce soit. C’étaient toujours les autres qui reconnaissaient leur dette vis-à-vis de lui.
Je me souviens de lui me racontant sa surprise quand, dans un train, à la frontière suisse, alors qu’il allait faire la connaissance de la famille de son futur gendre, les policiers helvétiques lui faisaient remarquer qu’il manquait un visa à son passeport tunisien, lui qui avait couru le monde avec un laisser passer des Nations Unies et qui ne s’était jamais posé la question des frontières et des visas.
Il parlait de ses amis tunisiens, et ils étaient nombreux, au présent, des vivants et des morts, de leur passé et de leur présent, avec attachement et sincérité, sans nostalgie, ni regrets.
Serge était simple, attentionné et chaleureux. Il savait mettre tout le monde à l’aise. Il avait grand plaisir à recevoir, à cuisiner pour les autres et à partager, en portant toujours l’attention qu’il fallait à chacun.
Serge nous quitte aujourd’hui, mais il restera, à jamais, par ses qualités humaines, sa capacité à aimer, profondément proche de tous ceux qui l’ont connu ou approché.
La Tunisie, qu’il a aimée et servie, lui restera profondément reconnaissante.
Témoignage d’un ami tunisien, Radhi MEDDEB