Les épidémies : informer sans faire peur
L'histoire de l'humanité, c'est d'abord l'histoire des grandes peurs qui l'ont jalonnée, des peurs irrationnelles qui surviennent en réaction à des phénomènes incompris. Il y a deux mille ans, les Gaulois avaient peur que le ciel ne leur tombe dessus; les chrétiens d'occident étaient terrifiés par le passage de l'an mil suite auquel, pensaient-ils, satan pourrait surgir de l'abîme et provoquer la fin du monde; en 1938, une émission de radio d'Orson Welles sur la " guerre des mondes " provoqua une panique chez les Américains persuadés que les martiens allaient débarquer; dans les années 50, la crise de Berlin, en pleine guerre froide, fit craindre au monde entier le déclenchement d'une nouvelle guerre mondiale, nucléaire cette fois-ci.
On aurait tort de considérer ces réactions comme faisant partie d'un passé révolu dominé par les superstitions et l'obscurantisme: Il y a dix ans, en 1999, des illuminés et notamment le couturier franco-espagnol, Paco Rabane, se fondant sur de prétendues prophéties de Nostradamus annoncèrent la fin du monde qui devait coïncider avec l'éclipse totale du soleil, le 11 aout de la même année. Evidemment, rien de cela ne s'était produit et notre cher couturier qui s'était réfugié dans une grotte, en Savoie dut, tout penaud, présenter ses excuses aux Français.
L'émergence de maladies inconnues
Il faut croire que ces grandes peurs sont consubstantielles à l'homme car plus l'humanité évolue, plus les connaissances qu'elle acquiert suscite des interrrogations et plus elle se réfugie dans l'irrationnel. Les charlatans de tout acabit ont de beaux jours devant eux. Cela est particulièrement vrai dans un domaine où, les avancées ont été les plus spectaculaires: la médecine. Car c'est, paradoxalement, là où les spécialités alternatives ou complémentaires dont certaines relèvent de l'escroquerie ont prospéré.
C'est que cette dernière décennie a été marquée par l'émergence de maladies totalement inconnues jusque-là dont la médecine allopathique peine encore à trouver les remèdes adéquats et qui sont liées pour l'essentiel au progrès ou à l'idée qu'on se fait généralement du progès, le toujours plus : la pollution, l'élevage intensif qui a fait se transformer en carnivores des animaux herbivores, les OGM dont on ne connait pas encore les effets sur la santé de l'homme, tout cela a généré des maladies comme la maladie de la vache folle, la grippe aviaire et plus récemment la grippe A ou la réapparition de maladies qu'on croyait éradiquées comme la tuberculose, le choléra et la peste. Ces maladies,parce qu'elles nous renvoient aux grandes épidémies qui avaient décimé des dizaines de millions de personnes dans le passé, provoquent des réactions de peur irrationnelles.
La différence est qu'elles n'ont pas causé les mêmes dégâts. La raison réside dans la qualité de la vie que connait une grande partie de l'humanité, aujourd'hui, grâce à l'éducation, la salubrité des logements, l'hygiène, la qualité des soins médicaux, les mesures prophylactiques et surtout l'information du public rendant, ainsi, hautement improbable la survenue de pandémies comparables à celles du passé même dans les contrées les plus déshéritées du globe grâce à la mobilisation de la Communauté internationale. Reste à trouver le dosage idéal pour informer et sensibiliser le public sans provoquer cette peur panique qui sommeille en chacun de nous comme cela s'est vérifié dernièrement en Inde et qui peut provoquer autant de dégâts que la maladie elle même. Ni trop, ni trop peu.
Hèdi