Crise politique passagère ou diagonale des fous ?
L‘histoire récente de notre pays regorge de conciliabules qui n’ont jamais rien donné de positif. Aussi, la « sagesse » aurait dû commander à nos « sages » de ne pas succomber aux sirènes de la flatterie et du sunlight pour se retrouver embarqués, malgré eux, sur un bateau ivre. La sagesse aurait dû commander à la troïka de se démettre d’elle-même et aux autres partis politiques de rester fermes sur des positions de principe. La sagesse aurait dû commander aux Tunisiens de ne pas s’arrêter aux apparences et à l’évènementiel pour aller directement à l’origine du mal qui nous ronge.
Face à la crise qui secoue le pays, deux voies étaient possibles. La première, dite légale, devait passer nécessairement par l’ANC. Cette voie est sans issue, pour deux raisons au moins. La première est que deux partis de la troïka, Ennahda et le CPR, se comportent avec les résultats de l’élection d’Octobre 2011 comme s’il s’agit un butin de guerre, avec toute la rapacité qui y sied. La seconde, plus grave, est que ces deux partis, l’un par pure idéologie, l’autre par manque d’idéologie, sont dans l’incapacité intellectuelle et morale de prendre en considération l’intérêt supérieur du pays. L’échec de la tentative « d’ouverture » de Jebali, si jamais elle est sincère, s’inscrit parfaitement dans la logique des choses.
La deuxième voie ne pouvait qu’être illégale, certains diront « révolutionnaire ». Mais dans ce cas, qui en Tunisie aurait pu prendre le risque d’appuyer ouvertement un coup d’Etat qui ne veut pas dire son nom? Pas nos partis politiques en tout cas et pas davantage une grande partie des Tunisiens et encore moins ceux qui poussent aux extrêmes sans mouiller le maillot. Cela dit, on pouvait rendre cette voie « légale » si l’ANC avait été capable de s’élever au dessus des cimes pour confier des pouvoirs spéciaux, pour une durée de six mois, à un gouvernement de salut public, seule solution de ramener la paix civile et de rétablir la confiance des agents économiques? Mais on sait tous que dans ce cas, le refus ne viendra pas des seuls rangs de la troïka. Bref, cette voie est sans issue, elle aussi.
Une question se pose cependant : l’ANC est-elle encore « légale » et si c’est le cas, du moins juridiquement parlant, est-elle légitime ? Grave question à laquelle seule la conscience individuelle peut répondre bien que tout indique que l’ANC a bel et bien rompu le contrat moral et politique la liant aux électeurs et à ses propres promesses écrites.
En vérité, le ver est depuis longtemps dans le fruit. Ce qui se passe aujourd’hui n’est en réalité que la résultante inéluctable du mode de scrutin imposé par le Comité Ben ACHOUR, car en définitive, c’est ce mode qui est à l’origine du régime des partis tel qu’il existe. Le problème est que l’opinion publique n’arrive toujours pas à faire le lien entre ce mode de scrutin et la crise politique qui secoue le pays et à comprendre que la crise perdurera quoiqu'il arrive dans l'avenir, que la majorité parlementaire vienne à changer ou non.
La Tunisie a besoin d’un exécutif fort et d’une majorité politique soudée, résolue et stable. Cette condition est impossible à remplir dans le cadre du mode actuel de scrutin. La lecture attentive des derniers sondages confirme d’ailleurs cette appréhension puisque leurs résultats montrent que les deux pôles dominants « putatifs » seront nécessairement, l’un comme l’autre, paralysés par des alliances post-électorales aussi mouvantes que capricieuses.
Habib Touhami
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félicitation pour votre article plein de bon sens, j'espère que votre analyse servira à la Tunisie qui elle, a besoin de personalités comme vous...