Mériem Bourguiba Laouiti: Bourguiba construisait un Etat républicain et non une dynastie
Née aux États Unis, son père, Habib Bourguiba Jr, était alors ambassadeur de Tunisie à Washington du temps de John F. Kennedy, Anglaise «d’adoption» et de formation universitaire, ayant vécu 30 ans à Londres, également Française de sang par ses deux grands-mères, mais profondément Tunisienne, de souche, de culture, de tempérament et d’engagement, Mériem Bourguiba, l’unique petite-fille de Habib Bourguiba, et aussi le seul des Bourguiba à s’engager depuis la révolution dans l’action politique, est sans doute un témoin privilégié de toute une époque. Y compris la révolution qu’elle a vécue dès les premières heures et qu’elle continue à vivre en première ligne. Toujours murée dans sa discrétion naturelle, ne se pliant que rarement aux demandes d’interview, elle a accepté, cette fois, de s’épancher à Leaders. Son récit est poignant. Il nous fait découvrir une réalité que beaucoup ignorent.
En fait, Habib Bourguiba Jr, son épouse et leurs enfants n’avaient pas avec Habib Bourguiba père les rapports d’intimité et de proximité qu’on peut imaginer. Du temps où il était à Carthage, ils n’y allaient que lors de cérémonies officielles, parmi les invités. En captivité à Monastir, il n’était accessible que parcimonieusement et surtout les dernières années de sa vie. Pour Mériem, Bourguiba n’était pas son papy, mais Monsieur le Président.
Dérangée par les premiers signes de dérives qui ont commencé avec la présidence à vie, Mériem avait choisi, à 17 ans, de partir pour Londres poursuivre ses études mais aussi prendre ses distances vis-à-vis de ce qu’elle ne pouvait accepter: le 7 novembre 1987 la confirmera dans ses convictions. Son «émigration», depuis 1980, se prolongera jusqu’à la veille de la révolution. Longtemps «détunisifiée» comme beaucoup de Tunisiens qui ont vu leur identité usurpée et leur pays dévoyé, elle revendique le 14 janvier sa citoyenneté à part entière, encore plus que jamais. En participant immédiatement à la fondation d’Afek Tounès (qui fusionnera avec le PDP entre autres, dans Al Joumhouri), se portant candidate à Monastir aux élections du 23 octobre (manquant de quelques dizaines de voix seulement son siège au Bardo), et s’investissant dans l’action politique, elle accomplit son devoir d’humble néo-citoyenne. Sans aucune autre ambition, encore moins se prévaloir de l’héritage, politique ou historique de son illustre grand-père Habib Bourguiba. «Bien que source de fierté personnelle et familiale, l’œuvre, la pensée, le combat et tout ce qui concerne Bourguiba, l’homme publique, dit-elle à Leaders, c’est l’affaire des spécialistes et non de la famille. A eux de s’en charger. En revanche, la famille reste vigilante et enregistre les régulières attaques diffamatoires et de désinformations le concernant».
Entre ses activités associatives (diverses ONG sociales) et militantes (bureau politique et groupes d’Al Joumhouri) et ses engagements familiaux, Mériem s’arrange pour s’occuper de son jardin où elle cultive différentes plantes, fleurs et … céréales. Chose inhabituelle dans la zone, elle a en effet semé du blé Mahmoudi (qui fit de Carthage le grenier de Rome) et se sert de sa récolte pour faire pain, couscous et autres mhammes, comme au bon vieux temps. Décidément, elle ne cesse d’étonner. Interview.
Quels sont vos premiers souvenirs avec Bourguiba ?
En fouillant dans ma mémoire, je ne retrouve pas de premiers souvenirs avec Bourguiba, plutôt des scènes qui reviennent de temps à autre. Il faut dire que nous n’entretenions pas avec lui une vie familiale intime et assidue et nous n’allions pas le voir spontanément au palais de Carthage. C’était surtout les jours d’Aïd que nous y allions, parmi la cour. Mais, comme on allait tous les dimanches déjeuner chez ma grand-mère Moufida, on avait plus de chance de le rencontrer dans un contexte plus intime, même s’il restait assez distant. Il vivait le pays. Physiquement, il était avec nous, mais souvent son esprit était ailleurs. Il n’était présent que pour Moufida avec qui il avait de vraies conversations, et qu’il écoutait avec respect et attention. Pour moi, il n’était pas Baba Azizi, mais Monsieur le Président. Il laissait cependant toujours en nous quelque chose de lui.
Etait-ce le cas aussi avec votre père?
Mon père, par contre, c’était mon Papa. Avec maman, Neila Zouiten, ils ont formé un couple fusionnel, le rocher de l’un pour l’autre. De sa maman Moufida, de son lointain père et de son présent oncle Si Mahmoud, il avait hérité de nobles valeurs, veillant toujours à la droiture, dans l’abnégation totale. Je vous laisse imaginer l’enfance puis la jeunesse qu’il a eues de fils de prisonnier baladé de bagne en exil et de leader courant les meetings et parcourant le pays, puis après l’indépendance de tout ce que vous savez. Il reste la personne qui m’a le plus marquée dans ma vie avec ma mère et mes deux grands-mères, le héros de ma jeunesse et jusqu’à très tard dans ma vie pour qui je n’ai pas seulement amour filial mais aussi respect, admiration et fierté sans cesse renouvelés.
Revenons à Bourguiba…
Quand j’ai eu mon bac, Bourguiba m’a fait venir pour me féliciter et m’offrir un petit cadeau. Le jour des mes fiançailles avec Kais (le fils de son fidèle compagnon, Allala Laouiti), il était très heureux. Mais, nous n’avions pas beaucoup de conversations avec lui. La politique, c’était quelque chose de personnel et non une question de famille. Bourguiba était en train de construire un Etat républicain et non une dynastie. Quand j’entends certains parler de la dictature de Bourguiba, je ris de l’ignorance pathétique des uns et méprise la mesquinerie vindicative des autres. Si dictature il y avait, ce serait celle de son gouvernement. Le Premier ministre avait tous les pouvoirs, le régime était celui de Bourguiba, mais la gouvernance du Premier ministre. Beaucoup de vérités demeurent encore cachées et il serait grandement utile d’ouvrir aujourd’hui les archives de l’Etat. Remettons tout à plat. Regardons la vérité en face. La justice transitionnelle, nécessaire, impérative, est faite pour ça. Alors je suis la première à revendiquer haut et fort qu’on ouvre tous les dossiers. Je suis sûre que nous aurons les surprises qu’on nous a cachées et qu’on nous cache encore… Il y a eu des dérives, surtout les dernières années. Dommage que certains s’y soient concentrés et n’aient retenu que cette dernière période pour déformer tout ce qui l’avait précédée.
Comment s’est produite en vous la rupture?
A 11 ans, j’étais très gênée d’apprendre l’acceptation par Bourguiba de la présidence à vie. C’était pour moi une grave décision qui allait à l’encontre des valeurs républicaines qu’on m’avait enseignées. Je l’ai gardé pour moi, et pris le large dès mon Bac en poche. À 17 ans, fille, et qui plus est, petite-fille de Bourguiba, je ne pouvais pas lui faire de la résistance, ça n’avait pas de sens. Alors autant aller poursuivre mes études à l’étranger. Je pensais pouvoir tourner la page ; c’était en fait un long chapitre de 30 ans. J’avais choisi Londres pour y suivre des cours de danse. Puis, je me suis inscrite à l’université SOAS (The School of Oriental and African Studies), pour faire de l’arabe et, en option, l’hébreu moderne. Après de premiers petits boulots, comme tous les étudiants, j’ai pu obtenir un travail intéressant dans des firmes financières américaines installées à la City. Pendant sept ans, je me suis donnée à fond à mon travail, parmi les golden boys et golden girls. Quand je m’embarque, j’essaye d’être la meilleure de moi-même.
Vous vous êtes mariée…
Oui, entre-temps, je m’étais liée à Kais, nos familles se connaissaient de très longue date, puisque son père Allala Laouiti était le compagnon de toujours. Nous étions voisins à un moment et partagions les quelques jours que nous passions l’été à Monastir. En vacances, les enfants des deux familles, étudiants à l’étranger, se retrouvaient tous ensemble. Kais poursuivait ses études aux Etats-Unis, au Minnesota, et voulait s’installer à New York. Je l’avais convaincu d’essayer Londres, puis quand on s’est mariés en 1984, nous avons convenu d’y rester 5 ans, établissant une sorte de plan quinquennal. On a fini par boucler cinq plans, soit 25 ans, jalonnés de la naissance de nos trois enfants. J’ai voulu alors m’arrêter de travailler pour me consacrer à eux, toujours par souci d’être la meilleure de moi-même, pour assurer l’éducation de mes enfants, ordinaire ou «extra-ordinaire» puisque mon aînée est trisomique 21. Plus tard, j’ai repris les études et je suis devenue praticienne d’homéopathie, fleurs de Bach, Reiki, méditation transcendantale et yoga.
Comment avez-vous vécu la destitution de Bourguiba?
Ce qui s’est passé le 7 novembre 1987 me confirmait dans ma décision de prendre mes distances par rapport à la Tunisie et à tout ce qui s’y passait. Je me sentais bien étrangère dans mon propre pays, et bien à l’aise à Londres. Ce jour-là, un samedi et jour de repos, je me préparais à partir le lendemain en mission à New York, quand l’appel d’un ami de mon père me réveilla tôt le matin. Ne soupçonnant rien dans ma voix, il m’avait juste dit qu’il s’enquérait de mes nouvelles, me demandant de reprendre contact plus tard dans la matinée, si quelque chose n’allait pas. C’était suffisant pour susciter ma curiosité, je me suis alors précipitée sur les infos. C’était à la une, sur les radios et les télés. Mon premier réflexe était d’appeler mon père. Sa réponse résonne encore dans ma tête. Pour toute réponse, il me dit : «Je ne suis plus fils du Président !», comme s’il se délivrait d’un boulet qu’il avait assumé très honorablement.
Vous avez continué à vous rendre auprès de Bourguiba à Monsatir ?
Tous les mardis et jeudis, mon père allait rendre visite à Bourguiba, dans sa résidence surveillée, à Monastir. J’en profitais pour l’y accompagner lors de mes séjours à Tunis. C’était assez éprouvant de frustration. Privé de téléphone et de correspondance, interdit de visites, sauf pour les quelques proches et sur autorisation, avec pour nous l’obligation de ne rien amener avec nous et de ne rien sortir de chez lui, Bourguiba était bel et bien en captivité et se sentait épié, ayant conscience des micros incrustés pour l’écouter. On lui amenait des journaux tunisiens, mais il s’en détournait, il lisait par contre les hebdomadaires étrangers que lui amenait mon père. De même qu’il refusait d’écouter la radio ou de regarder la télé, officielles, se contentant de suivre la deuxième chaîne française. D’ailleurs, un jour d’août 1991, et alors qu’il était en train de déjeuner, il apprit par la télé que Boris Eltsine avait rétabli Mikhaïl Gorbatchev au pouvoir. Doucement, il glissera: «Lui, il a trouvé des hommes dans son pays!». De plus et tout «sénile» qu’il avait été déclaré, sa réaction aux accords d’Oslo était : «Trop peu, trop tard, et des extrémistes des deux côtés»
Ne voulant pas comprendre les raisons de son emprisonnement à Monastir, Bourguiba avait plusieurs fois réclamé qu’on le traduise devant la justice, multipliant ses lettres à Ben Ali, et au procureur de la République pour les mettre devant leurs responsabilités. En vain. Exaspéré par leur silence, il s’était un jour emporté devant mon frère Mahdi qui lui rendait visite, en disant: «Mais pourquoi ils ne me jugent pas ? Je ne comprends pas». Ironiquement Mahdi lui dit : «Ils ont peur de toi». Sans la moindre hésitation, Bourguiba répliqua immédiatement : «Suis-je un âne pour répéter une erreur ?».
Il n’était pas sans humour pourtant. Tous les 3 août, il recevait de Ben Ali un bouquet de roses rouges du nombre de ses années, accompagné d’une carte signée «Votre fils, Zine Abidine BenAli». À la question de mon père d’où venait le bouquet, il répondait : «De ton frère!» C’était la blague annuelle !
Comment avez-vous vécu son décès ?
Lorsque Bourguiba avait amorcé son syndrome de glissement, deux mois avant son décès, mes parents avaient élu résidence à Monastir pour se tenir près de lui. Pour ma part, je faisais la navette deux fois par semaine et la famille se retrouvait le plus longtemps possible à son chevet. On ne croyait pas lors de sa mort, qu’après la guerre de nerfs menée par les valets de Ben Ali, on allait subir, pour ses funérailles, l’humiliation du choix du chemin des parias pour le cortège funèbre, et la mascarade de la retransmission télévisée réduite au strict minimum, ce que le monde entier a désapprouvé.
Après 30 ans d’exil, vous avez décidé de rentrer au pays…
L’année 2009 fut particulièrement éprouvante pour moi. Mon mari décida de rentrer s’installer au pays. Le suivre n’était pas facile à faire, tant il y avait des dispositions à prendre à Londres et des préparatifs nécessaires à Tunis. La plus rude épreuve fut la maladie de mon père, puis son décès, en décembre de la même année. J’ai fini par débarquer en octobre 2010, comme si on avait pris rendez-vous avec ce qui allait se passer. D’ailleurs, on sentait quelque chose dans l’air, sans rien savoir au juste, et un sentiment profond nous incitait à retourner, de peur de rater un tournant.
…Et ce fut la révolution !
Evidemment, vendredi 14 janvier, j’étais avec mon mari sur l’avenue Bourguiba. De toutes nos énergies, nous réclamions notre citoyenneté. Pendant longtemps, je me sentais détunisifiée, comme beaucoup d’autres. Mais, ce jour-là, à 48 ans, je suis redevenue Tunisienne, citoyenne. C’était long à attendre, pénible à endurer, mais heureuse d’être rétablie dans ce que je suis, et ce que je partage avec mes concitoyens.
Qu’avez-vous fait alors ?
Lorsqu’une fenêtre d’opportunité s’ouvre, il faut s’y engouffrer, avec le plus grand nombre de personnes possible. Cet élan magnifique de l’action associative, que j’avais longtemps pratiquée à Londres, nous emporta tous. D’emblée, j’étais convaincue que c’était nécessaire, mais pas suffisant. Quand on veut changer le cours des choses, créer tout un courant, il faut faire de la politique. Lors des élections, c’est aux partis de prendre le relais de la société civile, en suscitant des synergies utiles… Je suis déçue de voir parfois l’associatif se déclarer apolitique et rompre les ponts avec les partis. Face à la paupérisation de la classe moyenne, à la fracture sociale et identitaire si profondes, à la désertification éducative et culturelle et à toutes ces menaces si lourdes de conséquences, on ne peut pas se réfugier derrière l’indépendance vis-à-vis des partis. Il faut s’engager, agir. C’est à ce moment et plus que jamais que l’associatif doit servir de moteur et de guide au politique. Pour moi, la complémentarité et les synergies sont non seulement évidentes, mais aussi impératives.
Dès les premiers jours, des amis m’ont contactée pour qu’on se réunisse et voyions ce qu’on peut faire ensemble. C’est ainsi que je me suis retrouvée avec Neila Charchour, puis Ali Kooli, Yassine Brahim, que j’avais connu à Londres, Slim Zeghal, Sami Zaoui et d’autres, à approfondir nos débats pour aboutir à la fondation d’Afek Tounès qui fusionnera avec le PDP dans Al Joumhouri. Les élections du 23 octobre 2011 étaient pour nous un premier exercice important de la démocratie. Portée tête de liste à Monastir, je savais que ma tâche n’était pas facile. Je suis certes la petite-fille de Bourguiba, mais rien que dans le camp des destouriens, il y avait déjà plusieurs listes en compétition. J’ai raté mon siège de quelques dizaines de votes. D’ailleurs, pendant 48 heures, et selon les premiers dépouillements, j’étais déclarée élue, mais c’est finalement un autre concurrent qui l’a emporté.
Quel est votre rôle au sein du parti?
Je suis membre du bureau politique et je m’active principalement dans deux groupes: la commission coordination femmes et le bureau national de la formation, sans autre ambition que de servir. Il est vrai que je fais de la politique, mais je ne suis pas politicienne. Pour l’être, il faut la vocation et elle commence tôt. Et puis, l’arène politique n’est pas la mienne. J’aime échanger mes points de vue et les partager avec les autres et rester libre de ne pas entretenir d’ambition de postes à briguer. Je sais écouter également, ce qui me sert beaucoup dans nos multiples déplacements à travers le pays.
Pourquoi pensez-vous que les Tunisiens n’arrivent pas encore à se relancer?
En essayant de réfléchir à la situation générale qui prévaut deux ans après le déclenchement général, je me rends compte que nous sommes tous atteints d’un même syndrome : chacun cherche à accuser l’autre et l’accabler. Personne n’a encore fait son mea-culpa et nous n’avons pas toujours fait notre mea-culpa collectif. Tant que nous n’avons pas exorcisé ce grand monstre, notre thérapie générale n’est pas terminée et nous ne pourrons pas rebondir pour reconstruire la transition si nous continuons à ignorer l’impératif d’une réelle justice transitionnelle.
La famille de Bourguiba a-t-elle été associée à l’aménagement du musée qui lui sera consacré à Skanès?
Nous n’avons pas été sollicités. On nous a invités une fois au palais de Carthage pour nous montrer ce qui avait été trouvé dans ses caves, mais sans plus. D’ailleurs, nous n’avons même pas récupéré tout ce qui se trouvait dans la maison familiale, à Monastir, spolié par Ben Ali, pourtant propriété de Bourguiba, payé de ses propres deniers au sujet duquel une lettre datée d’octobre 2012, est restée sans réponse. Pour le reste, je considère cependant que l’héritage de Bourguiba, conceptuel, spirituel, historique, militant, c’est le devoir et la responsabilité des spécialistes et non de la famille. A eux de faire le travail et je suis persuadée que si on leur donnait l’occasion et les moyens, historiens, analystes, chercheurs, documentalistes, muséologues et autres s’en acquitteraient à merveille. Par contre, les valeurs, l’humanisme et l’esprit de Bourguiba, c’est l’affaire de chacun de nous. A chacun sa manière de les perpétuer, comme j’essaye de m’en acquitter avec l’humilité, la dignité et l’intégrité qui sont nos valeurs familiales, et l’héritage dont je reste fière.
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