Pourquoi la Tunisie appelle à la création d'une Cour Constitutionnelle Internationale ?
Initiatrice du projet de création d’une Cour Constitutionnelle Internationale pour prévenir le détournement des institutions démocratiques, la Tunisie en présentera les contours lors d’une conférence internationale qui se tiendra ce vendredi 3 mai au Palais de Carthage. Trois thèmes principaux ont été retenus, à savoir : les remèdes juridiques afin d’empêcher le détournement des institutions démocratiques, les modalités de mise en place de la Cour Constitutionnelle Internationale, et le droit substantiel qu’elle devra appliquer. Pour en débattre, cette conférence organisée en partenariat avec International IDEA et avec le soutien de la fondation Konrad Adenauer Stiftung ,regroupe un parterre de spécialistes de divers continents et un public de différentes préoccupations, professions et spécialités, indique à Leaders, Ahmed Ouerfelli, conseiller à la Présidence de la République et coordinateur général du comité ad hoc formé à cet effet.
Parmi les intervenants figurent en effet notamment Vidar Helgesen, secrétaire général de d’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDAE), Yadh Ben Achour, Ghazi Gheraïri, Ferhat Horchani, Slim Loghmani, Cheryl Saunders (Australie), Sujit Choudhry (Canada / USA), Ahmed Mahiou (Algérie), Maurice Kamtou (Cameroun), Monique Chemillier-Gendreau (France), James Crawford (Australie / Royaume Uni) Tom Ginsburg (USA), Chistian Tomouchat (Allemagne) et Azer Zouari.
Un mécanisme juridictionnel au service des peuples
« La création de la Cour Constitutionnelle Internationale est un rêve qui a tant hanté des rêveurs à une époque où il était difficile de rêver, indique Ouerfelli. Il a été partagé par des politiques et des juristes. En effet, en 1999, Dr. Mohamed Moncef Marzouki a lancé cette idée. Ensuite, elle a été relayée par le Professeur Yadh Ben Achour sept ans après. Cette idée consiste dans l’établissement d’un mécanisme juridictionnel auquel les peuples opprimés, qui voient une junte gouvernante s’accaparer le pouvoir et les richesses du pays, tout en taisant toute voix libre, alors qu’en même temps, les dictateurs plantent un sinistre décor emballé par une couverture qu’elle veille à ce qu’elle ne soit pas moins brillante que celle des véritables démocraties : parlements, tribunaux judiciaires, civils, pénaux, administratifs, constitutionnels, et instances de contrôle et de lutte contre la corruption et de l’enrichissement illicite, ainsi que d’autres éléments d’un décor artificiel ».
« Le Comité d’experts qui a été institué à cette fin, ajoute-t-il, a abouti à dessiner un système fondé sur la diversité culturel et civilisationnel ainsi que sur la représentation équitable des cultures juridiques, afin de garantir la neutralité et l’indépendance, à condition que la nomination des 21 juges de la Cour soit effectuée par les instances judiciaires onusiennes et internationales. Le rôle de cette Cour consisterait à recevoir et à statuer sur les requêtes de la société civile et de la communauté politique en ce qui concerne la violation de la normativité constitutionnelle internationale après audition de l’Etat mis en cause, outre une fonction d’évaluation et de conseil aux Etats qui entendent amender leurs Constitutions, lois électorales, ou encore leur législation relative aux partis politiques, aux associations, à la presse ou aussi aux libertés publiques ».
"En l’absence d’un texte général qui puisse constituer une Constitution internationale stricto sensu, indique Ahmed Ouerfelli, la Cour appliquera un ensemble de règles qui concourent, se recoupent, et se répètent dans un ensemble d’instruments: chartes, conventions internationales et jurisprudence internationale, lesquelles règles portent notamment sur le droit international à la démocratie, c'est-à-dire le droit de chaque peuple de s’autogouverner à travers des élections transparentes, équitables et périodiques, outre le respect des droits de l’Homme et la lutte contre la corruption".