Une Conférence nationale économique est nécessaire
Je propose la tenue d’une Conférence nationale économique dans les prochaines semaines. Une telle conférence est nécessaire d’abord pour mettre en exergue l’importance du redressement de l’économie nationale. Notre économie a jusqu’ici fait figure de parent pauvre pour la classe politique tunisienne alors que la Révolution du 14 janvier a été l’expression non pas seulement de la lutte contre la dictature mais aussi l’aspiration de nos jeunes à un avenir économique et social meilleur.
Une telle conférence est nécessaire ensuite pour dégager un consensus national sur les chantiers économiques urgents qui doivent être lancés au cours de la vie restante du gouvernement actuel pour mettre un terme à la dégradation progressive de notre économie nationale, surtout en ce début de 2013.
Une telle conférence est nécessaire enfin pour montrer que le peuple tunisien est capable, à travers ses composantes politiques et civiles, de trouver les réponses communes positives aux défis auxquels notre économie nationale fait face et qui menacent son avenir. Car il n’y a pas d’avenir politique sans une économie solide. Il n’y a pas de démocratie sans dignité humaine bâtie sur le travail et ses fruits. Il n’y a pas de vie communautaire sans libération des forces créatrices de richesses.
Revenons sur ces trois considérations. D’abord primauté du redressement économique. Faut-il rappeler ici la négligence -malveillante ou bienveillante- des partis politiques à l’égard de l’économie nationale ? Au cours des élections du 23 octobre 2011, les programmes économiques des partis ont été soit obscurs soit populistes pour attirer d’une manière démagogique les électeurs et leur promettre monts et merveilles. Le choc des jeunes a été brutal quand ils se sont aperçus qu’il s’agissait de promesses mirobolantes sans lendemain. Faut-il rappeler aussi que la plupart des dirigeants politiques ont une culture économique médiocre sinon inexistante ? Ce n’est pas de leur faute. Cela est dû à leur formation : hommes ou femmes de droit ou de médecine ou de littérature ou d’ingénierie. Une telle conférence permettrait à nos dirigeants de se rendre compte de l’importance de l’économique et de sa primauté dans la vie communautaire. Elle leur permettrait de discuter avec les experts et les hommes d’affaires des mesures concrètes susceptibles d’assurer le redressement de l’économie nationale. Ne serait-ce que par cet aspect pédagogique, une telle conférence sera bénéfique.
Les chantiers économiques urgents sont à mon avis très clairs. Il faut redonner à notre économie son dynamisme et ses capacités exportatrices. Le premier chantier qui vient à l’esprit est la relance du bassin minier. L’équivalent de milliards en devises a été perdu durant les deux dernières années par notre économie sans que l’on se rende compte de l’urgence de ce problème et de sa solution définitive. Il n’y a pas que le manque à gagner en devises, il y a aussi un manque à gagner fiscal pour le budget national. La conférence devrait trouver une solution définitive à ce navrant problème. Un autre chantier immédiat est la saison touristique qui doit- coûte que coûte- être sauvée. Non seulement par la sécurité des personnes et des biens mais aussi par une campagne vigoureuse dans le Maghreb, l’Europe et l’Asie et la mobilisation de tout l’appareil productif de ce secteur si important par l’emploi et les devises qu’il procure. Il y a également le tarissement des investissements, notamment les investissements publics d’envergure et les investissements publics de développement régional. La conférence permettra d’arriver à des mesures de nature à mobiliser au maximum ces investissements. Enfin, le chantier de la Caisse de compensation est un sujet de qualité pour cette conférence. Un débat objectif, basé sur des données chiffrées, devra aboutir à donner à ce problème la solution définitive qu’il mérite. La réforme du système bancaire ne serait pas à écarter, étant donné son importance, notamment en relation avec l’inflation.
La conférence devrait être organisée par un Comité ad hoc mis en place par le Premier ministre sous la direction du Ministre chargé des questions économiques et comprenant les représentants de l’UGTT, de l’UTICA, de l’Union de l’Agriculture et de la Pêche ainsi que les représentants des ministères clé, de la Banque centrale et de l’Université. Elle devrait inclure toutes les composantes politiques importantes, les chambres de commerce, les banques, la société civile, les jeunes et toute instance intéressée par les questions économiques. Elle devrait se tenir pendant quelques jours pour examiner toutes les questions à l’ordre du jour et prendre les résolutions nécessaires. La première semaine de juillet 2013 serait une bonne date. Gageons déjà sur son succès.
Dr.Moncef Guen