Opinions - 13.06.2013

Comment affiner le statut privilégié avec l'Europe

L’Europe et la Tunisie envisagent de signer un accord de partenariat privilégié, qui donnerait à la Tunisie un statut avancé dans ses rapports avec l’Europe. Que recèle cet accord et quels sont ses principes fondamentaux, c’est ce que nous tenterons de mettre à jour au cours de cette matinée, pour aller au-delà de ce qui est écrit et envisager les impacts d’un tel accord sur nos institutions, notre tissu économique et plus généralement sur nos populations, ce qui est en définitive, l’objectif de toute politique.

Dans les contextes économiques internes et externes difficiles que nous vivons, l’annonce de l’accession de la Tunisie au statut de partenaire privilégié de l’Union européenne reste un signal politique fort qui démontre une confiance et une volonté de l’Union Européenne d’offrir à la Tunisie l’opportunité de s’arrimer à l’espace économique européen.

Ce statut s’articule autour de trois axes fondamentaux que sont :
• La coopération politique
• L’Intégration économique et sociale
• Le rapprochement entre les peuples dans une dimension humaine et scientifique
qui doivent permettre à la Tunisie :
• D’avancer sur la voie d’un renforcement des institutions et de l’état de droit
• De faire le choix d’un ancrage autour d’un système de valeurs sociétales partagées
• D’intégrer l’espace économique commun à travers l’ALECA
Au sens de cet accord l’Europe, exigera de la Tunisie des efforts sur la voie des réformes administratives et institutionnelles, des investissements en matière d’infrastructures et de formation, pour s’aligner aux standards européens en la matière. Pour accompagner ces réformes l’Europe propose son assistance technique et budgétaire, mais là se posera la question du juste rapport entre un membre à part entière et un partenaire privilégié en matière de contribution budgétaire et d’assistance?

Etre partenaire privilégié de l’Europe, ce doit être pour la Tunisie autre chose que d’aspirer à être le récipiendaire des délocalisations à faible valeur ajoutée, ce doit d’être d’avoir l’ambition de se doter de structures et d’institutions qui soient à la hauteur de l’œuvre de développement que réclame le pays.

Il ne faudrait pas tomber dans une forme de névrose anti-européenne, et se souvenir que l’Europe reste le seul exemple d’une démocratie continentale intégrée, même si son économie s’essouffle et qu’elle peine parfois à prendre en compte les aspirations de ses peuples.A l’avenir si la crise persiste au Nord, les flux migratoires pourraient aller jusqu’à s’inverser, cela pour dire que nous avons besoin de l’Europe autant que l’Europe a besoin de nous.

Que l’Europe cherche à obtenir des avantages dans le cadre d’un accord de partenariat n’est pas chose étrange. Entre partenaires il y a nécessairement un rapport de force par lequel chacun doit créer le désir chez l’autre.C’est à nous de défendre nos propres intérêts, et de faire valoir que le partenariat doit être régi par l’équité dans les droits et non par l’égalité des droits. L’équité entre un espace de 500 millions d’habitants et un pays de 11 millions d’habitants.

Oui pour un partenariat décomplexé et harmonieux, mais encore faudrait-il être en mesure de négocier, de proposer et d’obtenir un rapport équilibré, et être à la hauteur du moment et des enjeux. Les enjeux de cet accord sont Tunisiens avant d’être européens, et le défi est porté à la Tunisie avant d’être porté à l’Europe. C’est en étant ambitieux que nous tirerons le meilleur parti de cet accord, c’est en étant proactifs que nous obtiendrons plus de l’Europe, et c’est en étant réalistes que nous défendrons le mieux nos choix.

C’est à nous de mesurer nos forces et nos faiblesses, d'affiner l’impact de cet accord, élaborer nos stratégies et renforcer nos positions. Lorsque le partenaire avec lequel vous faites 70% de vos échanges commerciaux vous propose d’aller plus avant dans la relation, c’est forcément une opportunité, mais c’est à vous ensuite d’en faire une réalité pour les tunisiens.

En disant vous, je m’adresse à l’ensemble des forces vives de la Tunisie nouvelle, toutes celles qui sont actives sur les terrains politique, économique et social, concernées par le sujet et qui ont une vision à proposer à la Tunisie, une contribution à apporter au dialogue avec l’Union Européenne, et au débat national qui doit nécessairement s’ouvrir.

Notre espoir à l’IACE, c’est que ce débat s’ouvre enfin et offre à la Tunisie l’occasion de montrer un autre visage que celui qu’elle montre aujourd’hui, et que l’on se rassemble autour d’un projet porteur d’espoir et à travers lequel nous puissions concrétiser les aspirations portées par le 14 Janvier, il y a déjà plus de deux ans.

Walid Bel Hadj Amor

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