L'argent étranger, les partis et les associations
Tous s’accordent à dire que beaucoup d’argent provenant de l’étranger déferle sur la Tunisie, irriguant, du moins, le tissu associatif. Cela varie des transferts bancaires effectués en bonne et due forme, déposés sur les comptes d’ONG, aux montants transportés en cash, déclarés souvent aux Douanes à l’arrivée, puis ils iront vers diverses destinations difficiles à tracer, à du cash invisible. Si de nombreuses associations tiennent des registres comptables transparents et règlent la plupart de leurs dépenses par chèque, d’autres sont moins rigoureuses en la matière. Bref, beaucoup d’argent et de cash, affirment les connaisseurs du dossier qui appellent à une réglementation transparente.
Il faut dire que le financement des associations a été l’une des armes redoutables de l’ancien régime : pour en gratifier celles qui leur ont fait allégeance et en sevrer toutes les autres. Au nom d’une vieille réglementation soumettant la réception de dons étrangers à une autorisation du ministère des Finances, quasi impossible à obtenir, la Ligue tunisienne des droits de l’Homme et d’autres associations militantes contre la dictature en avaient longtemps fait l’épreuve. L’assèchement des ressources financières à l’ancienne opposition était érigé en stratégie sécuritaire. Ce verrou de l’autorisation ne pouvait alors que sauter avec le déclenchement de la révolution .Le décret-loi n° 88- 2011du 24 septembre 2011 relatif aux associations en Tunisie a abrogé de facto le système d’autorisation. Les seules interdictions en la matière concernent l’exercice d’activités commerciales aux fins de distribution de fonds à ses membres ou la collecte de fonds en faveur de partis politiques ou de candidats à des élections. Une grande liberté censée certes faire appel au sens de la responsabilité, qui n’a cependant pas manqué d’ouvrir la voie à de généreux financements étrangers, de diverses origines. Tout un chapitre à étudier en profondeur.
Et les partis politiques ?
Si les associations bénéficient de cette largesse légale, les partis politiques, eux, sont soumis, du moins officiellement, à une restriction très précise. Le décret-loi n° 87-2011 du 24 septembre 2011 relatif à l’organisation des partis politiques consigne dans ses articles 19 à 23 les dispositions en matière financière, interdisant formellement tout financement direct ou indirect en espèces ou en nature, provenant de n’importe quelle source étrangères et précisera pour les autres ressources d’origine tunisienne des procédures très claires.
Légalement donc, pas d’argent étranger pour les partis politiques. Tous d’ailleurs affirment se conformer à la règle, mais comment peut-on le vérifier avec exactitude et qui est habilité à le faire? Encore un dossier qui reviendra sans doute sur le tapis à l’approche des élections, exigeant la mise en place de mécanismes institutionnels de contrôle.