Nadhir Ben Ammou parle de Sami Fehri, de la libération des ministres de Ben Ali et de Ridha Grira
Le ministre de la Justice du gouvernement Laarayedh, Nadhir Ben Ammou est de tous les membres de ce cabinet celui qui suscite (avec, à un degré moindre, son collègue des affaires étrangères) le plus de controverses, non pas tant par ses déclarations que par son extrême discrétion. Il vient de rompre le silence en accordant une interview au journal «El Maghreb».
Comment a-t-il trouvé son ministère ? « L’ambiance qui y règne est comparable à celle qui existe dans les autres départements tant au niveau des mentalités que des comportements ; Vous y trouverez des personnes qui sont responsables d’un secteur et ceux qui l’accapare en procédant à la rétention de l’information et en l’exploitant à des fins personnelles et ce sans tenir compte de l’intérêt général avec des retombées négatives sur le rendement du service public. Cette situation est héritée de l’indépendance. Si nous sommes rationnels, on doit saisir que les changements ne pourront se faire que graduellement et par des mesures bien étudiées ». Il prend soin de ne pas incriminer son prédécesseur, comme le lui suggère son interlocutrice, affirmant que tous ceux qui se sont succédé à la tête de ce ministère depuis la révolution se sont trouvés confrontés à cette réalité. Tous ont tenté d’y remédier mais avec des fortunes diverses. Il a également évoqué certaines affaires qui avaient défrayé la chronique ces derniers temps
- Affaire Sami Fehri : c’est une bulle médiatique. J’ai été souvent interpellé à propos de cette affaire par des ambassadeurs et des responsables dans des organisations internationales. Et à chaque fois ma réponse était la suivante : qu’elle est la différence entre Sami Fehri et tout autre détenu à la disposition de l’enquête? En réalité derrière Sami Fehri, il y a un média. Et c’est là où réside la différence, entre quelqu’un qui est en mesure de faire du bruit et un autre qui n’en est pas capable ou qui n'en veut pas. Si nous voulons agir selon des principes qui constituent des référents, indépendamment des personnes et de leurs idées ou de leur position sociale, il faut respecter le principe de l’indépendance de la justice et mettre celle-ci à l’abri des pressions. Nous avons 23000 détenus dont 12000 sont à la disposition des enquêteurs. Pourquoi voulez-vous qu’on focalise sur Sami Fehri. Celui-ci doit être logé à la même enseigne que les autres détenus et il n’existe aucun mobile politique derrière sa détention.
- Les ministres de Ben Ali récemment libérés : Beaucoup de commentaires ont suivi leur libération. Ils relèvent généralement du procès d’intention. Pourquoi ne pas les libérer tant qu’ils sont interdits de voyage et qu’ils restent à la disposition de la justice. S’agissant de Ridha Grira, le ministre s’est étonné du traitement à part qui lui est réservé dans la presse, révélant qu’il avait refusé de prendre un traitement et même de subir des examens pour vérifier s’il est vraiment atteint d’un cancer. Je dois préciser qu’il avait subi une opération en 1998. Il a ensuite subi des contrôles à trois reprises. A la suite de quoi, il s’est complètement rétabli. Rien ne prouve donc qu’il soit gravement malade en l’absence d’examens. Je comprends qu’il souffre d’un état de dépression, Tout détenu peut en être affecté. Sachant que Ridha Grira est impliqué dans 86 affaires, comment pourrais-je dans ce cas décider sa libération.Cependant, s'il accepte d'être examiné, cela pourrait augmenter ses chances d'élargissement.