Opinions - 28.07.2013

Radhi Meddeb: Que faire? Une sortie de crise en six points

L'émotion est grande. La confiance est rompue entre le Peuple et le Pouvoir. Depuis des mois, cette confiance ne tenait qu'à un fil. Le Peuple espérait l'adoption, au plus vite, d'une constitution faite pour le plus grand nombre, qui reconnaisse l'identité tunisienne, dans son ouverture, sa tolérance et ses valeurs. Il espérait la sortie de la situation transitoire, néfaste à tous points de vue. Il espérait que l'on s'occupe enfin de ses exigences économiques et sociales, de son pouvoir d'achat et de l'emploi de s enfants.

Sous le coup de l'émotion, les réactions fusent. Elles sont souvent violentes. Elles se réfèrent à ce qui se passe en Égypte, soit pour en adopter le processus et le transposer, soit pour le rejeter et dénoncer tout dévoiement de la légalité, rapidement confondue avec la légitimité.
 
Il est clair que la Tunisie passe par un moment de rupture. Les choses ne pourront pas continuer comme si de rien n'était. Cela relèverait de l'autisme. La permanente référence à la légitimité électorale est un leurre. Seul le Peuple est détenteur de légitimité. Il la confie à qui il veut et il a la possibilité de la lui retirer à tout moment. La légitimité électorale ne sera jamais un chèque en blanc. L'ignorer, c'est prendre le risque de se faire sanctionner par le verdict populaire.
 
Cela ne donne pas pour autant la possibilité à qui que ce soit d'appeler à la dissolution de l'Assemblée Nationale Constituante, au renvoi du gouvernement et encore moins à la désobéissance civile. Ceux qui le font, sans perspective institutionnelle et sans couverture juridique nous proposent tout simplement un saut dans le vide, sans parachute ni corde de rappel.
 
La responsabilité commande à tous aujourd'hui, sur la base du consensus, l'adoption d'un plan simple en six points:
  1. mettre en place un Comité de Salut National, regroupant des représentants des partis politiques représentés ou non à l'ANC, de l'UGTT, de l'UTICA et de l'armée nationale, à l'effet de veiller au respect des engagements, avec l'interdiction faite à ses membres de se présenter aux prochaines échéances électorales,
  2. limiter le mandat de l'ANC au 23 octobre 2013,
  3. remettre le projet de Constitution à un Comité d'Experts, limité en nombre, nommés sur le seul critère de la compétence et non de l'allégeance partisane, à l'effet de réviser le texte et de le remettre à l'Assemblée au plus tard au 31 août 2013, avec obligation pour celle-ci de l'adopter au plus tard le 15 septembre 2013,
  4. fixer et annoncer la date de tenue des prochaines élections présidentielles et législatives au 14 janvier 2014,
  5. réhabiliter l'ancienne ISIE et la charger de l'organisation des élections,
  6. nommer un gouvernement restreint de salut national, formé de compétences et de personnalités indépendantes, présidé par une personnalité non partisane, limiter ses prérogatives à la restauration de la sécurité et de l'ordre public, à la gestion des affaires courantes, à la revision des nominations partisanes et litigieuses, comme l'engagement en avait été pris lors de la constitution du gouvernement Troïka II. Interdiction doit être faite à ses membres de se présenter aux prochaines élections.
Il est urgent de se sortir d'un provisoire qui s'est éternisé. Il est important de canaliser la colère et l'indignation dans le sens de la responsabilité, de faire que la Tunisie puisse, au plus tôt, retrouver sa sérénité et engager sans plus tarder toutes les réflexions, les débats et les réformes que la Révolution avait appelés de tous ses vœux.
 
Radhi MEDDEB
Président-Fondateur
Action et Développement Solidaire
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