Entre Nidaa Tounès et Ennahdha, un "compromis historique?"
Moins d’une semaine après l’intervention de Rached Ghannouchi sur Nessma tv, c’est au tour de Béji Caïd Essebsi d’être l’invité de la même chaîne sur la même chaîne pour s’expliquer sur sa rencontre avec son rival et peut-être futur partenaire. Face à un Hamza Belloumi, pour une fois complètement désinhibé, Si Béji s’est montré égal à lui-même, déjouant les pièges que lui tendait son interlocuteur. Tour à tour enjoué et grave, énigmatique et explicite, il s’est efforcé de faire justice des rumeurs qui ont entouré son entretien avec « Cheikh » Rached Ghannouchi : « Il n’y a eu aucun marché entre nous. Ceux qui l'affirment sont des ignares. On s’est contenté d’un survol des principaux problèmes du pays et on est arrivé aux mêmes conclusions. Je crois qu’on se connaît mieux qu’avant ».Trois heures pour un simple survol, l'explication est un peu courte. Mais, il n’en dira pas plus. Curieusement, le journaliste n’a pas cherché à connaître le rôle joué par les deux intermédiaires, Slim Riahi et Nabil Karoui qui se trouve être le patron de la chaîne. Peut-être a-t-il reçu des instructions pour faire l’impasse sur ce sujet ?
Pourtant l’entente cordiale entre les deux partis n’a pas empêché le leader de Nidaa Tounès de dénoncer le gouvernement Laraayedh « qui doit partir », pace que «son échec est parent», ni de réitérer sa proposition de gouvernement de compétences dont il a rappelé qu’elle est à l’origine une suggestion de l’ancien chef du gouvernement qu’il avait émise quelques heures après l’assassinat de Chokri Belaïd. De même, il n’a pas hésité à critiquer la campagne Irhal qui heurte un homme comme lui qui a « le sens de l’Etat », ce qui lui a valu lors du débat qui s’ensuivit les félicitations de Lotfi Zitoun qui a avoué retrouver « le Béji Caïd Essebsi du 23 octobre 2011, l’artisan des premières démocratiques du pays ».
D’ailleurs, cette émission s’est déroulée dans une ambiance surréaliste. Lotfi Zitoun et Ridha Belhaj (celui de Nidaa), assis côte à côte (certainement une idée de Nabil Karoui) discutant sur un ton monocorde sans élever la voix, gênés apparemment, de se retrouver presque toujours sur la même longueur d’onde, s’interpelant par leurs prénoms. Jamais, sans doute depuis la révolution, on n'a eu droit à un débat aussi terne Faut-il s'en plaindre ou s'en féliciter ? Même sur ce point, les Tunisiens sont divisés. Certains appellent de leurs voeux «un compromis historique», une alliance entre les deux principaux partis du pays comme celle que l'Italie avait connue dans les années 80, entre le PCI et la démocratie chrétienne, estimant qu'elle est la solution idoine pour cette étape difficile que traverse le pays. D'autres craignent qu'une bipolarisation serait un danger mortel pour la jeune révolution tunisienne.