" Ce que Nous Tunisiens devrions montrer à la communaute internationale "
Il y a à peine trois ans, un certain 14 janvier 2011, le monde entier s'est réveillé à l'heure tunisienne. En effet, ce petit pays arabo-musulman du nord de l'Afrique avait décidé d'en finir avec un régime qu'il a pourtant servi mais qui a trop duré et finir par devier des principes pour lesquels il fut amené à gouverner .
Le monde en général et l'occident en particulier avaient déjà une idée de cette Tunisie plutôt accueillante, moderne, coquette ,aux allures de bon élève auprès des organismes internationaux. Il fut encore plus enthousiaste , lorsque cette même Tunisie a voulu à l'instar du monde moderne s'emanciper de ses decennies de dictature et le pays d'Hannibal de montrer enfin son attachement aux valeurs universelles de démocratie et de liberté individuelle , pour parfaire son développement humain durable. Même les Tunisiens y ont cru, tellement ils pensaient que l'oeuvre réformatrice de Bourguiba , son projet de société ,sa politique d'éducation, et la modernisation du pays et de son économie du temps de Ben Ali, étaient des préalables suffisants pour permettre à la Tunisie de s'inscrire sans gros dégâts ,dans cette dynamique démocratique, nécessaire désormais pour garantir un développement economique et social durable.
Nous y avons tous cru , anciens responsables ,et nouveaux venus sur la scéne politique, jeune et moins jeunes, hommes et femmes, toutes les générations se sont retrouvées dans cette dynamique post 14 Janvier 2011 et ce rêve fut entretenu presqu'intact jusqu'aux résultats des élections du 23 octobre 2011 . Alors que le peuple Tunisien découvrait à la télé en regardant les premières images de l'assemblée constituante, certains observateurs avertis avaient déjà noté ce jour là ce qui fut invisible ou occulté pendant soixante ans à savoir deux peuples et une Tunisie. Par peur ou par pudeur , toute la classe politique a souhaité éluder ce constat , pensant que les libertés de s'exprimer de s'habiller et de se comporter en société, était une nouvelle donnée avec laquelle il faut faire ...!
Seulement au bout de quelques mois de cohabitation difficile , ces deux Tunisie qui se côtoyaient dans l'hémicycle du Bardo ,dans la rue, sur les lieux du travail , n'arrivaient plus à communiquer. Bilan de ce non dialogue , on célèbrera la fête de l'indépendance pourtant symbole d'unité en groupes séparés, la fête de la République en rangs dispersés, la fête de la femme en hordes distinctes . Le vivre ensemble ne fut pas possible et politiquement , le dialogue, essentiel et primordial pour toute construction démocratique n'a jamais pû être amorcé.
La Tunisie profane politiquement est devenue soudain trop politique au goût des citoyens tunisiens , avec son lot de commérage , de rumeurs , de manipulation de l'opinion publique, ingrédients prévisibles = dans certaines limites = en cette situation dite de transition démocratique. Seulement ce même monde universel qui nous applaudissait il y a à peine trois ans, commence déjà à revoir sa copie sur la Tunisie.
Assassinat politique, comportement jusque là étranger à nos coutumes ,désordres publiques, absence d'autorité , déliquescence de l'Etat-nation , sont le lot quotidien du citoyen. Ce même tunisien soudain ivre de liberté ne sait plus quoi dire = on le voit tous les soirs à la télévision = ne sait plus conduire normalement sa voiture , il pollue son environnement et celui des autres , jette ses ordures n'importe où et la municipalité peine pour les ramasser, absence de civisme? absence d'autorité ? absence de l'Etat? Cette attitude est révélatrice en fait de manière inconsciente , du rejet de cette autorité pourtant élue avec beaucoup d'enthousiasme un certain 23 octobre 2011. S'est-on trompé sur nos politiques actuels ou bien n'ont-ils pas été à la hauteur de la tâche?
L'appel à la dissolution du gouvernement et de l'assemblée constituante fut initié par ceux-là même qui ont appelé en février 2011, à la dissolution des institutions de l'état et la création d'une assemblée constituante qui nous a conduit à la situation à laquelle se trouve la Tunisie aujourd'hui . Ces mêmes personnes qui ont décidé de l'avenir immédiat du pays post 14 Janvier n'ont toujours pas conscience de leur échec ... et continuent pourtant à mobiliser des foules utilisant pour fonds de commerce une formule devenue magique pour le commun des mortels = DEGAGE...! = sans proposer en fait des solutions pratiques pour les maux de la Tunisie actuelle . Seulement le Tunisien a muri depuis mais surtout il donne l'impression de vouloir en découdre avec toute la classe politique tous bords confondus.
Pourtant la situation actuelle en Tunisie aurait dû permettre d'ouvrir la réflexion sur une autre question fondamentale pour la démocratie. Comment faire pour renvoyer celui qui a été élu sans attendre la prochaine échéance électorale? comment le faire sans générer de l'instabilité au sein d' institutions aussi précaires soient elles ...? gardant à l'esprit que ces mêmes institutions , sont l'émanation des urnes et non désignées par un quelconque pouvoir et que si l'on souhaite respecter la démocratie et les règles du jeu que cette dernière impose, on est obligé de reconnaître leur légitimité, malgré l'engagement naïf non respecté fait par la troika de finir l'adoption d'une constitution nouvelle au bout d'une année.
Aujourd'hui comme disait Lacan " le dialogue paraît en lui même constituer une renonciation à l'agressivité " Car c'est cette agressivité dans le discours que nous vivons depuis le 14 janvier 2011 qu'il faut abandonner pour pouvoir construire ensemble la Tunisie de demain.
L'essentiel est l'intêret immédiat du Tunisien . Il veut aller voter, il veut conserver ses récents et précieux acquis démocratiques, il veut rentrer dans le monde moderne, il veut une société où il fait des choix de vie et non pas laisser les rapports entre Tunisiens se réduire à la seule compétition de partis politiques. Car si la responsabilité politique concerne ceux qui gouvernent parce qu'ils sont à l'origine de décisions et d'actes dont ils ont bien sûr la responsabilité, elle ne leurs est pas exclusive, elle concerne aussi tous les partis politiques, la société civile, le peuple et l'ensemble des citoyens. Il faut donc instaurer le dialogue même si cela semble compliqué voire impossible surtout après l'échec des négociations récents entre protagonistes du refus et ceux du statut quo. L'UGTT a essayé de par son rôle historique de rassembler et canaliser les idées politiques porteuses d'un ideal pour la Tunisie sans y parvenir jusqu'à présent ...! elle n'aura d'autre choix que de se retirer pour préserver sa neutralité si le compromis nécessaire n'est pas atteint .
Elle aura le mérite d'avoir tenté d'éviter un chaos social et économique parce que c'est la priorité pour une centrale qui défend les intérêts des travailleurs .C'est pour cela qu'il est plus que nécessaire aujourd'hui de faire taire les extrémistes de gauche comme de droite, élargir le cercle de la réflexion, faire participer toutes les forces politiques et les forces vives du pays à ce débat fondamental pour l'avenir immédiat de la Tunisie . Pour cela, il faut précher l' idée d'une vraie reconciliation nationale nécessaire pour repartir du bon pied et donner un signal fort et rassurant à la communauté internationale, un signal ferme qui recèle l'espoir d'une identité nationale retrouvée et le consensus national consacré . C'est cela le message qu'on doit véhiculer aujourd'hui à nos voisins immédiats à nos partenaires economiques, au monde entier, si la Tunisie souhaite retrouver au plus vite sa place dans le concert des nations.
Il ne tient qu'a nous Tunisiens de sortir notre pays de cette spirale politique hautement préjudiciable à l'image du pays et forger un destin plein d'espoir pour les générations futures. Nous ne sommes qu' au stade de construction des fondations de la maison Tunisie , celles-ci doivent être solides et à l'épreuve des tremblements de terre possibles qui peuvent toujours avoir lieu sur la planète Terre. prions pour que cela puisse être possible et que le spectre du chaos soit à jamais éloigné .
Dr Mohamed Sahbi Basly
Président du Parti Al Mustakbal