Montréal – De notre envoyé spécial. Peut-on sur fond de recrudescence de terrorisme et difficultés du dialogue national convaincre les canadiens, touristes et investisseurs à venir en Tunisie ? L’exercice n’est pas facile, mais le Forum d’affaires Tunisie-Canada tenu jeudi dernier à Montréal s’y est essayé. A la faveur du vol promotionnel de Syphax Airlines, cette journée de rencontre qui a groupé plus de 150 participants des deux pays, s’est avérée utile. La présence de Ridah Saidi, ministre auprès du Chef du Gouvernement chargé des Affaires économiques, Anis Jaziri, conseiller économique à la Présidence, l’ambassadeur du Canada à Tunisie, Sébastien Beaulieu, Riadh Essid, ambassadeur de Tunisie à Ottawa et nombre d’opérateurs économiques et de journalistes invités par Mohamed Frikha, PDG de Syphax Airlines lui a conféré un intérêt particulier.
Depuis la révolution, aucun membre des gouvernements successifs n’a jusque-là fait le déplacement au Canada et aucune délégation de cette envergure n’y est allée à la rencontre d'officiels et d'opérateurs économiques de cette 12ème puissance économique mondiale. Pourtant les opportunités d’affaires et de coopération entre les deux pays ne manquent pas. Pour les Tunisiens, étudier, travailler et investir demeure, malgré certaines restrictions, encore possible dans des conditions favorables à tous ceux qui sont animés par un esprit d’entrepreneur. Chercher des partenaires canadiens ou monter avec eux des projets en Tunisie reste lui aussi possible. Toute la question est de savoir s’y prendre.
Etudiants, ils sont plus de 2000, indique à Leaders, Lotfi Hassine, directeur de la Mission universitaire à Montréal. Différentes facilités peuvent être accordées : exemption partielle des frais d’inscription (qui peuvent descendre de 9000 à 2000 $), bourses d’étude nationales et canadiennes, de stage, de recherche, etc. Pour le moment, 260 étudiants seulement en bénéficient et ce nombre doit s’accroître à travers la coopération tunisienne, notre pays doit s’y mettre intensivement avec les autorités et universités canadiennes.
Travailleurs, le Canada continue à recruter et ses besoins se concentrent surtout sur des qualifications professionnelles qui peuvent surprendre : soudeurs, bouchers, travailleurs dans le bâtiment et travaux publics, psychologues et autres. Rien que pour la province de l’Alberta, capitale du pétrole, 65 soudeurs tunisiens ont pu trouver des contrats intéressants pour les pipelines. Les conditions climatiques y sont rudes en hiver, mais un bons soudeur qui multiplie les heures supplémentaires et sacrifie une partie de son weekend peut aller jusqu’à 40 000 $ par mois. Actuellement, près de 500 Tunisiens sont établis dans cette province et viennent de se constituer en association tunisienne, signale à Leaders, l’Ambassadeur Riadh Essid qui vient de leur rendre visite.
Investisseurs, la procédure la plus avantageuse risque de se fermer très bientôt. Le programme Immigrant Investisseur lancé par le gouvernement canadien repose sur une démarche accélérée. Il s’agit de justifier d’un patrimoine de 1.6 million de dollars et de déposer une somme de 800 000 dans un compte bloqué sur une période de 5 ans, pour obtenir rapidement, si le dossier est accepté, une carte de résident permanent qui donne droit au séjour et au travail. Au bout de 3 ans, la citoyenneté (nationalité) sera accordée. Ce programme vient d’être fermé, mais une fenêtre a été laissée ouverte aux francophones, jusqu’à fin mars 2014.
Quitter le Québec et aller vers les provinces éloignées
Mais, il y a aussi d’autres opportunités tant pour les études que pour l’émigration et le partenariat. La principale recommandation des Canadiens, amis de la Tunisie est de persévérer, mais aussi de quitter le Québec et particulièrement Montréal pour aller explorer les provinces les plus lointaines où les opportunités sont encore plus grandes. Certes, rien n'est facile, on est loin de l'eldorado, mais tout est possible au prix d'une grande détermination, du courage et du labeur.
La ligne aérienne directe que Syphax s’emploie à ouvrir au cours du premier semestre 2014 sera très utile tant pour les passagers que pour le fret aérien. Cette initiative que peut paraître à haut risque doit s’inscrire en projet national qui mérite le soutien de tous.
Taoufik Habaieb