Le CPR: une victoire à la Pyrrhus
Une fois de plus, le CPR (avec ses satellites, Wafa, Courant républicain, etc.) a justifié sa réputation de mauvais génie du mouvement Ennahdha. Très tôt, ce parti composé d’anciens gauchistes repentis et de cryptoislamistes, s’est enfermé dans un manichéisme élémentaire en assimilant ses adversaires à des suppôts de la contre-révolution, et en se présentant comme le héraut et la conscience d’une révolution à laquelle il n’avait pas contribué, ou si peu. Depuis son entrée dans la coalition gouvernementale, il a été à l’origine de tous les mauvais choix de son puissant partenaire : l’ostracisme dont a fait l'objet, pendant des mois, Nidaa Tounès, la diabolisation de son fondateur, le mépris de l’opposition qualifiée souvent de 0,0%, par allusion à son score aux élections d’octobre 2011, la loi sur l’immunisation de la révolution, le soutien aux mal-nommées ligues de protection de la révolution et tout récemment le rejet de la candidature de Abdelkerim Zebidi au poste de chef de gouvernement, torpillant ainsi le dialogue national. Car même dans cette affaire, il n’a pas été de bon conseil et il a suffi que le nom de l’ancien ministre de la Défense soit prononcé pour que les dirigeants de ce parti se répandent en calomnies à propos de Zebidi sur les réseaux sociaux et les antennes des radios, reprenant notamment la vieille antienne de l’affaire Baghdadi. Zebidi a bien saisi le message. Moncef Marzouki ne veut pas de lui. Sa riposte coule de source : il se retire.
En faisant sans cesse dans la surenchère, le CPR n’a pas seulement saboté l’initiative de l’UGTT, à laquelle il n’avait pas d’ailleurs adhéré, il a désespéré des millions de Tunisiens qui voyaient leur espoir d’un gouvernement de technocrates et indépendant des partis s’évanouir et fourni des arguments à Ennahdha pour se dérober à ses engagements. Les dirigeants du CPR doivent aujourd’hui se frotter les mains d’avoir réussi dans leur entreprise. Mais à quel prix ? Sans doute celui d’avoir replacé le pays dans l’œil du cyclone, alors qu’on commençait à s’en éloigner, et d’avoir donné un mauvais signe aux investisseurs tunisiens et étrangers. Une victoire, certes pour le CPR, mais à la Pyrrhus.
H.B.