Trois nouvelles facs de médecine pour quoi faire?
On nous annonce la création de trois facultés de médecine. Cette décision peut ne pas vous choquer et pourtant elle sonne bel et bien le glas de la médecine en Tunisie.
Décision populiste, stérile prise dans un «conseil ministériel restreint». De quel droit se permet-on de prendre sans concertations, dans le secret des cabinets, ministériels des décisions aussi cruciales ? Est-ce pour miner le terrain avant un éventuel départ pour que le prochain gouvernement se trouve acculé, obligé d'assumer les engagements suicidaires du gouvernement sortant ? Est-ce la politique de la terre brûlée ?
Sachez qu'il y a actuellement des centaines sinon des milliers de médecins que le système ne peut absorber faute de moyens ! Ils deviennent chômeurs, délégués médicaux, se lancent dans la pratique libérale ou quittent carrément le pays pour d'autres cieux plus accueillants. Créer de nouvelles facultés, pour quoi faire ? Afin d'augmenter le nombre des diplômés chômeurs ?
Par ailleurs, comptez-vous donc créer de nouveaux Centres Hospitaliers Universitaires ? Parce que cela ne servirait à rien de créer des facultés de médecine s'il n'y a pas de CHU à côté. Dans ce cas-là, avec quel budget comptez-vous financer ce projet ? Quand on sait la crise sans précédent que traverse le pays et l'état de délabrement dans lequel se trouvent les anciens CHU qui sont juste à quelques centaines de mètres du siège du ministère de la santé publique (La Rabta et Charles Nicole par exemple), on a toutes les raisons de douter de la pertinence de ces décisions.
Le problème de la santé en Tunisie, c'est l'absence de couverture médicale décente dans les régions.
La solution, c'est une réforme radicale de la santé publique et non pas des solutions démagogiques et complètement stériles comme celles que l'on prend hâtivement et sans concertation.
Ils veulent nous faire croire que les médecins refusent de se rendre dans les régions alors que la vérité est qu'on refuse de recruter des médecins dans les régions et pour y pallier, ils veulent, en plus de créer de nouvelles facs, obliger les jeunes médecins spécialistes à travailler deux ans dans les régions, livrés à eux-mêmes, sans seniors, sans matériel, sans moyens, sans décisions collégiales.
La santé publique a plus que jamais besoin d'une révolution. Aux médecins de serrer le poing, pour une fois et de lutter pour que le tunisien ait une couverture médicale respectable, loin des calculs de basse politique.
Blog Boukornine