Arrêtons de croire au père Noël
Justice, Liberté et Dignité ont un prix: on a cru pendant deux ans qu’il suffisait d’une démocratie puis pendant un an qu’il fallait de la sécurité et du développement mais le vrai prix à payer est plus élevé et nécessite davantage d’effort de la part de chacun de nous:
- un travail plus productif de chacun avant de mériter une augmentation de salaire,
- une grande citoyenneté plus contributive et une plus grande rigueur fiscale.
Qu’est-ce qui nous ferait croire que les prochaines élections amèneraient au pouvoir des gouvernants plus compétents que les précédents, ayant une vision claire de ce qu’il faut faire, une capacité à le financer proprement, à le réaliser efficacement et à obtenir des résultats satisfaisants pour l’opinion publique dans des délais supportables et si possible avant la fin de leur mandat ?
Nos partis politiques ont certes évolué et mûri d’une certaine façon depuis 3 ans mais le chemin qui reste à parcourir est long et les leaders d’hier sont les négociateurs d’aujourd’hui et seront fort probablement encore les leaders de demain, malgré un renouvellement partiel des militants… Chassez le naturel il reviendra au galop !
Afin de sortir de l’impasse actuelle, nous sommes pressés d’organiser les prochaines élections et nous n’avons rien préparé encore pour que les prochaines élections n’amènent pas au pouvoir de nouvelles incompétences pour 5 ans ! Quels programmes nos partis politiques assoiffés de pouvoir ont-ils concocté pour la Tunisie de 2020 ou 2030?
Contrairement à 2011, il nous faudra en 2014 bien plus que des listes interminables de rêves inaccessibles et des vœux en théorie louables et en pratique irréalisables faute de sincérité ou de ressources (compétences, financements…).
L’un des plus grands avantages de la nomination de Mehdi Jomaa à la tête d’un gouvernement de compétences en 2014 est la chance qu’il offre à nos partis politiques de se préparer plus sereinement à la prochaine campagne électorale et d’aborder plus sérieusement le prochain dialogue électoral avec des arguments rationnels convaincants au-delà des arguments émotionnels.
Il ne s’agit plus cette fois-ci d’acheter le soutien de l’Orient en lui promettant une instauration de la Chariaa (objectivement mal reçue dans l’opinion publique) ni d’acheter le soutien de l’Occident en lui promettant une Démocratie (objectivement encore immature dans la classe politique comme dans l’opinion publique malgré le chemin parcouru depuis la révolution).
Plus qu’en 2011, les élections de 2014 devront convaincre les citoyens de la sincérité des valeurs, de la compétence des candidats, de la solidité des partis, de la cohérence des programmes et de la facilité de leur mise en œuvre. A quoi bon que des partis dégourdis se retrouvent en 2015 pour 5 ans dans une nouvelle coalition gouvernementale pour se faire sortir par la petite porte en 2016 faute de résultats!
Les artisans du dialogue national auront encore plus de mérite à intégrer dans la feuille de route du nouveau gouvernement de Mehdi Jomaa les ingrédients du redressement durable de la Tunisie. Il ne s’agit pas de leur compliquer la tâche mais de prévoir de quoi rattraper une partie du temps perdu dans le passé et de préparer les réformes indispensables mais impopulaires que les prochains gouvernements élus n’auront pas toute la compétence et/ou le courage politique d’engager.
Selon les basiques de la planification, si des réformes structurantes de la nouvelle Tunisie ne sont pas étudiées et financées par anticipation pour les plus urgentes ou inscrites au budget de 2015 par le prochain gouvernement de compétences indépendantes et le cas échéant engagées selon une démarche de mise en œuvre rapide, ce n’est qu’au budget de 2016 et/ou 2017 au plus tôt que ces chantiers pourront être étudiés et/ou financés pour être réalisés en 2018 et/ou 2019 pour des bénéfices palpables après 2020 en supposant que l’opinion publique peut patienter jusqu’en 2020!
Le gouvernement de Compétences Indépendantes de Mehdi Jomaa peut faire gagner à la Tunisie 2 à 3 ans sur les chantiers structurants les plus prioritaires et ce serait tout en l’honneur des artisans du dialogue national d’inclure cette priorité dans la feuille de route à adopter.
Pour une Tunisie qui se redresse rapidement et durablement.
Mounir Beltaifa