Khemaies Chammari, de retour à Tunis: "Je suis scandalisé par la publication du Livre Noir"
Dégagé de l'obligation de réserve, Khemaies Chammari qui était depuis février 2012 ambassadeur Représentant permanent de Tunisie auprès de l’Unesco a livré vendredi 31 janvier un témoignage sur son parcours «d’homme de gauche et de démocrate respectueux des institutions de l’Etat à l’émission. Invité d’Anouar Moalla dans son émission «Cartes sur table» sur Radio Tunis Chaîne internationale, il a captivé les auditeurs. Moalla, fin connaisseur de l'époque et bon interviewer, a su le relancer sans cesse.
En dépit de ses 71 printemps et quelques «problèmes de santé», celui qui fut également vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), vice-président de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), député et détenu, a levé le voile sur nombre de zones qui mérite éclairage. C’est ainsi qu’il a évoqué le collectif du 18 octobre 2005 pour les droits et les libertés, l’action perspectiviste des années 60, la justice transitionnelle et, en particulier, l’un de ses compagnons en l’occurrence, Mohamed Moncef Marzouki.
Les chemins des deux hommes se sont croisés dans les années 90 alors que 3M s’activait à la section de la LTDH de Sousse. Au Congrès de la Ligue en 1994, le «clash frontal était inévitable» entre eux suite à des divergences tactiques». Plus tard, ils se rencontrent à Paris et le contact se renoue «difficilement». «Il m’en a gardé grief» se rappelle avec verve Chammari qui semble se racheter en aidant - par le biais de SOS Racisme- à la publication de l’ouvrage de Marzouki : «Arabes si vous saviez».
"Il n'est pas ivrogne"
Quel jugement porte Chammari sur l’actuel président de la République ? D’abord, en tant qu’expert versé dans les questions de mémoire et d’archives (missions au Maroc et en Afrique du sud -post Hassan II et apartheid) , Chammari est « scandalisé» par la «mesquinerie» de la publication du «Livre noir». S’ensuivent trois reproches. Etant président de tous les Tunisiens, Marzouki se devait de quitter la présidence d’honneur de son parti, le CPR qualifié de populiste et islamisant. Il ne l'a pas fait fait. Il a donné dans la «spontanéité et la fougue, car quand on est à la tête de l’Etat, il faut savoir tempérer le discours. Il a fait preuve après les élections du 23 Octobre de complaisance envers le parti Ennahdha dans ses accointances avec les éléments salafistes.
Dans la foulée, Chammari a démenti deux rumeurs. La première, ce n’est pas le président Marzouki, mais l’éphémère ministre des Affaires étrangères, Abdessalem Bouchlaka qui tenait à son rappel de son poste à Paris (ndlr : Chamari a reçu ses lettres de créance des mains du président par intérim, Foued Mebazza). La seconde contre «les quolibets qui visent le chef de l’exécutif. Non, il n’est pas ivrogne», s’indigne-t-il.
Enfin, Chammari, affirmant qu’il n‘est candidat désormais à aucun poste politique, appelle les jeunes à s’impliquer dans la société civile tant il vrai dit –il que l’adoption de la constitution de la 2ème République aura permis au pays de sortir de « la période de la sinistrose » et ouvert une passerelle pour un optimisme à l’esprit «séculariste et moderne» .
Habib O’Farkhri