«Coupe- gorge» rue de palestine?
Jeudi 30 janvier 2014, en début de soirée, je me suis engagé, sans équipement particulier, à remonter pédestrement la rue de Palestine. On commet des imprudences à tout âge, n’est-ce pas? J’ai été heureux d’atteindre la place Pasteur sans une égratignure… mais les chaussures recouvertes de boue. Heureux ! Car que de chutes et d’embûches évitées, que de chiens, que de trous béants et de flaques d’eau rencontrés lors de ce périlleux safari!
La rue de Palestine- bien qu’habitée assurément par de braves gens et bien qu’abritant ambassades, hôtels et restaurants chics- m’a paru comme un vrai «coupe gorge». Avec ses trottoirs tantôt transformés en fosses béantes par d’improbables travaux et tantôt manquant tout bonnement à l’appel - marcher sur le macadam dans cette rue confine au suicide. Ses tas de gravats, ses voitures garées en dépit du bon sens, ses amas de branchages, de débris végétaux et de plastiques m’ont contraint à un slalom digne des Jeux d’Hiver de Sotchi. Tel un Robinson naufragé, j’ai été heureux d’apercevoir enfin au bout de ce tunnel les lumières de la place Pasteur. Heureux d’avoir échappé à cet enfer et à ses traîtrises…cette géhenne noire comme un four par endroit ou chichement éclairé par des lampadaires à la sinistre lumière blafarde …
La rue de Palestine n’est hélas assurément pas la seule voie de notre capitale à présenter de tels handicaps et autant de chausse- trappes aux piétons et aux autres usagers…
A l’heure où s’installe notre nouveau gouvernement et à l’heure où certains dissertent sans fin sur la Loi Fondamentale, il faut savoir quitter l’empyrée, atterrir et retourner sur le plancher des vaches ….pour s’occuper des problèmes terre-à-terre qui empoisonnent la vie des gens: circulation, poubelles, cadre de vie, éclairage public, réseaux d’eau usée….Ce n’est pas très glorieux, d’accord, mais c’est tellement nécessaire pour remettre le pays sur ses pieds et lui donner envie de retrousser ses manches. Il est utile, à cet égard, de rappeler à nos fringants ministres ce mot d’un des rédacteurs de la Constitution, l’abbé révolutionnaire Emmanuel Sieyès (1748-1836) qui disait : «Une communauté démocratique a besoin de réverbères et de places publiques.»
Car, à milieu dégradée, société dégradée.
Il faut arrêter la déchéance du cadre de vie du Tunisien. Il faut accélérer la mise en place de municipalités élues…pour que le Tunisien jouisse enfin de «réverbères» et de « places publiques» dignes de sa Révolution! Sinon, les rues de Tunis font finir par devenir les pistes du Paris-Dakar!
Mohamed Larbi Bouguerra