Célébration de la Constitution: où est donc le monde arabe
Encore une fois, la diplomatie de Moncef Marzouki montre ses limites. Adnane Mnasar, directeur de Cabinet et porte parole de la présidence nous disait hier qu’à peu près 50 délégations avaient confirmé leur participation à la cérémonie de célébration de la Constitution. Notez la précision !!! Mais aujourd’hui que voyons-nous.
Si le Maghreb et le pourtour méditerranéen ont fait le plein à un niveau convenable, puisque tous les pays du fameux 5+5 ont été représentés soit par le chef de l’Etat soit par un représentant spécial, le prince Moulay Rachid frère du Roi Mohamed VI dont on sait qu’il se déplace peu, le prince héritier l’Infante Felipe d’Espagne, l’ancien président portugais ou le premier ministre algérien qui a représenté le président Bouteflika, le monde arabe a brillé par sa quasi-absence. Le Président Michel Sleymane du Liban a été le seul chef d’Etat du Moyen Orient à prendre la peine de répondre à l’invitation de la Tunisie. Certainement, compte tenu des relations très étroites liant les deux pays. Les autres, si on exclut le Koweït et la Jordanie, et à un degré moins élevé Bahreïn, ont carrément boycotté la cérémonie. Je ne sais pas si l’Egypte a été invitée, mais les Emirats voulaient certainement manifester leur courroux envers le président provisoire pour ce qu’ils considèrent comme une ingérence dans les affaires égyptiennes. M.Mansar a tenu à préciser que l’Arabie Saoudite a bien reçu une invitation mais qu’elle a fait dire que faute de temps, elle ne serait pas représentée. L’argument est court. Il n’est pas convaincant. Faut-il en conclure que le monde arabe a peur de l’exemple de la Tunisie.
L’Afrique qui tire son nom de celui par lequel Romains et Arabes désignaient notre pays a été le continent qui a dépêché le plus de chefs d’Etat à la cérémonie. Notez cependant qu’ils sont de l’Ouest africain francophone et pour la plupart ont réussi ou sont en train de réussir leur transition démocratique. L’Afrique du Sud où notre président s’est empressé de se rendre à l’occasion des funérailles de Mandela n’a pas daigné envoyer un représentant. Contacté à Addis Abeba à l'occasion du Sommet africain, son président a tout simplement décliné l'invitation.
Si l’Asie a été quasiment absente, pourtant des rapports très étroits nous lient à plusieurs pays de ce continent, les Amériques n’étaient pas présentes, non plus. Mais la déception est venue certainement des Etats Unis qui ont délégué un sous secrétaire d’Etat, l’équivalent d’un directeur général au Ministère des affaires étrangères. Si le déplacement de Barack Obama n’était pas facilement envisageable pas plus que celui de son Secrétaire d’Etat John Kerry, pourquoi le chef de l’administration américaine ne s’est-il fait représenter par un ancien président. Cela aurait donné une autre prestance à la cérémonie. Il y a au moins deux anciens présidents démocrates, Carter et Clinton. L’ancienne secrétaire d’Etat Hillary Clinton aurait pu faire l’affaire aussi.
La grande déception vient néanmoins du système des Nations unies. Le Secrétaire général de l’ONU Ban Ke Moon dont on a annoncé la visite pour bénir la Constitution tunisienne a fait faux bond ainsi d’ailleurs que les chefs des autres organisations internationales comme l’UNESCO, la FAO etc. Leur présence aurait montré le soutien de la communauté internationale à notre pays dans cette phase cruciale de son histoire.
L’Europe, par contre n’a pas déçu les Tunisiens et c’est peut-être le message le plus important de cette cérémonie. François Hollande n’a pas tari d’éloges sur la Tunisie, «l’exemple» et «la référence» et a proclamé une fois de plus que la France sera aux côtés de notre pays en martelant que la Constitution tunisienne montre qu’Islam et Démocratie peuvent être «compatibles». Il s’est félicité du déplacement à Tunis du président du Conseil Européen Hermann Van Rompuy qui manifeste ainsi l’appui sans faille de l’Union Européenne à la transition démocratique tunisienne.
Cette cérémonie terne et sans relief rend encore plus actuelle une reprise en main de la diplomatie tunisienne. Car, au fond, cette présence, pas du tout convaincante est le reflet du peu d’estime dans lequel on tient notre diplomatie.
RBR
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