Ben Jaafar : A nous deux, Carthage !
Serait-il candidat à la prochaine présidentielle? Mustapha Ben Jaafar feint la surprise. «Je ne m’attendais pas à une telle question», répond-il dans une interview à Leaders, sur un air faussement ingénu. On a compris. Il y pense sérieusement. Et s’y prépare, malgré les sondages qui le créditent de 2% d’intentions de vote. Mais, n’ayant pas discuté de la question au sein des instances de son parti, il ne veut pas s’avancer sur ce terrain. Même si la chose va de soi pour les militants de son parti. En tout cas, s’il saute le pas, il s’engage à démissionner de la présidence de l’ANC. «Cela est évident», commente-t-il.
Après les élections, Mustapha Ben Jaafar tient «mordicus» (un terme qu’il affectionne apparemment et qu’il répètera à plusieurs reprises au cours de notre entretien) à son idée de «gouvernement d’intérêt national »qu’il n’a pu imposer en 2011, mais qui devra être mise au goût du jour, préférant parler pour la prochaine étape de «gouvernement de cohésion nationale». Pour les dix années à venir, les défis de la lutte contre le chômage et pour corriger les disparités entre les régions sont tels selon lui, «qu’il nous faut mettre en place une stratégie à long terme à laquelle doivent être associées toutes les forces politiques et de la société civile. Les tiraillements partisans ne devraient pas être de mise».
Est-il pour la concomitance des élections présidentielles et législatives ? «La question n’est pas encore tranchée. Il ne s’agit pas de faire plaisir aux uns ou aux autres, mais de privilégier l’intérêt général. Il est vrai qu’organiser ces deux votes le même jour est plus économique en termes de coûts. Mais si on est obligés d’aller au-delà de fin 2014, on peut envisager une séparation des scrutin».
La loi d'exclusion: il faut activer la justice transitionnelle
On le dit favorable à la loi d'exclusion. Sa réponse est plus nuancée :«Je reste sur deux principes. Le premier, c’est qu’on n’a pas fait une révolution pour rien et ne pas apporter de réponses aux aspirations profondes du peuple. Le second, c’est que le décret-loi 2011-35 de mai 2011 relatif à l’élection de l’ANC avait spécifié en son article 15, au titre de l’éligibilité, les catégories de personnes frappées d’exclusion et a fonctionné dans ce sens. Il faudrait garder cette approche, mais nous avons à présent un outil entre les mains : la justice transitionnelle. Il va falloir l’activer et accélérer sa mise en œuvre.»
Quel mode de scrutin préfère-t-il. «Le scrutin de listes a fait ses preuves. Mais il faut l’améliorer, surtout pour la présidentielle, en envisageant un système de parrainage des candidats».
Comment il assure le financement d’Ettakatol? «C’est une grande question. Comme d’habitude, depuis la fondation de notre mouvement, nous avons compté sur notre autofinancement, bénéficiant des contributions de nos militants. Plus on gagne en popularité, plus nos chances de recueillir plus de fonds privés sont grandes. Notre espoir est de voir le financement public des partis politiques clairement établi et ses modalités précisées. Cela mettra les partis à l’abri de toute présomption. D’ailleurs, une loi sur les partis est plus que nécessaire».