News - 05.04.2014

Comment Mehdi Jomaa a vécu sa rencontre avec Barack Obama

Washington DC – De notre envoyé spécial – A peine rentré de sa rencontre à la Maison Blanche avec Barack Obama, la première chose qu’a faite Mehdi Jomaa était de se changer pour enfiler sa tenue de jogging et partir courir. Histoire de décompresser un peu au terme d’une épuisante semaine passée au pas de course entre New York et Washington. Son escorte tunisienne était habituée à le voir courir au moins chaque soir, mais les agents du Secret Service américain n’avaient pas prévu son parcours et ont du s’y mettre.

« Tôt le matin, Mehdi Jomaa avait attaqué sa journée comme d’habitude, confie à Leaders l’un de ses proches. Consulter son courrier et y répondre, surfer sur le Net pour s’informer, passer des coups de fils en Tunisie pour s’enquérir de la situation, surtout avec les événements de Ben Guerdane, appeler des collaborateurs et leur donner des instructions : le tout attentivement et rapidement ». Puis un briefing avec les membres de la délégation qui l’accompagnent dans cette visite en présence de l’ambassadeur, Mhammed Ezzine Chlaifa. Ce vendredi 4 avril, dernier jour de sa visite, est une journée bien chargée : la rencontre avec Obama en constituera le point d’orgue. Chacun l’attendait, l’appréhendait, s’y était bien préparé et y avait porté beaucoup d’espoir. 

Quand le Trésor marche, tout marche 

Mais, pour Mehdi Jomaa, ca sera encore une journée intensive, certes marquante, mais dotée du même objectif : réussir à mobiliser le maximum de soutien en faveur de la Tunisie en en transition.  Après sa tournée en Algérie, au Maroc et dans les pays du Golfe, Washington est une étape importante. Premier rendez-vous, avec Jacob Lew, Secretary of The Treasury, le saint des saints qui détient les clefs des caisses américaines. Hakim Ben Hammouda, ministre de l’Économie et des Finances et Chedly Ayari, gouverneur de la Banque Centrale, sont de la partie. 
 
Rien ne filtrera de ses longs conciliabules, mais le sourire sur les visages, à la sortie, donne espoir.  On le saura plus tard avec l'annonce de la garantie d'un prêt de 500 millions de dollars. Quand le Trésor marche, tout marche.

Un dispositif huilé et des surprises 

Jomaa retrouve les autres membres de sa délégation et potasse avec eux en dernière lecture la déclaration préliminaire qu’il fera en présence d’Obama avant d’entamer leurs entretiens. Relisant aussi le communiqué commun peaufiné par les deux parties, il s’assure que l’essentiel est là. Cap alors sur la Maison Blanche où il devait arriver avant 14H10 précises. Les membres de la délégation ainsi que la presse tunisienne l’y avaient précédé, chaque catégorie prise en charge séparément par le protocole du White House. La presse est conduite à l’aile gauche, au Centre de Presse où sont basés les journalistes accrédités. Un jeune attaché de presse du State Department expliquera aux journalistes tunisiens le déroulement de la rencontre et les impératifs à respecter : téléphones mobiles sous silence, entrée par groupes, les camaéramens, les photographes et les « auteurs », pas de question à poser, ne pas passer derrière le bureau du président et marcher attentivement pour ne pas endommager le parquet du Bureau Ovale.
 
Mehdi Jomaa arrive à l’heure, dans un cortège impressionnant. « Trois voitures de sécurité, au lieu de deux habituellement pour les chefs d’Etat, relève pour Leaders un connaisseur des lieux, en plus des voitures officielles. Un grand signe d’intérêt.» Introduit dans le bureau ovale, il sera immédiatement reçu par Obama, mais, pour ce premier contact, la presse est tenue à l’écart, dans un corridor qui donne sur les magnifiques jardins de la Maison Blanche, Les portes s’ouvrent et les journalistes s’y engouffrent immédiatement. Les Tunisiens étaient surpris de se trouver immédiatement face aux deux présidents. L’ambiance est bon enfant, cordiale. Dès les premières secondes, on sent qu’Obama veut faire plaisir à son hôte et marquer tout son appui à la Tunisie.
 
Surprise, surprise, un peu à l’écart, de l’autre côté du bureau Ovale, on reconnaît Joe Biden, le Vice-Président. Sa présence est exceptionnelle. L’ambassadeur américain à Tunis, Jack Wallace, cache à peine un sourire radieux, partagé par William Burns, Sous-Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères. Tout s’annonce, merveilleusement, bien préparé. 

Un Obama séduit et séducteur 

Obama attaque le premier, accueillant, chaleureux, heureux de la réussite jusque-là du parcours tunisien, encourageant, prometteur, déterminé à soutenir. En réponse, Jomaa lui rendra hommage, rappellera la longue histoire des relations bilatérale, la Tunisie avait été la première à reconnaître les Etats-Unis et les Etats-Unis seront les premiers à reconnaître l’indépendance de la Tunisie. Puis, il abordera le vif du sujet, ce qui a été accompli, ce qui reste à faire et comment le consolider. Il s’exprimera tour-à-tour en anglais et en français, s’apercevant qu’un interprète en arabe n’avait pas été prévu. Obama hoche de la tête, en approbation, ouvrant largement ses bras puis se lèvera pour remercier son hôte et lui serrer la main. C’est le signal de départ pour les journalistes qui doivent quitter le Bureau Ovale. Sans perdre une minute, ils doivent rapporter ces moments exceptionnels à leurs médias. 
 
Seul le photographe de Leaders, Mohamed Hammi, envoyé spécial à Wasshington, était autorisé, après des démarches de longue date, à rester en face du Bureau Ovale, attende la sortie des deux présidents. Surprise, Obama devait recevoir en présence de Jomaa 10 étudiants tunisiens qui passent une année d’étude aux Etats-Unis. Il sera très heureux de les rencontrer et de discuter avec chacun des 5 garçons et des 5 jeunes-filles, se montrant séduit par l'intelligence de la jeunesse tunisienne et sa verve. Séducteur, aussi. Encore des moments exceptionnels.
 
Un Américain s'approche alors de Hammi et lui glissera à l'oreille: "Vous avez une chance exceptionnelle, la Tunisie?" A la fois enchanté et surpris, Hammi lui demandera; "La quelle?". Réponse: "Toutes, mais sachez la saisir!"
 
T.H.