Hommage à ... - 19.04.2014

Mohamed Salah Jedidi: Un buteur d'instinct

La nouvelle est tombée à la grande surprise de tous ses amis. Victime d’une fracture du fémur, il n’a pu surmonter cette dure épreuve. Mohamed Salah Jedidi nous a quittés lundi 17 mars à l’aube à l’âge de soixante-seize ans, après avoir réalisé un parcours sportif, professionnel et familial digne d’éloges

Outre ses dix ans passés au Club Africain avec un bilan collectif et personnel éloquent, il a également marqué de son empreinte les cinq ans en sélection qui l’ont vu devenir le principal attaquant du Onze national.

Il a été pendant quatre ans un des attaquants incontournables de l’Equipe de Tunisie, celui qui alliait la technique à la puissance et dont la capacité d’adaptation aux différentes situations offensives apportait à l’équipe une valeur ajoutée indiscutable. Mohamed Salah Jedidi a laissé l’image d’un baroudeur et d’un chasseur de buts. Il a été également un très bon remiseur qui s’est bonifié avec l’expérience et  a su se maintenir au sein du grand Club Africain, malgré la menace de la concurrence et la montée des jeunes.

Né le 17 mars 1938 à Ghardimaou, Mohamed Salah Jedidi a profité des espaces  naturels pour faire du football plus qu’une occupation ludique, une passion. Ses débuts officiels coïncident avec son changement de résidence. En effet, en 1956, il s’installe à l’Ariana en vue de s’inscrire au collège de formation professionnelle et signe à l’ASA pour explorer l’univers de la compétition. Il manifeste un talent évident et des qualités de buteur qui lui attirent les convoitises du Club Africain. La mutation s’effectue sans difficulté pour le grand bonheur  du jeune joueur qui a un penchant pour ce club. Au parc A, il découvre un entraîneur compétent et attachant, Fabio Roccheggiani, et des joueurs chevronnés: Kébaili,  Gallard, Zlassi, Touati, Ayachi, etc. Pour Jedidi, seuls le travail et le sérieux peuvent le rapprocher de ces références sportives. Son parcours est un modèle d’abnégation et de persévérance. A la sélection, il commence par la CAN 1962 qui le familiarise avec la compétition internationale. L’année 1963 lui offre quatre tournois officiels à Beyrouth ( Coupe des pays arabes remportée par la Tunisie) puis les Jeux africains de Dakar (finaliste), ensuite les JM de Naples et la CAN 1963 en Ethiopie. Mais c’est la CAN 1965 à Tunis qui le balance entre le rêve et la désillusion avec cette finale perdue dans des conditions équivoques.

Au Club Africain, le bilan est très éloquent: le titre en 1964, le doublé en 1967 malgré le décès de Fabio, puis la  coupe en 1968. Depuis, il se sent dépositaire de l’esprit de cet entraîneur charismatique guettant toutefois la sortie qu’il croit mériter.  Il la décide pour la fin de la saison 1968-69 après avoir eu quelques éclats: trois buts en demi-finale de la Coupe face au Stade Tunisien au point de désorienter M’ghirbi qui quitte le terrain de manière très spectaculaire. Meilleur buteur avec 17 buts et vainqueur de la Coupe de Tunisie face à l’Espérance lors de la première finale qui réunit les deux frères ennemis de la capitale,  Jedidi peut, à trente et un ans et en  toute légitimité, quitter la scène la tête haute. Le 4 juin 1969, il obtient une satisfaction symbolique avec cette dernière sélection qui lui a permis de côtoyer le grand Diwa en prévision de Maroc-Tunisie (Coupe du monde). Le public, lui, garde le souvenir d’un joueur talentueux et efficace, altruiste mais débrouillard quand il est en difficulté.

Dès 1969, il se met au service de Mégrine Sport en tant qu’entraîneur-joueur pour rendre la sortie plus douce et  réussir à donner un nouvel élan à cette équipe. Jedidi, joueur exemplaire, a vite compris que si on veut jouir de son mérite, il faut prêter du mérite aux autres. Reconverti en entraîneur, il a pu donner le meilleur de lui-même, soit à Mégrine où il avait élu domicile, soit à la tête de l’équipe nationale juniors ou autres fonctions à la DTN, soit au Club Africain qui avait eu recours à lui à maintes reprises pour résoudre des problèmes conjoncturels ou participer à la formation des jeunes qui l’a toujours motivé et passionné, comme l’indique également son apport au centre de formations de Borj Cédria.

Mais ce sont ses qualités humaines qui ont impressionné tous ceux qui l’ont connu ou côtoyé. Affable, courtois, humble, il ne ratait jamais l’occasion de mettre en avant son humanisme ou de communiquer sa passion pour le football qui avait à ses yeux les vertus de socialiser les jeunes et de favoriser leur épanouissement. Un serviteur du football s’en va, mais son souvenir ne périra jamais tant l’homme a su agir pour s’inscrire dans la postérité.

M.K.

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