News - 01.05.2014

L'euro à 2.2 dinars, est-il raisonnable ?

Mr E. Ben Hamida a publié par deux fois, des articles sur le dinar. J’avais publié en septembre 2013, à l’époque de la troïka, un article que j’avais intitulé la désescalade du dinar, jusqu’où ira-t-elle, où j’avais montré que notre monnaie subissait les caprices du politique sans aucun discernement et que la trajectoire qu’elle affichait était plutôt préjudiciable que vertueuse pour notre économie. Je n’avais recensé aucun commentaire, signe, à mes yeux, que la plupart de nos spécialistes de la monnaie souscrivaient à cette désescalade. Je voudrais  soutenir, cependant, les analyses de Mr B Hamida, notamment dans les effets de la dépréciation, malgré son silence du moment.

Pour ma part, je pense qu'un dinar évoluant à la baisse ne fait qu’attiser et entretenir le démon de la paresse du système productif, sa soif d'assistance et au gain facile,  plutôt qu’il ne suscite au labeur, au gain de productivité, les marges se trouvant garanties par une manne généreuse, celle de la subvention de change(notamment pour le tourisme et le textile qui en ont bénéficié amplement). Toutefois, pour le tourisme, cette dépréciation qui peut affecter les flux et les volumes en dinars qui enregistrent, à l’occasion, des croissances, elle atteint et affecte négativement la qualité. Une politique de tourisme bon marché rafle les fonds de marché et aboutit à un tourisme de clientèle médiocre. Nous nous enfonçons doucement mais sûrement dans le tourisme de masse à l’heure où l’on veut rompre avec le passé.Quant au textile, ce ne sont guère les prix qui font que notre secteur soit sinistré  mais plutôt la crise qui sévit dans les principaux pays partenaires de la Tunisie. Aucun effet de compétitivité-prix ne pourrait la dépasser encore moins la contourner. L’action s’avère stérile.

Quant à L’IDE, les spécialistes mettent l’accent sur le fait qu’il y a élan quand il y a stabilité de change plutôt qu’une politique portée vers la dépréciation qui finit par ronger le capital investi. A mesure que la volatilité est forte, continue et perdure à mesure que les flux d’IDE sont faibles. Sur le plan de la dette extérieure du pays, celle-ci, exprimée en dinars, s’alourdit. Elle se multiplie par le même facteur de la dépréciation, accentuant ainsi son poids au sein du budget de l’Etat et des entreprises endettées en devises.

Sur un autre plan, en renchérissant les importations, la dépréciation aggrave le poids et la charge de la compensation notamment des produits de base et énergétiques, terrains respectifs des plus démunis et du moteur de la croissance. Elle amplifie, ainsi, les déficits, commercial et courant, du fait que l’économie présente des déficits structurels que la dépréciation ne peut éradiquer, ne peut inverser. A ce niveau, le coût d’investissement en Tunisie est renchéri alors que les importations de produits de seconde nécessité ne peuvent souffrir du fait du commerce illégal en raison de la baisse d’emprise sur nos frontières.

Une dépréciation vaut par le potentiel existant ou latent de produits et services exportables. Elle agit en tant qu’incitateur pour susciter la demande extérieure. La période post-révolution porte la marque d’un arrêt profond de la production, d’une chute de la productivité et d’une marée houleuse de grèves et de revendications. Par ce paysage, on ne peut aller chercher du surplus exportable que pourrait augurer une désescalade du dinar. Un tendance baissière, si elle persiste, et c’est le cas du dinar, accentue les effets dus aux écarts de règlement : les exportations sont délibérément différées dans leur règlement et les importations accélérées dans leur paiement du fait de l ‘attente des opérateurs d’un gain encore plus important, plus facile et d’une réalisation certaine. Des pressions s’exercent, ainsi, sur les réserves de change qui contraignent les autorités à l’emprunt extérieur pour reconstituer le matelas en devises. Les autorités monétaires sont-elles conscientes de ce phénomène. Certainement. Il faudrait, par ailleurs, qu‘elles soient plus éveillées, plus alertes et plus conscientes au sujet de ceux qui disposent de comptes étrangers en devises qui entretiennent l’envie du gain facile et peuvent ainsi s’adonner à des transactions fictives de spéculation sur le dinar.

Quelques effets « positifs » sont, toutefois, relevés. Il s’agit de la tenue comptable des réserves en devises. Une dépréciation fait augmenter la contre valeur de ces avoirs en dinars et crée ainsi une plus-value de change,  qui pourrait accroitre davantage les bénéfices versés au trésor par la Banque Centrale. Le politique applaudit, alors, la mesure.Il en est de même du produit de la fiscalité assise sur les importations qui augmente (droits de douane, taxes à l’importation, etc), mais ne peut en aucun cas compenser les dégâts générés par la dépréciation sur le budget de l’ETAT. Des analyses à l’appui des statistiques sont évoquées dans mon article de septembre dernier, il est donc inutile de les reprendre dans le cadre de ce commentaire. Il serait opportun, en revanche, de les actualiser. Les constats seraient certainement identiques.

Abdelmajid Fredj

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Tags : tourisme   Tunisie  
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3 Commentaires
Les Commentaires
AMBO - 01-05-2014 16:25

Et si on lançait un emprunt en devises auprès de notre Diaspora ?

T.B. - 02-05-2014 03:54

Il est temps de penser à la convertibilité du dinar. Je pense que la convertibilité accélère la circulatuion de la monnaie, donne aux agents économiques de regler leurs afffaires directement, et le temps c´est de l´argent. Enfin je pense aussi qu´un dinar convertible est plus credible et ca donne de la confiance à qui veut faire des transactions avec cette monnaie.

Ben Hamida Ezzeddine - 02-05-2014 11:09

J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre contribution; je souhaite vous en remercier car vous êtes parmi les rares personnes qui soutiennent mon approche! Ceci dit, j'ai déjà écrit sur cette problématique dans ma thèse de doctorat, soutenue fin des années 90. J'avais en effet souligné longuement le désastre des choix des autorités monétaires tunisiennes. Ceci mon émail où vous pouvez me contacter : bhe@sfr.fr

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