Ses amis tunisiens, lecteurs fidèles d’Afrique-Action (Jeune-Afrique), puis du Nouvel Observateur, en sont fort affligés. Josette Alia vient de s’éteindre à Paris, à l’âge de 84, suite à une longue maladie. Suivant son mari, Dr Ben Brahem, médecin tunisien de retour dans son pays natal, à la veille de l’indépendance, elle sera dans la ferveur de cette époque historique au cœur du journalisme militant. On la retrouve à Radio-Tunis, mais aussi participant au lancement de la revue féminine Faiza, rejoignant Béchir Ben Yahmed et son équipe d’Afrique Action, se joignant aux envoyés spéciaux de la presse française et internationale couvrant la guerre de Bizerte et les activités du FLN à Tunis. Un article sur la répression des étudiants lui attirera l’ire des autorités et c’est Jean Daniel qui l’en sortira pour l’accueillir au Nouvel Observateur à Paris. Et ce fut le début d’une grande saga journalistique.
Dans un hommage qu’il vient de lui rendre le magazine, Laurent Joffrin dépeint avec affection cette «amazone de la plume». Un
texte émouvant à lire.
L’Express lui avait déjà consacré une biographie qui retrace avec précision un parcours exceptionnel.
BIOGRAPHIE
De son vrai nom, Josette David, est née en novembre 1929 à la Ferté-Bernard, dans la Sarthe. Après son mariage avec Raouf Benbraham, en 1952, la nationalité de son mari, tunisien, elle quitter son poste aux affaires sarroises du ministère des affaires étrangères) pour le suivre dans son pays. En 56, elle suit des études d'archéologies latines à l'Université de Tunis puis, lassée par l'histoire médiévale et abandonnant l'archéologie, elle se lance dans le journalisme. Elle anime une cinquantaine d'émissions féminines sur Radio Tunis. Puis, par le biais de son mari, un intime du fils du président et frère de l'avocat du Néo-Destour, elle est amenée à fréquenter les proches de Bourguiba au point de se lier avec sa femme. Elle tire de ses relations un soutien financier pour lancer, avec son amie Safia Farhat, le 1er journal féminin tunisien, 'Faïza', à la fois francophone et arabe. En 60, elle entame sa collaboration à Afrique-Action, y effectuant ses premiers reportages. Couvrant l'Afrique du Nord, elle intègre ainsi le 'Maghreb Circus', ce groupe de journalistes occidentaux qui couvre cette région pour leurs journaux respectifs et qui sont proches de la gauche anticolonialiste et du FLN. Parallèlement, dès 65, elle collabore épisodiquement au 'Nouvel Observateur' à travers une interview de Haouri Boumediene, quelques articles sur l'affaire Ben Barka.. Mais en décembre 66, un papier sur la répression policière à l'Université lui vaut d'être assignée à résidence et menacée de deux ans de travaux forcés pour atteinte à la sûreté de l'Etat.
L'intercession de Jean Daniel auprès de Bouguiba lui permet alors de quitter le pays. Abandonnant biens et mari en Tunisie, Jean Daniel l'accueille volontiers à la rédaction du 'Nouvel Observateur' sous le pseudo. d'Alia. Elle s'impose comme le grand reporter du journal sur les questions du Proche-Orient. Mais à l'aube des années 70, elle se tourne de plus en plus vers des questions de société comme l'inégalité salariale entre les sexes. Elle continue toutefois à traiter du Moyen-Orient, interviewant des personnalités comme Sadate (1975), Rabin (1976, 1977), Boutros Ghali (1977) ou Bourguiba (1980). Incontestablement la journaliste la plus polyvalente du journal et la plus appréciée de Jean Daniel, elle est, en novembre 78, promue rédactrice en chef-adjoint, sans pour le moins exercer de véritables fonctions de direction. Il s'agit plutôt d'une reconnaissance symbolique d'un talent qui continue à s'exercer dans ses reportages à l'étranger (notamment au Liban) ou dans son traitement de certaines questions de société telles que l'avortement. Elle obtint le prix de la Meilleure Journaliste en 1980.