Servir la cause palestinienne aujourd'hui
Il est des comportements qui se veulent avisés et qui emportent intrinsèquement une dose certaine d'inconséquence, notamment dans une prétention à l'éthique quand celle-ci est dans le même temps bafouée. car la véritable morale est dans la sagesse qui est justesse.
Ainsi le comportement se rapportant à la cause palestinienne est-il une illustration éloquente d'une attitude écervelée, injuste et immorale combien même elle se pare d'atours trompeurs. Et se pose crûment la question : comment servir vraiment la cause de Palestine aujourd'hui en un temps de confusion totale des valeurs?
Deux jumeaux monozygotes
Ceux qui s'agitent à l'Assemblée nationale, croyant parler au nom du peuple, aussi bien tunisien que palestinien, ne le font qu'au nom de leur propre vision manichéenne des réalités et de leurs intérêts politiciens. Car le peuple est pour le retour à la sagesse prémonitoire de L'Habib, comme disent certains vieux encore; je le vérifie sur le terrain tous les jours dans la Tunisie profonde, loin des salons déconnectés des réalités, ainsi qu'auprès des Palestiniens.
Les députés qui ont parrainé la motion de censure et ceux qui les soutiennent au nom d'une morale mal placée ou d'une justice pour l'application de laquelle ils ne font rien, en ne donnant surtout pas l'exemple, ne font que desservir la cause qu'ils prétendent défendre.
Pour servir cette cause, il est impératif d'agir activement en vue du recouvrement du peuple palestinien de ses droits légitimes. Or, ces droits sont reconnus par un droit international que nous ne respectons pas. Ce droit est à la base de la légalité de l'État d'Israël, mais aussi de celle — méconnue et niée — de l'État palestinien. Aussi, refuser cette légalité qui a érigé Israël en État, ne pas reconnaître cet État, c'est aussi renier notre propre cause.
Servir la cause de Palestine aujourd'hui, c'est faire en sorte d'amener Israël à ne plus nier son propre acte de naissance, car sinon il se renie lui-même. Israël et la Palestine sont deux jumeauxmonozygotes, l'un ne peut nier l'autre sans rendre nulle sa propre existence.
Si Israël refuse la légalité qui est à la base même de sa propre création, c'est grâce à nous et à notre politique écervelée, se fondant sur le refus arabe de cette légalité. Ainsi, nous servons indirectement l'intransigeance d'Israël, lui donnant ses justifications, toujours renouvelées et confirmées par un comportement de notre part de plus en plus absurde.
Des intégristes de la cause palestinienne
Au vrai, ceux qui se complaisent dans le rappel d'une éthique de façade, appelant à une attitude négative, tout en passivité,se limitant à dénoncer les turpitudes d'Israël sont les complices objectifs de cet État. Ils agissent comme nos intégristes religieux qui violent l'esprit et la lettre de l'islam en prétendant vainement s'y conformer.
Ces intégristes de la cause palestinienne doivent réaliser que c'est en reconnaissant l'État d'Israël qu'on aura le plus de poids et de chances pour imposer la reconnaissance de son jumeau légal, l'État de Palestine.
Ils doivent comprendre qu'Israël est une réalité internationale définitivement installée, et qui justifie ses abus et ses excès par notre aveuglement à reconnaître cette réalité incontournable.Aussi, notre cécité politique nous ôte-t-elle tout droit à dénoncer les flagrantes violations de la loi internationale par Israël qui est bien aise de s'appuyer sur notre comportement qui n'en tient pas compte pour continuer dans ses menées illégales et immorales.
Tout se passe comme si on avait affaire à un aveugle qui dénonce à bon droit lecomportement avéré injusted'un voyant. Toutefois, sa cécité le rend peu crédible face aux dénégations éhontées du voyant; c'est que les deux ne relèvent pas du même monde ni des mêmes réalités qui seules font foin en ce monde des apparences.
Recouvrons donc une vue sereine des réalités internationales comme l'ont fait les Palestiniens eux-mêmes, cessons d'instrumenter leur cause à nos fins propres et agissons honnêtement et loyalement pour le service d'une cause que nous desservons gravement!
Soyons véritablement éthiques en revenant et en appelant à revenir à la légalité internationale de 1947; on aura alors toutes les chances pour être entendus et pour servir enfin une solution globale et juste dans la région!
Farhat Othman