Gauche, droite : Mais sur quel pied danse Al Jomhouri ?
Prenant acte des divergences qui l'opposent aux autres membres du bloc démocratique à l'ANC, El Joumhoury a décidé de s'y retirer. Ce faisant, il a pris de vitesse ses anciens partenaires qui s'apprêtaient à l'exclure de leurs rangs. Salma Baccar, la présidente du groupe, a en effet déclaré qu'un grand nombre d'élus démocrates appelaient fermement à écarter le parti d'Ahmed Nejib Chebbi suite aux décisions unilatérales prises par les leaders de ce parti concernant de nombreux sujets épineux.
Que reproche-t-on au parti Al Jomhouri?
On reproche aux dirigeants d'Al Jomhouri de ne pas s'être alignés sur les positions du bloc démocratique concernant la motion de censure présentée contre Amel Karboul et Ridha Sfar. En effet, Ahmed Nejib Chebbi, Issam Chebbi, Maya Jribi, Kais Mokhtar et Iyed Dhahmani ont signé la pétition visant à auditionner les deux ministres. Protestant fougueusement contre la tenue à huis clos de la séance plénière consacrée à l'examen des motions de censure déposées par les députés, Iyed Dahmani a renchéri avec un long et virulent plaidoyer de plus de onze minutes dans lequel il n'a cessé de critiquer la décision des deux ministres et de répéter que la normalisation avec l'entité sioniste était une ligne rouge pour la diplomatie tunisienne. Un discours digne des meilleures campagnes électorales! Puis, juste avant le passage au vote, Iyed Dahmani a décidé, avec d'autres élus, de retirer sa signature et de publier un communiqué annonçant que la motion de censure à l’encontre d’Amel Karboul et de Ridha Sfar ainsi que leur audition étaient finalement annulées.Un stratagème qui a provoqué l'ire de certains députés, notamment ceux d'El Massar, car si la motion de censure avait été rejetée par les élus, cela aurait garanti six mois d'immunité auprès de l'ANC pour le gouvernement.
Mais encore…
Outre ces manoeuvres, les élus du bloc démocratique reprochent au parti Al Jomhouri sa position sur la nouvelle loi électorale ainsi que son rejet de tout appel à dissoudre l'ANC, considérant toute tentative dans ce sens comme anticonstitutionnelle. Pour rappel, et quelques jours après l'assassinat du député Mohamed Brahmi en juillet dernier, Ahmed Nejib Chebbi avait appelé, lors d'interventions télévisées et radiophoniques, à dissoudre le gouvernement et l'assemblée nationale constituante. Autres faits, autres "omissions", invité lundi 12 mai sur les ondes d'Express FM, M. Chebbi a déclaré qu'une motion de censure contre le Président de la République n'est justifiée qu'en cas de haute trahison et affirmé que son parti n'en avait jamais signé auparavant contre Moncef Marzouki. Or, il s'est avéré, documents à l'appui, que les députés d'Al Jomhouri ont signé une motion de censure en avril 2013, visant le Président de la République suite à sa visite au Qatar lors de laquelle il avait fustigé l'opposition et les médias tunisiens.
Comme un air de déjà vu
Pour le parti Al Jomhouri, cette situation ambiguë n'est guère inhabituelle puisque ses prises de position inattendues et son inconstance lui ont déjà valu d'être écarté par le Front du Salut National, sur fond de désaccords profonds avec Nidaa Tounès.Tantôt se ralliant à la gauche, tantôt sympathisant avec la droite, le parti Al Jomhouri perd de plus en plus en crédibilité, au grand dam de ses sympathisants qui se font désormais rares. Selon le dernier sondage de Sigma Conseil, seuls 2,3% des Tunisiens voteraient pour ce parti aux prochaines élections législatives et son leader Ahmed Néjib Chebbi n'obtiendrait qu'un timide 1,2 % d'intentions de vote pour les présidentielles. Pourtant, Chebbi continue à y croire. « Mes chances sont intactes» a-t-il déclaré sur Expressfm.