La tournée Africaine de Marzouki : On ne va pas réinventer la roue!
Le président provisoire Moncef Marzouki effectue jusqu’au 25 juin sa première grande tournée africaine qui englobe quatre pays du Sud de Sahara dont trois, le Mali, le Niger et le Tchad sont des états enclavés, très vastes, peu peuplés et parmi les pays les moins avancés du monde (PMA). L’intérêt évident de ces Etats c’est qu’ils sont à la lisière de l’Afrique du Nord, constituent sa profondeur stratégique et représentent la zone de prédilection où le terrorisme islamiste peut prospérer et étendre sa menace jusqu’à son voisinage proche où sont particulièrement visées l’Algérie, la Tunisie et la Libye. La coopération sinon la coordination militaire et sécuritaire avec ces Etats est naturellement bienvenue au moment où notre pays mène une guerre sans merci contre le terrorisme qui est par nature transfrontalier et qui se nourrit de la contrebande, du crime transnational et de tous les trafics possibles et imaginables.
De ce point de vue cette tournée est opportune et relève de la sécurité nationale de la Tunisie. Néanmoins elle a été engagée comme si la Tunisie venait de découvrir l’Afrique. Ce qui est totalement faux. Dès l’indépendance, le premier président de la République tunisienne Habib Bourguiba s’est intéressé prioritairement à l’Afrique. Dès 1960, il lança avec le leader ghanéen Kwame Nkrumah la ligue des partis de libération nationale en Afrique qui allait faciliter la création de l’Organisation de l’Unité africaine dont ils furent tous les deux parmi les fondateurs. En novembre-décembre 1965, le chef de l’Etat tunisien fit son plus grand périple en Afrique au cours duquel il visita une dizaine de pays non seulement francophones comme le Sénégal, le Mali, le Niger et la Côte d’Ivoire mais également anglophones tel le Libéria. En 1973, il se rendit dans plusieurs pays africains du sud du Sahara en passant par la Mauritanie.
L’intérêt de la Tunisie pour l’Afrique ne s’est jamais démenti. Ainsi nous disposons de relations suivies et avons conclu des accords avec 42 Etats sur les 53 que compte l’Union africaine dont certains ne sont pas nos partenaires traditionnels comme le Zimbabwe, le Kenya, l’Ethiopie et les Seychelles entre autres. Des commissions mixtes avec un grand nombre de pays africains font le point de façon régulière (tous les ans ou les deux ans) de l’état des relations bilatérales. Là aussi, il ne s’agit pas uniquement de partenaires traditionnels tel par exemple le Nigéria devenu en 2013 le pays ayant le PIB le plus important du continent où d’ailleurs nous disposons d’une ambassade résidente à Abuja depuis plusieurs années.
La Tunisie a été aussi parmi les premiers pays à avoir établi un secrétariat d’état chargé des affaires africaines dans le but d’explorer les potentialités de coopération avec les pays du Sud du Sahara. En août 2010 et en considération de l’importance que prenait le continent noir, un coordinateur général chargé de la promotion des échanges économiques avec les pays d’Afrique sub-saharienne a été désigné auprès du ministre des affaires étrangères en la personne de M. Sadok Fayala un des meilleurs connaisseurs tunisiens de l’Afrique.
L’Afrique sub-saharienne reste néanmoins une zone difficile d’accès et une dizaine d’accords par-ci et une dizaine d’accords par-là ne suffisent pas pour prétendre à l’établissement de coopération durable avec les pays de ce continent. Chasse-gardée de la France d’un côté et de la Grande Bretagne, de l’Allemagne ou de la Belgique de l’autre, compte tenu du passé de chaque pays, l’Afrique est actuellement visée aussi par les grandes puissances économiques comme le Japon ou la Chine et même des puissances économiques émergentes telle la Turquie. Le Japon a mis en place la Conférence internationale de Tokyo sur le développement d’Afrique TICAD. Il s’agit d’un sommet portant sur le développement africain co-organisé par le Japon, l’ONU, la Banque mondiale, le PNUD et la commission de l’Union Africaine. LA TICAD-V a eu lieu en juin 2013 à Yokohama. La Chine de son côté a mis en place le Forum de la Coopération sino-africaine qui se tient sous les ans alternativement en Chine et dans un pays africain. La Turquie, pour sa part a organisé en 2008, un Sommet Afrique-Turquie ce qui a permis de faire passer les échanges commerciaux turco-africains de moins d’un milliard de dollars en 2003 à 10 milliards de dollars en 2011. Ankara veut atteindre en 2015 le volume ambitieux de 50 milliards de dollars.
Dans ce contexte, la Tunisie a peu de chances d’avoir sa part du marché africain dont les potentialités sont énormes. Un plan stratégique multidisciplinaire est indispensable pour investir ce marché. Il faut tout d’abord développer les transports entre Tunis et les capitales africaines. Par air principalement comme le font l’Algérie et le Maroc qui sont en concurrence sur le continent pour des raisons politiques. Jusqu’ici le transporteur national Tunisair n’a ouvert des liaisons directes qu’avec Dakar, Nouakchott, Bamako et Abidjan. Après le retour programmé de la BAD en Côte d’Ivoire. On ne sait pas si cette dernière ligne sera maintenue. Il faudrait aussi créer des liaisons maritimes entre les ports tunisiens et ceux d’Afrique.
D’autre part, pour pouvoir avoir sa place parmi les grands pays qui ambitionnent d’avoir une part importante sur le continent nous devons œuvrer sur le segment de la coopération triangulaire ou multilatérale. Les Tunisiens connaissent bien l’Afrique, des bureaux d’études mis en place par des compétences tunisiennes travaillent sur le continent et il est possible de recourir à nos nationaux pour faciliter l’introduction des Chinois, des Japonais des Turcs et des autres en Afrique.
Le système bancaire tunisien doit aussi apprendre à travailler sur l’Afrique et à accompagner si nécessaire les hommes ou femmes d’affaires tunisiens qui cherchent à s’introduire sur les marchés africains.
L’Etat quant à lui a l’obligation d’aider les chefs d’entreprises tunisiens à investir en Afrique et ce particulièrement en leur accordant des subventions pour s’établir en Afrique. Une étude a été élaborée à cette fin selon un ancien haut responsable en charge des affaires africaines. Il suffit de l’actualiser et d’avoir la volonté réelle de mettre en application les propositions qui y figurent estime-t-il.
Il ne fait pas de doute que l’Afrique constitue la chance de la Tunisie mais il est certain que ni un président provisoire ni un gouvernement appelé à gérer le quotidien en attendant les élections générales à la fin de l’année ne sont en mesure de mettre en place une stratégie efficiente en direction du Continent noir.
R.B.R.
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Des lignes aériennes reliant des capitales africaines à Tunis ...sans plaisanterie ;Tunis air - lorgne - tenez -vous bien sur Irbil!! Quant aux liaisons maritimes; il serait plus judicieux de d'établir d'abord des lignes intérieures reliant les ports de la goulette - mahdia-sfax- gabès et zarzis c'est rentable et non moins relaxant.
Sur les traces de Mohamed VI du Maroc. Le président temporaire tunisien a imité M6 qui rentrait d'Afrique. Le principe d'une coopération intelligente SUD/SUD avec l'Afrique est une bonne idée en soit, encore faut-il y préparer les tunisiens avant de se lancer la tête en avant. Par rapports aux Libanais possédant une longue expérience dans la hijra, et aux marocains qui ont une longue tradition avec l'Afrique, ya pas photo. Le tunisien doit d'abord s'ouvrir à la coopération, freiner sur le racisme. Sortir de soit, pour être capable d'aller vers les autres et mieux connaitre les africains pour pouvoir être compétitifs et réussir. L'Afrique n'est pas facile.
comme réponse au titre je dis, mais on peut quand meme faire marcher la roue ou peut etre ne pas mettre le bâton dans la roue c largement suffisant pour faire marcher notre pays
Oui, l'interet de la tunisie pour l'afrique ne date pas d'aujourd'hui, contrairement à ce que des gens mal-intentionnés veulent nous faire croire. Bourguiba fut l'un des pères fondateurs de l'OUA et de la francophonie avec Senghor,Hamani Diori, Houphouet-boigny...Dans les années 1960, elle a aidé les mouvements de libération, dont celui de Mandela.Ensuite elle a participé activement à la création de l'Union africaine, conclu des centaines d'accords de coopération bilatérales dans tous les domaines avec les pays d'afrique subsaharienne,ouvert une banque et inauguré une ligne aérienne à Dakar, au début des années 1980 et accueilli en 1994 l'un des sommets les plus réussis de l'OUA, auquel participèrent pas moins de 42 pays africains, dont pour la 1ère fois de son histoire l'Afrique du sud post-apartheid, représentée par le grand Nelson Mandela.