Les deux éléments clefs qui ont fait changer la stratégie pour libérer Becheikh et Gantassi
L’enlisement était à craindre pour l’obtention de la libération des deux otages tunisiens en Libye, Mohamed Becheikh et Laroussi Gantassi. C’est alors que deux éléments clefs interviendront. Le premier, c’est lorsque le ministre des Affaires étrangères apprend l’influence positive que pouvait exercer l’ancien ministre libyen de l’Intérieur, Mohamed Cheikh, une personnalité respectée par toutes les parties. Il cherchera à le joindre et finira par le trouver à la Mecque en train d’effectuer l’Omra. Cheikh, déjà sensibilisé à la question par des amis Tunisiens accepte de s’engager volontiers pour contribuer au dénouement de l'affaire.
Le second, voyant les risques sécuritaires contre l’Ambassade de Tunisie à Tripoli et ses effectifs s’accentuer et les contacts de médiations s’enliser, le ministre décidera la fermeture de l’Ambassade et le rapatriement des équipes, gardant seul ouvert le consulat général. Une mesure prudentielle qui protègera les diplomates et soulignera la détermination de la Tunisie à trouver un dénouement heureux à la prise d’otages.
En fait, Mongi Hamdi opèrera, avec l’appui de Mehdi Jomaa, un changement total de stratégie. La médiation de l’ancien ministre libyen de l’Intérieur, Mohamed Cheikh sera au cœur du dispositif. De retour en Libye, celui-ci multipliera les rencontres sur le terrain et désignera des pistes utiles. Parmi elles, précisément, celle recommandée par un diplomate tunisien à Benghazi. Il s’agit d’entrer en contact avec la famille d’un des deux détenus libyens en Tunisie, Hafedh Dhbaa, et de solliciter leur intervention auprès des ravisseurs. L’idée s’est avérée géniale.
Hatem, le frère de Hafedh Dhbaa, ingénieur de formation, était au départ hostile à toute médiation. Le sort de son frère l’inquiétait au plus haut niveau d’autant plus que leur père, souffrant d’un cancer en phase finale, avait fait le voeu d’autre vœu, de revoir son fils emprisonné avant sa mort. Cet aspect humain n’a pas échappé à Mongi Hamdi et la Cellule de crise. Une invitation en Tunisie avec prise en charge pour soins médicaux a été adressée au père, avec une autorisation spéciale de rendre visite à son fils détenu à la prison d eMahdia. Ce geste humain et sincère produira son effet.
Mohamed Becheikh viendra à Tunis où il sera reçu avec beaucoup d’égards par Mongi Hamedi. Il ira à la Mornaguia rendre visite aux deux détenus libyens concernés et leur expliquera la situation. Leur extradition en Libye est possible, mais pas tout de suite. Elle ne peut se faire qu’après la ratification par la Libye de la convention arabe en la matière adoptée à Ryadh. Les deux détenus seront compréhensifs. Une source libyenne nous confirme même que Mohamed Dhbaa, a invité les siens à œuvrer pour la libération des deux otages tunisiens. Le feu vert avait-il été ainsi donné depuis leurs prisons ? Difficile de l’affirmer mais ce qui est sûr c’est que la visite en Tunisie de Mohamed Cheikh et ses contact avec Dhbaa et sa famille en Libye ont été décisifs.
Cette fois-ci, lorsque le téléphone a sonné, ce fut une véritable délivrance pour Mongi Hamdi. Le dossier est clos. Combien d’appels téléphoniques aura-t-il passé à son compte personnel (le montant plafond accordé à un ministre est de 100 D/mois, avec une exception de 500 D pour le ministre des Affaires étrangères appelé à de fréquents voyages à l’étranger) ? chaque jouur que le bon dieu faisait et quel que soit l'endroit où il se trouvait, il ne manquait jamais d'appeler se contacts en Libye et ailleurs, relançant la médiation, et ne regardant guère le coût de ses appels. La libération des deux otages n’a pas de prix !
Et maintenant ?
Pour les deux détenus libyens en Tunisie, l’invitation adressée au père de Hafedh Dhbaa pour soins en Tunisie et pour visiter son fils est maintenue. Tout comme la bonne volonté quant à la mise en œuvre de la convention de Ryadh pour ce qui est de l’extradition entre la Libye et la Tunisie.
Pour les deux otages, c’est la fin d’un long calvaire, mais aussi l’amorce d’une nouvelle carrière. Mohamed Becheikh réalise son rêve en obtenant son intégration officielle au ministère des Affaires étrangères. Il obtiendra bientôt son affectation au siège et partira dans quelques années en poste à l’étranger, cette fois-ci en tant que diplomate et non en tant d’agent local. Quant à Laroussi Gantassi, il bénéficiera d’une promotion spéciale du grade de Secrétaire des Affaires étrangères à celui de Conseiller. A peine reprendra-t-il son souffle, il sera de nouveau affecté en poste à l’étranger.
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