Cambriolages: Comment protéger votre maison
Vols et cambriolages sont-ils devenus un fléau national. Déjà étendu à l’ensemble du pays, le phénomène a profité des fragilités sécuritaires de la révolution pour prendre une ampleur toute particulière.
Les statistiques du ministère de la Justice et des Droits de l’Homme enregistrent pas moins de 24 989 affaires traitées rien que durant l’année judiciaire 2010-2011. Le chiffre est tombé en 2011-2012 à 21 267 affaires jugées. Mais, les pics n’ont pas tardé à reprendre. Rien que durant le premier trimestre 2014, les plaintes enregistrées s’élevaient à 12 934.
La plupart des affaires portent sur les différents types de vol, ceux par effraction suivis d’intrusion, concernant principalement les habitations, tous genres confondus. Chaque année, les services de police, puis les tribunaux, traitent jusqu’à 3 000 affaires.
Le butin varie, pour les logements cambriolés, entre de menus effets et l’électronique, et de grosses prises sous forme de bijoux, d’importantes sommes d’argent, montres de grandes marques, etc. Les cambrioleurs préfèrent de plus en plus ce qui est facile à écouler sans laisser de traces (bijoux et argent) et plus léger à emporter, mais ne résistent pas devant la tentation des téléphones portables haut de gamme ou des ordinateurs portables. Le scénario est quasi identique.
Repérage du logement ciblé et vérification de l’absence de ses occupants (pas de mouvement entrée-sortie, volets baissés, pas de lumière changeant de chambre à chambre, sonnerie, etc.: le ciblage est important. Puis, on passe à l’action: escalade du muret, si c’est une villa, coupure du courant, du téléphone et de l’alarme, et recherche de l’endroit le plus facile à forcer : une fenêtre, une porte-fenêtre, la porte de la cuisine, etc.
Le reste ne sera pas difficile : on force le fer forgé, on soulève le rideau en plastique, on pousse les volets, quitte à briser les vitres, et, hop, les malfrats sont à l’intérieur de la maison. Un complice reste souvent dehors pour assurer le guet.
Visite rapide des lieux pour estimer le butin de première disponibilité (téléphones, ordinateurs, etc.), avec parfois arrêt devant le frigo pour se servir, mais surtout identification du bloc parents et recherche du coffre-fort. C’est là que tout se joue. Alors, bonjour les dégâts ! Les exemples sont légion. Cette jeune fille qui, juste à la veille de son mariage, voit s’évaporer ses parures et bijoux. Cet étudiant qui doit soutenir son PFE laborieusement rédigé sur son ordinateur est sous le choc du vol de son ordinateur.
Cet homme d’affaires dont le passeport est volé, ce qui le privera pendant un an d’avoir un passeport pour pouvoir aller négocier avec ses clients et fournisseurs. Ce père de famille, la mort dans l’âme, qui voit disparaître toutes ses économies mises en coffre pour payer une lourde opération chirurgicale que doit subir sa fille, le médecin ayant exigé du cash…Récit d’une désagréable scène vécue, puis quelques conseils utiles. Un dossier à lire attentivement.
La nuit de toutes les émotions
Dimanche, 3 heures du matin. Le téléphone sonne vous tirant de votre profond sommeil, dans votre résidence secondaire, en bord de mer. C’est la centrale veille de votre société de télésurveillance : «Désolé de vous déranger à cette heure-ci, mais la sirène d’alarme de votre maison à Tunis vient de se déclencher ! Souhaiteriez-vous qu’on alerte la police ?» Sonné, au vrai sens du terme, vous acquiescez immédiatement, puis reprenant peu à peu votre esprit, vous pensez à la conduite à tenir. Premier geste, vous osez déranger votre voisin pour lui demander de s’enquérir de la situation. Surpris, mais très aimable, il s’exécute rapidement.
Vous avez de la chance, le poste de police de votre quartier, alerté par la salle d’opérations du district de la police, prévenu par la télésurveillance, vous appelle pour vous signaler qu’une patrouille est en route. Mieux, il vous met en contact avec son chef pour bien lui indiquer l’adresse. Sur un ton rassurant mais ferme, l’inspecteur de police vous indique qu’il est bien arrivé sur les lieux et qu’apparemment, tout est normal à partir de l’extérieur. Peut-il enjamber la clôture, s’introduire dans le jardin et vérifier davantage ? Il n’y est pas habilité. Là-dessus, c’est votre voisin qui vous appelle, rassurant lui aussi. Vu de la terrasse, rien à signaler. Bref, juste un petit cauchemar. Vous les remerciez tous et vous vous recouchez.
Un peu après 5 heures du matin, deuxième appel de la centrale de télésurveillance : «De nouveau la sirène s’est déclenchée, mais il y a aussi ouverture de la fenêtre du salon et le détecteur de mouvement a signalé des intrus !» Cette fois-ci, c’est sérieux, on est dans le vif de l’effraction. La police est alertée, la même patrouille fonce à toute allure, autorisée à s’introduire dans la maison. Au téléphone, vous suivez l’action en direct, grâce à votre voisin, le cœur battant.
Année judiciare Nature du crime Total Vol Vol Qualifié | |||
2003 - 2004 | 24 367 | 2 367 | 26 764 |
2004 - 2005 | 20 792 | 3 635 | 24 427 |
2005 - 2006 | 20 110 | 2 085 | 22 195 |
2006 - 2007 | 19 308 | 2 105 | 21 413 |
2007 - 2008 | 18 783 | 2 262 | 21 045 |
2008 - 2009 | 19 659 | 2 243 | 21 902 |
2009 - 2010 | 22 134 | 2 607 | 24 741 |
2010 - 2011 | 22 057 | 2 932 | 24 989 |
2011 - 2012 | 18 422 | 2 845 | 21 267 |
Vous avez juste le temps de vous laver le visage, de vous mettre au volant de votre voiture et de prendre la route. La tête est bourdonnante : qui sont les cambrioleurs, de quelle complicité ont-ils bénéficié, comment ont-ils pu pénétrer à l’intérieur de la maison et surtout seront-ils attrapés et, dans la négative, quel est leur butin, quelle est l’ampleur des dégâts ? Si vous arrivez à vous maîtriser, vous faites le deuil de votre ordinateur portable laissé à la salle de séjour, de vos équipements hi-fi, des meubles et tapis, et… des bijoux de la famille. Plus encore, des chéquiers et passeport. Bref, la totale ! Un vrai désastre. Vous qui rêviez d’un week-end de vacances et d’une grasse matinée dominicale, vous vous retrouvez en plein cyclone.
La voiture roule à vive allure, votre esprit encore plus vite. Tout remonte à votre mémoire et défile devant vos yeux.
Un appel de votre voisin vient vous tirer de toutes vos supputations : «Les voleurs sont dans la maison, les policiers ont pu s’y introduire et, les prenant en flagrant délit, des bijoux cambriolés en main, ont pu les maîtriser ! La confrontation a été très rude. Mais les cambrioleurs sont à présent menottés et seront conduits au poste de police.» Puis, il vous passe le chef de patrouille, haletant, encore lui aussi au cœur de l’action : «Rassurez-vous, ils sont arrêtés. Rejoignez-nous au poste pour le dépôt de la plainte et les formalités».
Face à vos cambrioleurs
Vous ne savez plus quoi faire, vous poussez un grand ouf, lançant sans vous arrêter : Hamdoullah. Mais vous n’êtes pas encore remis de vos émotions. Arrivé chez vous, votre voisin, resté de garde, vous rend visite. Juste un grand coup d’œil furtif, il faut aller illico au poste de police. Les agents sont accueillants, compatissants, mais aussi fiers de leur prouesse. L’un d’eux, un jeune commissaire de police au look bien élégant, porte encore les traces de griffes et de sang lors de son empoignade avec les cambrioleurs. «Ils sont là, dit-il. Ça n’a pas été facile, mais nous avons réussi à les arrêter. Vous savez, le chef nous avait donné comme objectif minimum pour cette soirée d’arrêter en flagrant délit des cambrioleurs par effraction. Mission accomplie et nous essayons toujours de faire plus». Là, on est dans le marketing et la gestion par objectif. Tant mieux.
Dans un bureau à l’intérieur du commissariat, un policier, officier de police judiciaire, procède aux interrogatoires. Les deux malfrats, ceux qui ont failli vous voler tout ce que vous avez de précieux, sont là, menottés. Tee-shirts, jeans et espadrilles, le regard hagard, ils savent déjà ce qui les attend, tant ils semblent coutumiers de ce genre de situation. Effectivement, il s’avèrera qu’ils sont tous deux récidivistes, ayant purgé l’un trois ans et demi et l’autre sept ans de prison. Ils vous regardent sans baisser les yeux comme pour vous adjurer de renoncer à porter plainte, ce qui réduira la peine qui les attend. Mais vous, vous avez du mal à les regarder.
Ne pouvant nier leur forfait, ils sont passés aux aveux, racontant dans le détail leur sinistre virée, arguant de la pauvreté. L’officier note tout sur l’ordinateur, multiplie les questions et ne se suffit pas des premières réponses. Fixé à son siège depuis samedi après-midi, il a passé toute la nuit à recevoir d’autres malfaiteurs et à les interroger, sans avoir eu le temps de dîner ou, à l’aube, de prendre son petit-déjeuner. Grillant cigarette sur cigarette, il ne perd pas sa concentration.
Ces aveux ne suffisent pas. Il va falloir interroger le fichier central pour vérifier s’ils ne sont pas recherchés pour d’autres affaires et continuer à les interroger pour obtenir d’eux des aveux sur d’autres vols. Ça ne fait que commencer. Le soir, ils iront passer la nuit au centre de Bouchoucha, pour revenir chaque matin au poste de police où se poursuivent les interrogatoires. Dossier bouclé, ils seront alors déférés devant le procureur de la République qui les mettra sous écrous, en attendant leur jugement.
Que choisir : le gardiennage ou la télésurveillance?
Comment arbitrer entre les deux options qui s’offrent à vous ?
Le gardiennage physique : Il faut prévoir au moins deux agents qui se relaient 24h/24, 7 jours sur 7, jours de l’Aïd compris, et ne quittent pas leur poste sous aucun prétexte, leur aménager, dans les dépendances, une chambre avec coin cuisine et une salle d’eau. Un téléviseur relié à une antenne satellite et un réfrigérateur sont à prévoir. Il faut compter pas moins de 800 D, voire 900 D par agent, s’il est recruté auprès d’une société de gardiennage et déclaré à la Cnss. Recourir à un recrutement direct est hasardeux. Maintenant, quels sont ses moyens en cas d’attaque ? Juste dissuader et alerter. Ne comptez pas sur lui pour plus que ça.
La télésurveillance se développe de plus en plus et se déploie à plusieurs niveaux. A l’intérieur de la maison, il s’agit de mettre en place des contacteurs sur les fenêtres et ouvertures et des détecteurs de mouvements dans les principaux endroits sensibles. On peut ajouter des caméras, mais mieux vaut les installer à l’extérieur, aux quatre coins, au moins.
Une application informatique vous permettra de voir sur votre ordinateur ou smartphone ce qui se passe aux alentours de votre maison.
Plus, et c’est très en vogue et désormais disponible en Tunisie, des lasers détecteurs de mouvements disposés à l’extérieur. Souvent, ils sont jumelés avec des projecteurs. Au moindre passage suspect, ils allument les projecteurs et déclenchent l’alarme. Le signal est immédiatement reçu par la centrale de télésurveillance qui s’empressera de vous appeler au téléphone pour vous alerter. Si elle ne parvient pas à vous joindre aux numéros que vous lui aviez communiqués, elle préviendra la salle d’opérations de la police.
Le choix de la compagnie de télésurveillance repose sur des éléments clés : la qualité et la pertinence de l’audit des risques établi dans votre cas précis, la recommandation de la configuration générale, le choix des équipements proposés et le coût. Autant d’éléments à prendre avec beaucoup d’attention. En fait, ce dispositif renforcé se veut assez dissuasif. Les cambrioleurs ont ainsi plusieurs barrières à forcer : la clôture, le gardiennage physique ou électronique, le fer forgé, les volets métalliques et les chambres fermées avant d’arriver au coffre-fort. Reste la question fondamentale : prendre une bonne assurance multirisques habitation.
Cette police d’assurance couvre nombre de risques tels que les dégâts causés par les eaux, l’incendie, etc. mais aussi le vol. Là, il ne s’agit pas de tricher. Il faut tout déclarer et au juste prix. Rassurez-vous, le montant annuel à payer n’est pas énorme. En tout cas, il est insignifiant en cas de sinistre.
T.H.