Le temps des promesses, le verdict des urnes
Voici venu le temps des élections, le 26 octobre pour les législatives, puis le 23 novembre pour la présidentielle. Commence le temps des promesses, de la surenchère et de la séduction.
Programme contre programme ? Les Tunisiens lisent peu. Look contre look ? Les électeurs ne sont pas à l’abri des déceptions. Liste contre liste et candidat contre candidat ? Le grand jeu de la fortune et du hasard ne dispense pas des urnes. Le peuple tranchera!
L’avenir de la Tunisie se décidera durant ces deux mois décisifs.
Le sort ne sera pas scellé uniquement par le verdict des urnes, mais aussi par l’ensemble du processus électoral et politique.
Electoral, à travers une campagne apaisée, sans affrontements, dans un climat général serein et sécurisé. Mais aussi une large participation des électeurs, un vote transparent et des résultats incontestables. La classe politique doit s’y impliquer pleinement, sous le regard vigilant de la société civile en observateur attentif, et reconnaître les résultats, quels qu’ils soient.
Politique, tout dépendra en effet du degré du consensus qui sera réalisé autour des grandes questions clés du gouvernerensemble et de l’étendue de la coalition qui le soutiendra et le mettra en oeuvre. L’arithmétique des urnes peut donner légitimement une majorité, même simple à 50% des voix +1, mais ne suffit pas pour répondre aux impératifs de l’étape cruciale à venir de la transition vers la démocratie. La fracture et la confrontation seront alors inévitables, redoutables.
Un seul vainqueur et plusieurs vaincus, c’est l’essence de la démocratie lorsqu’elle est solidement ancrée. Lorsque, aussi, le vainqueur n’exercera pas un pouvoir absolu, ne privilégiera pas les siens et n’hypothèquera pas le pays. Remettre les clés de la République à un seul parti dominant et dominateur, à un président absolu, à un chef de gouvernement enclin à exercer seul, sans concertation, tous ses pouvoirs, ne préservera pas l’Etat et ses institutions naissantes, encore fragiles, des graves dangers qui les guettent. Une confrontation acharnée entre opposition et majorité, quels qu’en soient les protagonistes, secouera fortement les fondements de la nouvelle démocratie en construction.
Maintenant que doit commencer, de toute urgence, le temps de l’économique, du développement, du redressement, de la relance, pour rattraper le retard que nous avons accusé, c’est de sérénité politique et d’unité nationale que la Tunisie a le plus besoin. Raboter les égoïsmes, réduire les ambitions et reporter à plus tard les intérêts relèvent du patriotisme.
La Tunisie ne peut être gouvernée aujourd’hui qu’au centre et à plusieurs. La Constitution a tranché les grandes questions et défini le modèle de société. Plus personne ne parviendra désormais à imposer au pays sa dictature, son idéologie, sa mainmise.
Le rôle des politiques est d’éviter à la Tunisie les tiraillements et aux Tunisiens, les divisions. Il leur appartient de favoriser l’entente et la concorde, de bâtir l’unité nationale pour affronter tous ensemble les grands défis de l’éducation, de l’emploi, des soins de santé, du logement, du développement inclusif, de l’innovation technologique et de la création de la richesse.
Les jeunes, la société civile, les forces vives de la nation qui ont été à l’origine de la révolution et qui, depuis lors, ont pesé de tout leur poids à chaque épreuve, à la Kasbah, comme au Bardo et ailleurs en Tunisie, lorsque tout avait failli basculer, gardent la lourde et noble responsabilité de la vigilance et de l’action.
Au temps des promesses doit se substituer celui de l’engagement patriotique. Et le verdict des urnes ne doit incarner que l’espoir.
Deux mois, et la Tunisie en sortira grand vainqueur que le monde entier célèbrera. C’est à notre portée et cela ne dépendra que des Tunisiens et des Tunisiennes.
T.H.