News - 14.10.2014

Jomaa : Je ne peux pas être le mercenaire d'une politique qui ne sera pas la mienne

« Beaucoup en Tunisie, y compris chez les islamistes d’Ennahda, pensent qu’un gouvernement d’union nationale reste nécessaire. Si on vous rappelle au poste de premier ministre, irez-vous? » A cette question posée par notre consœur Angélique Mounier-Kuhn du journal suisse Le Temps, lors de sa participation au Forum mondial de l’Investissement organisé par la CNUCED à Genève, Mehdi Jomaa a confirmé sa position déjà annoncée, mais en la précisant davantage. « Je l’ai dit : «je ne serai pas une nouvelle fois chef du gouvernement. La Tunisie traverse une crise de confiance : tenir un engagement, c’est montrer qu’il y a une autre manière de faire les choses. C’est aussi une contribution. En outre, je suis autonome. Des partis vont émerger des élections, ce sera à eux de choisir le projet pour le pays. Je ne peux pas être le mercenaire d’une politique qui ne sera pas la mienne. La Tunisie regorge de gens compétents et de bonne foi, personne n’est indispensable ».

Extraits

– La situation économique reste très préoccupante. 
 
– L’envie de liberté est une des raisons de la révolution. Mais elle n’est pas la seule : les Tunisiens avaient besoin d’emplois et d’un meilleur équilibre pour les régions défavorisées. Sur ces plans-là, nous n’avons pas avancé. Cela aurait été illusoire de croire que nous le pouvions. La révolution a cassé un système, ébranlé l’Etat. La gestation qui s’en est suivie n’a pas été propice au développement économique. D’autant plus que la Tunisie a été affectée par la situation en Europe, notre principal partenaire, et le contexte régional. 
 
– En arrivant au pouvoir, vous avez dit aux Tunisiens qu’ils devaient consentir à des sacrifices. 
 
– Pour beaucoup, l’Etat doit donner. Mais je ne me vois qu’en gestionnaire des avoirs du contribuable. On ne pouvait plus continuer à voir dériver les dépenses sous la pression sociale comme c’était le cas ces dernières années. En ce moment, des promesses électorales sont faites. Je dis : «Faites attention. La seule promesse qui peut l’être c’est de travailler plus et d’entamer des réformes pas nécessairement populaires.» Celles que j’ai mises en œuvre, comme l’augmentation de l’essence, ne l’étaient pas. Je ne prône pas un libéralisme forcené, en Tunisie cela ne marcherait pas, le rôle social de l’Etat doit rester important. Il doit être le garant de l’équité fiscale et de l’équilibre social, tout en donnant plus de place à l’initiative privée. 

– Vous renoncez à vous présenter à la présidentielle. Trop de défis ? 

– Non, j’affronte les défis avec beaucoup de sérénité. Mais j’ai accepté cette mission en janvier avec l’engagement moral de la mener à bien et de ne pas me présenter aux élections. J’ai tout simplement tenu ma promesse. 
 
– Des sondages vous donnaient pourtant en tête. 
 
– L’opinion favorable n’est pas une raison de casser un contrat moral. 
 
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