Présidence de la République : L'organigramme et l'équipe
Carthage fait rêver plus d’un qui se bousculent ce 23 novembre à son portillon. Chacun s’y voit déjà, en «Grand Président». Mais tous risquent d’y découvrir, en fait, une modeste Présidence. Beaucoup plus emblématique par sa symbolique que forte en réalité de ses moyens. Les lieux sont mythiques, leur attractivité reste magique. Candidats à la présidence de la République, que savez-vous de cette institution ? Les nouvelles attributions sont certes précisées par la Constitution, mais le reste?
Les lieux, l’organisation, les services, le budget, les hommes et les femmes qui les font tourner au quotidien: tout est intéressant à découvrir. Quel est l’organigramme de la Présidence? Comment se compose actuellement le cabinet présidentiel?
Qui tient la maison? Que font les 3 019 salariés ? A quoi sert le budget de 83 millions de dinars? Quelles sont les institutions qui relèvent directement de la Présidence? A part le palais de Carthage, quelles sont les autres résidences présidentielles? Combien gagnent le chef de l’Etat en exercice et un ancien président ? Et en France et aux Etats-Unis? A combien s’élèvent les fonds secrets et comment sont-ils dépensés? Mais aussi bien d’autres questions. Une enquête dépouillée et un reportage photo exclusif. Un document exceptionnel à lire à la veille de l’élection présidentielle.
Le Super intendant
Sami Ben Amara
Conseiller principal, il a rang de ministre et garde la haute main sur toute l’intendance générale de la Présidence. Sami Ben Amara, docteur en génie des procédés (AgroParisTech, 2005) est également ingénieur en en industries alimentaires (ESIA, Tunis, 2000) et en génie frigorifique et climatique (IFFI / CNAM, Paris, 2007). Codirecteur de la campagne électorale de Moncef Marzouki en 2011, il se retrouve à Carthage. Il sera alors l’interface entre le cabinet et les différentes directions générales et unités administratives, financières et opérationnelles de la Présidence. De l’organisation des cérémonies, petites et grandes, des déplacements, en Tunisie ou à l’étranger, des visites officielles, accueil de grandes personnalités et opérations spéciales : c’est lui qui s’en occupe. De bout en bout, en étroite collaboration avec le protocole, la sécurité et les autres services concernés. Il part sur le terrain, à la tête de l’équipe des précurseurs, pour tout voir, tout prévoir, tout vérifier et tient la régie financière. De toute l’équipe arrivée avec Marzouki, il tient à être le plus discret possible, cherchant plutôt l’efficacité. Trop pris par les questions politiques, les deux directeurs successifs du cabinet présidentiel, Daimi et Manser, lui ont fait totale confiance, l’érigeant en sorte de secrétaire général. Se gardant des intrigues du Palais et s’attachant à entretenir de bonnes relations avec les services et les personnels, il a souvent sauvé les meubles. Des ratages, il en a eu, mais en a surtout beaucoup appris, dit-il.
Le conseiller Défense
Général de brigade Brahim Ouechtati
Bourguiba avait un aide de camp (ce qui est différent), Ben Ali ne voulait pas de militaire à sa proximité et Mebazaa n’a pas eu le temps de trancher. Prenant ses quartiers à Carthage, Moncef Marzouki supportait mal la cohabitation avec l’ancien ministre de la Défense sous Essebsi et Jebali, Abdelkérim Zebidi, et n’était pas à l’aise avec le général Rachid Ammar. Il décidera alors d’avoir un conseiller Défense et portera son choix sur un officier supérieur de l’aviation, Brahim Ouechtati, qu’il élèvera au grade de général de brigade. Pilote de chasse doué, Ouechtati, qui a longtemps dirigé la base d’El Aouina, a été notamment attaché militaire à Washington.
Le conseiller diplomatique
Slaheddine Salhi
Lui, au moins, connaît bien sa prochaine destination : il ne restera pas avec celui qui sera élu président de la République. Nommé ambassadeur de Tunisie à Doha, Slaheddine Salhi, diplomate de carrière, partira début janvier au Qatar prendre ses nouvelles fonctions. A la tête de la cellule diplomatique depuis 2013, il y a succédé à Riadh Essid, nommé par Mebazaa, puis désigné ambassadeur à Ottawa. Cette cellule, faisant partie des structures techniques du cabinet présidentiel, assure un lien important avec le ministère des Affaires étrangères. Depuis sa création, il y a plus d’une vingtaine d’années, elle a toujours été dirigée par un diplomate de carrière. Qui sera le prochain titulaire du poste? D’ici là, beaucoup d’eau coulera sous les ponts.
Le conseiller juridique
Ahmed Ouerfelli
Juriste chevronné, l’ancien secrétaire général de la Présidence, Slaheddine Cherif, exerçait la fonction de facto, sous Ben Ali. Mebazaa demandera à avoir un conseiller juridique qui coiffera toute une cellule dédiée. Ahmed Ouerfelli, magistrat, est alors détaché auprès de la Présidence dès le 15 mars 2011. Titulaire d’une maîtrise en droit des entreprises (1993) et d’un DEA en droit privé général (1995) et lauréat de l’Institut supérieur de la Magistrature (1995), il a commencé sa carrière judiciaire au Tribunal de première instance de Tunis (1995-1997) puis à la Cour d’appel de Tunis (1997-2000). Il a passé dix ans au Centre des études juridiques et judiciaires, où il s’occupait principalement du droit des affaires (sociétés, arbitrage, investissement, redressement des entreprises en difficulté, commerce des services…). Enseignant aux facultés de Droit et aux Instituts supérieurs de la magistrature et des avocats, il est l’auteur de huit ouvrages en droit fiscal, droit de l’arbitrage et droit des sociétés, et de près de cent articles publiés dans près de vingt pays.
La gouvernante générale
Madame Mahjoub
Elle joue un rôle essentiel dans la vie du Palais et de toutes les autres résidences présidentielles. Des menus de repas à la décoration florale, au nettoyage et à la propreté des lieux, à l’ordonnancement des salons, salles à manger, bureaux et chambres privées : tout relève de sa responsabilité. A la tête d’une escouade de maîtres d’hôtel, personnel de nettoyage, valets de chambre et autres agents, Mme Mahjoub tient la maison et veille à la bonne tenue générale. Diplômée de l’Institut supérieur du tourisme et spécialisée en gestion hôtelière, elle avait fait son apprentissage dans l’une des meilleures chaînes tunisiennes, Abou Nawas, en commençant à El Hamra et Diar El Andalous à El Kantoui.
Son raffinement, sa rigueur et sa discrétion la feront venir à Carthage pour occuper l’une des charges les plus délicates, sous Ben Ali et son épouse. Elle était là le 14 janvier 2011, à Sidi Dhrif, et elle sera là le 15 janvier 2011 et les jours suivants, toujours égale à elle-même, attentionnée au service de sa fonction. Elle accueillera Foued Mebazaa le premier jour de son arrivée, mais, lui, restera à l’Annexe, en haut de la colline, refusant de s’installer dans le bureau présidentiel. Elle fera découvrir à Marzouki le Palais et s’apprête, dans la continuité, à vivre l’issue du prochain scrutin. Toujours sans rien révéler de ses états d’âme.
Dossier établi par Taoufik Habaieb
Reportage photo de Mohamed Hammi
& Archives Présidence de la République
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