L'indignation sélective de Hamadi Jebali
Dans un post, l’ancien chef du gouvernement Hamadi Jebali se dit outré par les récentes déclarations de Béji Caïd Essebsi à une station de radio française. Qu’a dit BCE de si grave pour mériter l’indignation de notre ex chef de gouvernement ? Que ceux qui ont voté pour Marzouki étaient des islamistes, des salafistes jihadistes et les ligues de protection de la révolution. «Je ne peux garder le silence face à tels propos qui ne sont pas dignes d’un candidat à la présidence de la République, commente Jebali, parce qu’ils divisent la Tunisiens en démocrates d’une part, et en islamistes, salafistes et ligues de protection de la révolution, d'autre part». Pourtant, à aucun moment, les habitants des régions du sud n'ont été pointés du doigt, ni même cités.
C'est vrai que le débat politique vole bien bas. Mais à qui fallait-il s'en prendre en premier lieu ? A ceux qui ont donné le la aux attaques contre "le taghout" ou promis un bain de sang aux Tunisiens en cas de victoire de BCE ou à ceux qui y ont réagi en état de légitime défense ?
Jébali aurait été plus crédible s'il avait réagi aux appels de Marzouki à la haine et à son mépris pour ses adversaires politiques. Non seulement il ne l'a pas fait mais il appelle aujourd'hui à voter pour lui alors qu'il connait très bien son côté fantasque et imprévisible qui en fait un homme dangereux et en tout cas inapte à occuper un poste aussi important. A ce propos, je vous renvoie au portrait qu'a fait de lui sur notre site, Aziz Krichen, son ancien conseiller politique :
«Je ne veux pas accabler Moncef Marzouki. Force est néanmoins d’admettre que sa stratégie de campagne n’a été guidée que par un seul objectif : réactiver, à son bénéfice, les clivages idéologiques qui divisent les Tunisiens contre eux-mêmes. C’est-à-dire qu’il s’est inscrit d’emblée dans une pente qui va à contre-courant de l’évolution du pays et de la sauvegarde de sa jeune démocratie.
«Cette posture irresponsable est la sienne depuis les tristement fameuses déclarations faites au Qatar en mars 2013. Depuis, la dérive n’a fait qu’empirer, pour devenir proprement scandaleuse aujourd’hui. Peu lui importe qu’une telle politique ravive les tensions parmi la population, ni qu’elle fasse le lit de l’extrémisme et incite à la violence. Lui, en attend des retombées électorales et rien ne compte davantage à ses yeux.
Moyennant quoi, profitant du nombre élevé de candidats et de la dispersion des votes, Moncef Marzouki sera vraisemblablement présent au second tour. Encore plus vraisemblablement, il sera alors battu. Et quittera la scène par la petite porte. J’espère simplement pour lui, comme jugement final, quand les générations suivantes feront le bilan de notre époque troublée, qu’elles ne se souviendront que du courage dont il fit preuve lorsqu’il s’opposait à la dictature de Ben Ali, et qu’elles auront la charité, ou l’élégance, d’oublier tout le reste».
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