«Que sont les promesses de Deauville devenues !»
Maintenant que les cloches des urnes ont sonné que sont les promesses de Deauville devenues ! Il y a trois ans le G8 (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni, Russie) annonçait un plan d’aide, d’une ampleur sans précédent, en faveur des pays du «printemps arabe». Et ce pour assurer le succès de la « transition démocratique» en criant haut et fort que «la démocratie demeure le meilleur chemin vers la paix, la stabilité, la prospérité, une croissance partagée et le développement»
Le Fonds monétaire international s’est engagé à consacrer 80 milliards de dollars.
Plus d’un demi-siècle avant le plan Marshall américain a consacré 13 milliards de dollars soit près de 90 milliards d’euros actuels pour la reconstruction de l’Europe au lendemain de la seconde guerre mondiale. Ce qui a permis une croissance économique durable et une consolidation des démocraties occidentales.
A la différence des promesses du partenariat de Deauville, le plan Marshall a appelé les Européens à se rencontrer afin de mettre en place leur propre projet de reconstruction, que les Etats-Unis s’engageaient ensuite à financer. En effet l’aide financière promise aux pays du « printemps arabe » est conditionnée à la mise en œuvre de «réformes» spécifiques et liée, le plus souvent, à l’achat de biens et de services en provenance des pays donateurs.
On s’écarte ainsi des principes du plan Marshall qui a permis à la classe politique, issue des élections de l’après-guerre, d’échafauder leurs projets de développement.
Le gouvernement élu devra veiller à ce que les projets de développement reflètent:
- Des institutions politiques et économiques fondées sur l’inclusion.
- Une citoyenneté sociale qui unit tous ceux qui contribuent à la solidarité nationale par leurs impôts et cotisations et bénéficient de celle-ci en tant qu’assurés sociaux et usagers des services publics.
- Coordonner et soutenir de nouvelles solidarités (le volontariat géré par des organismes à but non lucratif, comme les associations, les syndicats ou les mutuelles —, sans oublier les solidarités familiales).
Nos projets de développement ne peuvent être, en aucun cas, ni préconisé ni imposé par les bailleurs de fonds.
La Tunisie a hérité d’un lourd passif. Ses institutions politiques et économiques étaient entre les mains d’oligarchies soucieuses de s’enrichir aux dépens de leurs populations. Une part non négligeable de la dette qui grève lourdement nos budgets pourrait être jugée «odieuse» et illégitime. En effet une dette contractée par un pouvoir despotique «voyou» en vue d’asseoir son régime et de réprimer la population est une dette de régime sinon une dette personnelle du pouvoir qui l’a contracté. Avec la chute du pouvoir elle est nulle et non avenue.
Les Etats qui ont réussi leur « transition» devraient rendre des comptes aux électeurs et non aux bailleurs des fonds étrangers comme ce fut le cas avant les révoltes arabes. Les rapports du FMI et de la Banque mondiale présentaient les régimes de Ben Ali et Moubarak comme des réussites éclatantes. Les organismes internationaux misaient, alors, sur la continuité. Les peuples du «printemps arabe», quant à eux, réclamaient le changement.
Il est bon de rappeler que les solidarités nées dans l’action du «printemps arabe» ou les solidarités d’exclusion nées des « chimères » des identités religieuses, ethniques ou tribales ont, aussi, pour origine les tensions et les inégalités engendrées par la mondialisation.
Aujourd’hui, on est en droit d’exiger une aide d’urgence, ni conditionnelle ni liée pour compenser la fuite des capitaux, la baisse du tourisme et des investissements étrangers…
Une assistance internationale, disons-le, afin de désenclaver l’intérieur du pays et d’éviter à la Tunisie le cercle vicieux de la pauvreté avec son lot de chômage et d’exclusion à l’origine, pour beaucoup, du populisme et de l’extrémisme.
Ainsi un message d’espoir sera adressé aux jeunes pour calmer leur impatience à même de balayer les élites kroumir et corrompues et pour barrer la route aux contre-révolutionnaires, toujours, aux aguets.
Maintenant que les cloches des urnes ont sonné on est en droit d’exiger de nos dirigeants élus de nous éclairer sur la suite à donner aux promesses des responsables du partenariat de Deauville et de négocier au mieux (changement dans la continuité) les conditions et le reliquat !
B.B.G.