News - 06.12.2014

Entente nationale et cohabitation responsable

Les Tunisiens devront encore attendre des semaines avant de connaître leur président pour les cinq années à venir. Leur espoir est grand de mettre fin au provisoire qui n’a que trop duré et durement sévi. Ils ne seront pas, pour autant, au bout de leurs peines, puisqu’ils auront à patienter quelques mois de plus, pour voir le futur gouvernement formé et s’atteler à la tâche, et l’entente se construire : autant de priorités urgentes.

Point de répit, les revoilà reprendre une fois de plus le chemin des bureaux de vote pour élire leurs conseils municipaux. Jusqu’au premier semestre 2015, la Tunisie vivra donc dans l’effervescence des candidats en lice face à des électeurs, épuisés par tant de campagnes, tant de votes successifs en si peu de temps.

En réactivant les clivages idéologiques, Moncef Marzouki, soutenu par les bases d’Ennahdha et des extrémistes de droite et de gauche, a attisé la confrontation avec le camp démocratique et accentué la bipolarisation. La Tunisie s’est trouvée divisée en deux, au moins, lorsque d’autres n’ont pas essayé d’en dépecer des parts pour eux. Hissé en ballottage au second tour face à Béji Caïd Essebsi, Marzouki persistera sans doute dans le même discours et s’accrochera de toutes ses forces pour garder Carthage.

De son côté, la coalition qui se forme autour de BCE s’élancera de toutes ses énergies pour endiguer le flot et barrer la route à Marzouki. La campagne électorale s’annonce plus agressive, dans les discours et sur le terrain. Jusqu’au bout! Déjà le premier tour avait laissé de profondes séquelles. Livrant d’âpres batailles, les 27 candidats—même si cinq parmi eux se sont désistés en cours de route—ont rivalisé en nombre de parrainages obtenus, puis lors de la campagne, de dénonciations, remises en cause et surenchères de promesses.

S’acharnant contre tout et tous, investissant les rues et envahissant les médias, ils nous ont assurés, avec autosuffisance et arrogance, qu’ils étaient les meilleurs et allaient, sans le moindre doute, l’emporter. L’argent occulte a coulé à flots et rien n’a été épargné. La sanction est vite tombée: malgré les sommes d’argent dépensées et les moyens utilisés, le nombre de voix recueillies par la plupart, nettement inférieur aux parrainages, s’est avéré à l’extrême opposé de leur ambition personnelle démesurée. Les Tunisiens n’ont pas été dupes: même divisés, ils ont su à qui faire confiance, quitte à passer par la grande lessiveuse des figures historiques. Mais, les stigmates restent profonds dans l’opinion publique, lassée, éprise de stabilité, d’entente et de responsabilité.

Les enjeux sont déterminants. La nouvelle Chambre des représentants du peuple prend ses fonctions dans des conditions historiques. Un tunnel d’urgences en projets de loi, à commencer par celui du budget de l’Etat pour l’année 2015, l’attend, mais aussi l’investiture du nouveau gouvernement. La composition de son bureau et de ses commissions et l’adoption de son règlement intérieur viendront en préalable, avec tous les accords à convenir. Arrivé en tête, sans être majoritaire, Nidaa Tounès aura aussi à trancher quant aux alliances à sceller et au mode du gouverner ensemble. Quelle part y prendra Ennahdha? Quelle place réserver au Front populaire de Hamma Hammami et à l’UPL de Slim Riahi? Débats en interne, tractations et concertations s’intensifient. Béji Caïd Essebsi est conscient de deux impératifs : entente et cohabitation. Reconstruire la cohésion des Tunisiens sur la base d’une réelle entente nationale, réussir une cohabitation responsable sans tension et une action gouvernementale sans anicroche.

 A lui de trouver, avec ses divers interlocuteurs, la formule qui fonctionne. C’est ce que demandent les Tunisiens pour amortir les difficultés qui nous attendent encore et amorcer la relance.

T.H.
 

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