Béji Caid Essebsi, Une majorité présidentielle en marche
Béji, l’a bien dit : «je ne suis pas le candidat exclusif d’un parti, je suis le candidat de larges franges du peuple tunisien».
Cette majorité présidentielle en construction tend à prendre forme et s’affirmer vigoureusement au cours de cette seconde partie de la campagne. Elle est d’abord politique, ensuite elle se traduira en majorité numérique.
Cette majorité politique trouve son fondement dans le verdict populaire lors des législatives. En effet, sur la question fondamentale, celle du modèle d’Etat et de société, les tunisiens ont nettement tranché; les deux tiers de l’électorat se sont prononcés ouvertement pour un projet d’état et de société tel qu’il a été revendiqué et défendu par une majorité de tunisiens qui ont désavoué la dérive islamo-autoritaire des trois dernières années.
Même si Nida Tounes constitue le bloc central de ce large éventail avec près de 38% des suffrages, il faudrait aussi inclure tous ceux qui ont voté pour des listes dont les programmes et orientations étaient complémentaires de celui de Nidaa sur des questions fondamentales.
L’électeur tunisien a donc nettement désigné ses choix et ses rejets
Aujourd’hui, la nette avance du candidat de l’alternative démocratique et civile peut s’affirmer en un élan national de salut public.
Les leviers de cette majorité politique se trouvent aussi bien dans la société politique que celle civile même.
La convergence entre société civile et société politique a permis de redresser la situation pour un temps; nourrie et encouragée par la colère populaire, cette résistance a désormais ses dates historiques depuis la célèbre démonstration des tunisiennes en août 2012, jusqu’aux manifestations populaires du Bardo, sans oublier la résistance héroïque de toute une population meurtrie à Siliana.
La défense des acquis, dont celui de l’Etat National même a constitué le socle solide des résistances et de projets de restauration nécessaire.
Ce projet est plus que jamais actuel et rassemble les Tunisiennes et Tunisiens dans la diversité de leurs opinions et appartenances.
Mais les défis et enjeux dépassent, et de loin, la simple défense des acquis, aussi historiques soient-ils. La Tunisie est aussi à la recherche de son avenir, et ces élections constituent un enjeu de pédagogie populaire pour les constructions d’avenir.
Concrétiser les convergences objectives entre les faisceaux du large spectre suppose un effort et des engagements clairs.
Plusieurs voix se sont déjà exprimées ouvertement en faveur de cette convergence : Afek Tounes, mais aussi plusieurs parmi les candidats du premier tour, mais aussi des composantes de l’UPT dont al-Massar quoique affaibli par ses propres choix électoraux.
Si la tâche s’est avérée par ailleurs aisée avec un partenaire aussi pragmatique que l’UPL, parti récemment constitué et fondée sur le rêve de réussite d’une jeunesse aux abois, la question s'est révélée plus complexe avec un partenaire aussi capricieux que volontariste comme le Font populaire auréolé d’une montée fulgurante de son leader Hamma Hammami.
La divergence sur les programmes sociaux paraît être le principal obstacle à un ralliement du Front au candidat de l’alternative. Faux ou vrai problème, la question est bien réelle et risque de rendre timides, les voix courageuses qui s’élèvent du sein même du front en faveur de BCE.
Du social, encore du social, et Béji vaincra
Un programme présidentiel d’avenir et rassembleur doit nécessairement affronter les défis sociaux, comme ceux sociétaux.
Si la question sociale ne doit faire l’objet d’aucune surenchère, elle constitue néanmoins une urgence nationale. Un élan de solidarité doit nécessairement accompagner les politiques du prochain gouvernement. Arrêter la montée infernale des prix à la consommation, lutter contre la corruption, proposer des programmes concrets de développement solidaire pour les régions en proie au chômage et à la misère, donner de l’espoir à la jeunesse. En voilà une dimension qui complète le projet de reconstruction a venir. Justice sociale, justice fiscale, justice régionale, en voilà des mots d’ordre qui comptent aujourd’hui.
Même si la « prime de chômage » défendue par le FP, constitue une proposition insoutenable dans le contexte actuel, pourquoi ne pas réactiver des propositions symboliques et concrètes comme le rétablissement pour une duré limitée de la « prime Amal » en faveur des jeunes chômeurs diplômés et dont le nom est associée à BCE, prime qui fut simplement abolie par les gouvernement de la troïka.
Le réformisme en action
L’idéal réformiste, valeur centrale du projet présidentiel de BCE, ne peut prendre toute sa vigueur aujourd’hui que s’il est nourri par un lot de réformes nécessaires à l’Etat comme à la société.
Ce besoin de réformes est là, sensible à tous les niveaux. Réformer l’administration en la décentralisant, et en cela nous seront fidèles à l’esprit et à la lettre de notre nouvelle constitution. Donner aux régions les moyens de gérer leurs ressources naturelles et culturelles par le biais de leurs conseils élus, réformer l’école en ouvrant un débat national avec tous les acteurs, construire un projet culturel d’avenir ; en voilà des engagements consistants pour un candidat qui aura les moyens des ses promesses parce que appelé à gouverner déjà par la volonté des urnes.
Le candidat adverse, il faudra tout simplement l’ignorer parce que les affrontements sur son terrain sont tout simplement inutiles, sinon néfastes. Faudrait-il juste rappeler au gens qu’il n’aura même pas les moyens de tenir ses promesses parce qu’il n’est pas appelé à gouverner.
Les fondements de la convergence démocratique sont là, les activer sur le terrain avec clairvoyance et détermination, cela les traduirait en une majorité présidentielle en marche.
Abdelhamid Larguèche