Blogs - 08.01.2010

Le mécénat culturel, expression de l'engagement citoyen

On connait la Fondation Getty, la Fondation Carnegie aux Etats Unis, la Fondation Pinault en France. Créées par des milliardaires américains et français, elles sont dédiées toutes les trois au mécénat, notamment culturel. Disposant de moyens énormes, ces fondations jouent un grand rôle  dans la préservation du patrimoine culturel américain, français et même mondial. A titre d’exemple, l’une des opérations les plus spectaculaires de sauvetage d’un monument historique (le très célèbre temple d’Abou Simbel en Egypte qui risquait d'être englouti par les eaux du Nil suite à la construction du barrage d'Assouan dans les années 62-65) a été rendue possible en grande partie grâce à des dons de mécènes américains. Un autre monument non moins connu, en l’occurrence le château de Versailles, a été restauré grâce aux fonds des mécènes français et étrangers.

Récemment, le milliardaire français, François Pinault a choisi Vénise pour abriter ses collections d’art  contemporain. Encore s’agit-il de la partie visible de l’iceberg. Car l’engagement citoyen dans ces pays n’est pas l’apanage des milliardaires mais constitue la chose la mieux partagée. Sait-on que les sommes consacrées au mécénat aux Etats Unis, pays, il est vrai, le plus développé dans le monde dans ce domaine, représente 2% du PIB, soit une bonne dizaine de milliards de dollars fournies en grande partie par des particuliers.

Emergence d'une culture de mécénat

On n'en est pas encore là en Tunisie, mais les mentalités évoluent à la rapidité de l'éclair comme nous en ont habitués les Tunisiens. S’il est prématuré de parler de l'émergence d'une culture de mécénat, on observe depuis quelques années un intérêt de plus en plus marqué pour des activités qui y sont liées, témoin de l’engagement citoyen d’un nombre croissant de nos compatriotes. Le Fonds de Solidarité Nationale en est, d'ailleurs, l'expression la plus éclatante. S'agissant du mécénat culturel, objet de notre propos ici, cela a commencé avec les institutionnels (question de moyens) avec la restauration de certains monuments comme Bab Bhar à Tunis au début des années 70 puis par l'institution du prix littéraire Aboulkacem Chabbi par une banque de la place, très vite relayée par d'autres institutions financières et  des entreprises qui ont compris que le mécénat et son avatar moderne, le parrainage ou sponsoring peut leur être profitable non pas en termes de rentrées d'argent mais d'image.

Résultat: Il est, aujourd'hui, de bon ton pour une institution quelle que soit son activité d'investir et de s'investir dans la culture. C'est une façon pour elle de mieux s'insérer dans son environnement, de participer à la vie de la cité.

Nouveaux domaines de prédilection: la restauration des vieilles demeures patriciennes de la médina qui menaçaient ruine quitte à les reconvertir en hôtels de charme ou en espaces culturels et la sponsorisation des jeunes artistes doués prouvant ainsi qu'elle est une véritable entreprise citoyenne. Et puis, à bien y réfléchir, comme les préoccupations matérielles ne sont pas totalement absentes, il s'agit d'un véritable partenariat gagnant-gagnant où toutes les parties trouvent leur compte.   

La capacité d'adaptation du Tunisien


Les particuliers ne sont pas en reste. Prenons l'exemple des dons d'ouvrages. On sait que les familles savantes, les intellectuels et même certains collectionneurs dans notre pays possèdent de riches bibliothèques contenant souvent des livres d'une valeur inestimable. Quelques uns, à court d'argent, ont choisi de les vendre y compris à des collectionneurs étrangers. Mais la plupart les gardaient jalousement à l'abri des regards y compris ceux des chercheurs, ne sachant pas trop quoi en faire, ni ce qu'elles contenaient exactement, d'autant plus que les thèmes traités ne sont pas généralement à la portée du commun des mortels.

Grâce à quelques pionniers qui ont eu l'audace de briser ce tabou et  parfois aussi, malheureusement, à cause du manque de disposition des  descendants pour les études ou tout simplement pour la lecture, les donateurs se bousculent aujourd'hui aux portillons des bibliothèques et des universités au point que certaines d'entre elles s'en trouvant débordés, font la fine bouche allant même jusqu'à refuser certains dons. Une belle manifestation de civisme de la part de nos compatriotes. Le développement d'un pays se mesure aussi à l'aune du degré d'implication de ses habitants dans des activités comme la vie associative ou le mécénat.

 

Hèdi