2e tour : quelles sont les chances des deux candidats ?

Dans cet article, je fournis mes prévisions pour le deuxième tour des élections présidentielles. À l'issue du premier tour, M. Béji Caied Essebsi(BCE) est arrivé en tête avec 39% des voix suivi par Moncef Marzouki(MM) avec 33% des voix. L'écart entre les deux candidats a surpris les analystes qui s'attendaient à une victoire plus nette de BCE.

Le premier tour des présidentielles a confirmé la nouvelle carte électorale tunisienne avec un clivage très net entre le nord favorable à Nida, alors qu'au sud, Marzouki cartonne. Les résultats des présidentielles sont à cet égard  similaires à ceux des législatives si l'on compare l'écart des pourcentages de vote entre NidaaTounes et Ennadha.

Mes prédictions pour le deuxième tour

Dans cet article, je simule trois scénarios:

1- Même niveau de participation parmi tous électeurs, incluant ceux qui n'ont pas voté BCE ou MM au premier tour.
2- Une participation réduite à 60% ou 70% parmi les électeurs  qui n'ont pas voté BCE ou MM au premier tour. La participation de ceux qui ont voté BCE ou MM au premier tour reste la même.
3- Une participation réduite à 60% ou 70% parmi les électeurs  qui n'ont pas voté BCE ou MM au premier tour. La participation de ceux qui ont voté BCE premier tour reste la même. Une plus forte mobilisation des électeurs de MM.

La méthodologie de l'analyse est très simple et se résume à compter les résultats du premier tour par candidat et à formuler des hypothèses sur le taux de participation des électeurs et la répartition de leurs votes pour le deuxième tour. A titre d'exemple, j'ai supposé que BCE récupèrerait 70% des électeurs qui ont voté Hamma Hammami et que leur taux de participation s'élèverait à 60% au deuxième tour dans le deuxième scénario.

Les résultats de la simulation sont les suivants:

Donc, selon les trois scénarios BCE remporterait le deuxième tour avec 52% à 56% des voix.

Les facteurs impondérables

• Un taux de  participation plus élevé dans le sud et dans les régions intérieures favorise Moncef Marzouki: Au cours du premier tour, les régions intérieures, qui ont voté majoritairement en faveur de MM, ont enregistré un moindre taux de participation que le reste du pays. Ceci fournit à MM une source additionnelle de voix en supposant qu'il réussisse à mobiliser en masse ces électeurs.

• L'absenteisme: bien que BCE ait une marge de presque 200,000 voix d'avance à l'issue du premier tour, un fort taux d'absentéisme parmi les électeurs pro-BCE et une forte mobilisation dans le camp pro-Marzouki pourrait réduire cet écart considérablement.
• Le pacte possible Nidaa-Ennahdha: selon les sondages à la sortie des urnes de Sigma conseil, 70% de ceux qui ont voté pour MM auraient voté Ennahdha lors des législatives. Il est donc envisageable en cas d'accord sur une possible coalition ou cohabitation entre Nidaa et Ennahdha que cette dernière ne le soutienne pas au deuxième tour.

 Moncef Marzouki peut-il rattraper BCE?

D'un point de vue arithmétique, la donne parait difficile pour MM. A l'issue du premier tour, il accuse un retard de presque 200.000 voix sur BCE. Pour combler le gap, MM doit:

1- Ne pas accuser de recul additionnel à cause des électeurs qui ont choisi d'autres alternatives au premier tour et ont décidé de ne pas voter utile. Ceci parait difficile si l'on considère par exemple que ceux qui ont voté pour Mondher Zenaidi (24.000 voix) et Kamel Morjane (42.000) vont probablement choisir BCE au deuxième tour. 
2- Accroitre le taux de participation dans les circonscriptions pro-Marzouki (c'est-à-dire celles où MM a gagné plus de voix lors du premier tour). Dans les circonscriptions favorables a BCE au premier tour, le taux de participation a été de 66% comparé à 61% dans les circonscriptions pro-Marzouki. En termes de pourcentages, MM a obtenu 46% des voix dans ces régions comparées à 26% des voix pour BCE.
Ainsi, si l'on suppose que les indécis sont repartis de façon entre BCE et MM et que MM n'accuse pas de retard additionnel par rapport aux 200.000 voix initiales, il faudrait que le taux de participation atteigne les 90% dans les circonscriptions pro-Marzouki et qu'il remporte ces régions par une marge de 40%. Ceci est mathématiquement possible mais parait  peu plausible.

Moez Hababou
PhD