Un précurseur du dialogue national qu'il appelle à restructurer
Rappelé aux Affaires sociales dès le déclenchement de la révolution, Mohamed Ennaceur plaidera, le 27 mai 2011, devant de la Haute Instance pour la réalisation des objectifs de la Révolution, présidée par Yadh Ben Achour, en faveur d’un dialogue national. «Le niveau de frustration et de contestation violente qui caractérisait cette première phase de la Révolution, dira-t-il, traduisait le ras-le-bol de la population, l’échec de l’Etat dans son rôle régulateur, et la remise en cause du contrat social, source de la puissance de l’Etat et de sa capacité de faire respecter la loi».
Déjà, il avait appelé à ce qu’un dialogue soit engagé au sein de cette Haute Instance «à l’effet d’aboutir à l’élaboration d’un consensus national sur les choix politiques, économiques, sociaux culturels et géostratégiques qui constitueraient le socle du projet de société que nous souhaitions pour notre pays. Un consensus national qui permettrait de reconstituer et de renouveler le contrat social liant l’ensemble des Tunisiens entre eux et à l’Etat garant de l’intérêt général et de la cohésion nationale».
Les politiques ne lui avaient prêté qu’une oreille respectueuse, tant ils étaient obnibulés par les élections de la Constituante. Sans lâcher prise, Mohamed Ennaceur attendra le verdict des urnes et l’installation des nouveaux pouvoirs pour revenir à la charge. Avec une dizaine de personnalités venant d’horizons divers (dont Yadh Ben Achour, Slaheddine Jourchi, Kamal Jendoubi, Mokhtar Trifi et Hela Abdeljaouad,), il lancera le 24 mai 2012 une initiative intitulée : «Forum national de dialogue pour une transition démocratique réussie».
Au forceps, un dialogue national finira par s’imposer sous la pression de la société civile, après l’assassinat de Belaïd et Brahmi, à l’initiative du Quartet. S’il salue ses grands mérites qui ont épargné à la Tunisie une crise des plus graves aux issues les plus incertaines, Mohamed Ennaceur estime qu’il s’agit à présent de l’enrichir, de l’élargir et de l’institutionnaliser. «L’enrichir, dit-il, c’est y intégrer l’ensemble des préoccupations des Tunisiens, déterminer les moyens d’améliorer leur bien-être, de stimuler l’activité économique et le progrès social, de préserver les droits des jeunes générations. Il devra favoriser l’organisation d’un débat approfondi sur les grands enjeux, notamment l’emploi, l’investissement, l’enseignement, la formation professionnelle, la santé, le développement régional, la fiscalité, le développement durable et les engagements géostratégiques de la Tunisie»
«L’élargir, poursuit-il, c’est y associer autant les acteurs politiques que les acteurs économiques et sociaux, les chefs de groupes parlementaires, les composantes de la société civile, les compétences nationales, des compétences administratives des ministères concernés, de l’Université et du secteur privé. L’institutionnaliser, c’est lui donner une assise légale, lui conférer un statut d’institution permanente dotée des prérogatives et des moyens adéquats, une institution appelée à jouer son rôle consultatif et à représenter un élément constitutif de la démocratie participative». Sa conviction est faite : «Aujourd’hui et demain, le dialogue est et sera, plus que jamais, nécessaire ! Il implique au préalable le respect de la diversité, l’acceptation de la différence, le souci d’aboutir au consensus, et de trouver des solutions communes à nos problèmes communs».