Mustapha Tlili : Syrie : les masques sont tombés, la reprise des négociations est urgente (II)
L’annonce par John Kerry de la nécessité de renouer le dialogue avec le régime de Bachar Al Assad en Syrie vient réconforter Mustapha Tlili. La décision américaine le confirme dans la position qu’il n’a cessé de réitérer, soulignant la complexité de la structure même de l’Etat et de la société en Syrie et l’imbrication des liens du régime en place. « Des erreurs de jugement, d’un côté, et les mégalomanies, de l’autre, déclare-t-il dans une interview à Leaders, aboutissent au désastre actuel qui a fait 220 000 victimes et exilé plus de 4 millions de personnes, soit le 1/5 de la population syrienne. C’est à ceux qui avaient pris il y a quatre ans cette décision de se rattraper aujourd’hui. Ce que vient de faire le secrétaire d’Etat américain aux Affaires étrangères, John Kerry demande du courage et cela manque ailleurs. Je pense particulièrement au président turc Erdogan, et aux dirigeants d’autres pays dans le Golfe qui doivent se reprendre et sauver l’ensemble de la région ».
« Les grands risques pour tous, poursuit Tlili, c’est la destruction d’une société qui ne reviendra jamais. Avec l’Egypte, la Syrie a toujours été le cœur de la nation arabe. Avant d’être sunnites ou chiites ou autres, les Syriens sont d’abord, Syriens. Cette idée de la Syrie, une fois détruite, c’est tout l’héritage qui s’évapore. Daech est la grande menace, beaucoup plus grave qu’on peut penser du régime d’Al Assad. Si on ne l’arrête pas, elle risque de gagner l’ensemble de la région, mais aussi l’Europe et les Etats-Unis. »
Comment voit-il la suite ? « Il faudrait revenir aux négociations de Genève et les reprendre là où elles étaient en suspens. L’Onu peut rejouer son rôle étant donné cette ouverture venue de la part des Etats-Unis.
Nous savons tous que se les Etats-Unis ne sont pas clairement dans la boucle des négociations, rien de concret ne pourrait se faire. Finalement, on revient au point de vue russe. J’étais récemment à Moscou et j’ai pu m’en rendre compte. La proximité de la Russie et sa connaissance de la Syrie et du reste de la région est très importante. Elles lui sont utiles dans la prise de décision.
Aujourd’hui, déclare Tlili, les masques sont tombés. Il n’y a plus de raison de continuer à jeter l’anathème sur Bachar Al Assad et son régime. Même s’il donne l’impression de refuser la proposition américaine, comme il peut en avoir le luxe actuellement, il finira par l’accepter. C’est un simple jeu psychologique. Il reconnaîtra la réalité et se mettra à la table des négociations.
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