Hichem Azafzaf: Une vie pour les oiseaux
Au deuxième étage de cet immeuble du centre-ville de l’Ariana, de petits bureaux vous réservent une agréable surprise. Une équipe réduite de passionnés assure une grande mission dans la discrétion et l’efficacité. C’est ici qu’est niché le siège de l’Association «Les Amis des Oiseaux».
Fondée en mai 1975 par Habib Bourguiba Jr qui était resté à sa tête jusqu’en 1989, elle lui doit beaucoup, comme à son successeur et cofondateur, le Pr Ali Hili, ancien doyen de la faculté des Sciences de Tunis, décédé en 2013. La relève est assurée par les jeunes qu’ils ont formés et au premier rang, on trouve Mourad Amari qui fut son président de 2007 à 2011 et son actuel président Hichem Azafzaf (50 ans), son épouse Claudia et nombre de jeunes. Ambiance studieuse, mais loin de tout stress.
Féru de nature et amoureux des sciences, Hichem, alors jeune technicien en électricité à la Steg, était attiré par l’Association Jeunes Sciences qui avait son siège dans les locaux de l’ancienne Foire de Tunis, avenue Mohamed-V. Le lac de Tunis n’était pas alors aménagé et il suffisait de traverser la voie pour aller admirer les flamants roses et les oiseaux qui avaient élu domicile sur les berges et survolaient le lac. La passion est née pour s’intensifier d’année en année.
Pour Hichem, ce sera sa vie, sa mission, son combat, sa raison d’être. Du reste, il fera la connaissance de son épouse lors d’un camp d’observation d’oiseaux migrateurs. Participant à un programme d’échange entre la Tunisie et l’Allemagne, elle était venue à Haouaria en 1990. Le coup de foudre fut total : Hichem ira en Allemagne, puis se mariera en 1994.Claudia partage depuis lors sa vie et sa passion. Son apport est précieux.
Sur tous les fronts
L’Association les Amis des Oiseaux vit modestement, mais agit utilement. Elle compte près de 400 adhérents, s’appuie sur des sections actives au Cap Bon, Sfax et Gabès et ne bénéficie que de maigres subventions dont 3 000 D provenant du ministère de l’Agriculture. Pour mener à bien ses actions, elle ne peut compter alors que sur elle-même en se chargeant d’exécuter des projets grâce au soutien d’ONG amies et bailleurs de fonds. Les effectifs opérationnels, réduits au minimum, se composent d’un directeur exécutif et de trois permanents dont un est basé à Haouaria. Pourtant, sa mission est très large : améliorer l’état de connaissance de certaines espèces, déployer un réseau d’observateurs à travers le pays, lutter contre le braconnage, la capture et la détention illégale d’oiseaux, récupérer des oiseaux, les soigner et les remettre en liberté et conduire des études sur le terrain...
Combien d’aigles et de vautours sauvés et libérés, combien de braconniers dénoncés et combien de crimes contre l’avifaune évités ? Le palmarès de l’AAO est éloquent. Il s’enrichit également
par les travaux d’identification des oiseaux, de recensement, de baguage, de compilation et d’analyse de données, de mise à jour des bases de données, de cartographie de populations avifaunes, d’élaboration de plans d’action et de projets de conservation et autres programmes.
Au cœur du dispositif, Hichem Azafzaf est sur tous les fronts. Il assure la liaison avec les organismes tunisiens concernés, mais aussi arabes, africains et internationaux, publie des articles indexés dans des revues spécialisées, coécrit des ouvrages rapidement devenus des références, dirige des missions d’observation et d’identification en Libye et anime tant de réseaux. La grande passion devient érudition en la matière. Son dévouement est total à cette noble cause d’observer et de protéger les oiseaux, ce qui lui vaut une grande reconnaissance internationale.