L'engrenage du terrorisme : Au-delà des palabres, l'urgence de solutions
Omniprésent dans toutes les «unes» de la presse et alimentant toutes les discussions,le terrorisme ne cesse de mobiliser l'attention d'une opinion publique inquiète.
Face à l'horreur, la société tremble d'effroi alors que les experts, autoproclamés, se perdent en conjectures soit à la télé soit dans dans les différentes tribunes. Cela a donné des heures de débats, une multitude de caméras, d'intervenants, de buffets, de budgets... pour quelques recommandations que personne ne lit in fine. Il n'y a que les hôtels qui sont contents, eux qui font leurs chiffres d'affaires grâce à ces bienvenus, colloques, assises et autres séminaires.
Jamais thème n'a été aussi décortiqué que celui du terrorisme.
Tout cela en berçant l'opinion publique d'illusions d'éradication prochaine du phénomène toujours en usant et abusant du jocker "Inchallah" avec lequel on est souvent à l'aise avec le futur.
Hélas! Le mal est plus profond qu'on ne le pensait, il est très et même trop profond. Notre pays est victime d'une pathologie qui n'a pas été diagnostiquée à temps. Prise en charge plus tôt elle aurait pu être contenue et sans doute soignée. D'autant plus que la géopolitique n'a pas aidé notre pays. A l'est ,la Libye totalement déstabilisée, en proie à une guerre civile, convoitée et malmenée par les troupes de Daech. Son Sud-ouest constitue un marché d'armes à ciel ouvert totalement hors contrôle avec toutes les conséquences pour la Tunisie, alors que dans grand Sud, Un Sahel bouillonnant, truffé de groupes terroristes de diverses allégeances. Dans le reste du monde arabe, la Syrie est embourbée dans sa guerre civile, l'Irak est devenue otage de Daech, le Yémen, sur le point d'être détruit par l'aviation de pays, principalement arabes, coalisés autour de L'Arabie Saoudite.
Bref, le pire des scénarios, celui qu'on n'aurait jamais imaginé il y a quelques années.
Cette situation place la Tunisie au cœur d'une configuration géostratégique et sécuritaire des plus problématiques.
C'est pourquoi, plus personne, aujourd'hui, ne conteste la nécessité d'élaborer une réponse ferme et équilibrée à la recrudescence des actes terroristes. L'urgence est de se pencher sur les solutions pratiques et innovantes, en mesure de faire sortir le pays des sentiers battus.
Mais " Un problème ne peut être résolu en réfléchissant de la même manière qu'il a été créé " disait Einstein. Nos dirigeants semblent faire fi de cet adage.
Loin de moi l'idée de donner des solutions - recettes (clé-en-main) pour dénouer le nœud gordien de ce fléau, bien que je me suis déjà prononcé à plusieurs reprises sur le dossier mais les responsables civils et militaires n'ont pas vu le bien-fondé de mes analyses antérieures, pourtant elles ont largement prouvé leur pertinence.
Je demeure, néanmoins, convaincu que l'heure n'est plus aux ajustements conjecturels ou aux petites retouches opérées ici ou là et qui relèvent, par certaines de leurs saillies, du pur bricolage. L'heure est aux vrais changements de notre système de défense nationale et de la gouvernance qui le sous- tend.
Face aux périls " ce n'est pas le plus fort qui survit, ni le plus intelligent, mais le plus réceptif au changement " Cette remarque de Charles Darwin prend toute sa pertinence dans le contexte actuel. Et là, je ne parle ni de stratégie (terme vidé de tout son sens originel) ni de doctrine et encore moins d'idéologie, je veux être plus terre à terre.
- Afin de faire face aux menaces qui nous guettent, je plaide pour l'élaboration d'un véritable " PLAN OPÉRATIONNEL ANTI - CRISE " commun à toutes les composantes du système de sécurité , orienté plutôt vers l'offensive et alliant d'une façon pragmatique la tactique opérationnelle, la coopération interarmes et interarmées, le combat en milieu urbain, la guérilla, l'organisation du terrain, l'emploi des ruses de guerre...etc
- Ce plan devra être basé sur un DIAGNOSTIC précis des menaces et une appréciation sécuritaire minutieusement élaborée et ciblée sur le terrorisme en général, ses branches armées en activité ou dormantes, ses ramifications logistiques et idéologiques,ses sources de financement, ses filières de recrutement et d'enrôlement, ses relais hors frontières...
Ainsi que la cybercriminalité liée au terrorisme.
Qui s'en chargera?
A mon humble avis, il est opportun de créer un ÉTAT-MAJOR ad hoc groupant des éléments provenant des différents commandements sécuritaires et militaires.
Évidemment, ce plan devra être conçu en commun accord, car comme disait le prospectiviste français Gaston Berger: "Un mauvais plan où tout le monde participe réussit mieux qu'un plan bien fait où tout le monde est exclu ". Il sera affiné au fur et à mesure de son exécution.
- D'autre part ,on devrait envisager la création de nouveaux mécanismes et organes adaptés aux défis sécuritaires actuels.On constate que l'Armée, particulier, continue à fonctionner selon le schéma classique avec les moyens habituels alors qu'elle mène des opérations de guerre asymétrique qui impliquent une transformation structurelle profonde.
L'attaque du musée du Bardo étant la meilleure illustration de cette forme de guerre subversive, son objectif premier est de frapper les opinions nationale et internationale.
Tout le monde sait, par ailleurs, que le terrorisme semble utiliser la théorie de "l'héliocentrisme ": Il se place au centre de tout mouvement et aspire par la loi de la gravité tout ce qui l'entoure ou est dans son champs de vision. Autrement dit, le terrorisme allume avec quelques hommes armés un foyer quelque part dans une contrée affaiblie ,commet un acte spectaculaire puis attend la réaction du reste du monde qui se précipite dans la dite contrée. Il multiplie ainsi les actions très vite relayées par les médias du monde entier. Le terrorisme réussit ainsi à avoir d'excellents " public relations"qui sont les médias lourds, occidentaux particulièrement, sans qu'il débourse un seul millime.
Pour revenir à l'attaque du Bardo, cette opération est dénommée en milieu militaire "coup de main contre un point sensible ". Pour la contrer, il ne faut disposer ni de char de combat ni d'avion de chasse ni de missile transcontinental, mais d'hommes bien entrainés et très déterminés à relever le défi et affronter le danger quelque soit le prix.
Et si l'on fait appel aux patriotes locaux
Afin de pouvoir sortir du bourbier du mont Chaambi, qu'il me soit permis d'indiquer aux décideurs une piste de réflexion susceptible d'offrir une solution possible : L'exemple algérien peut servir d'inspiration (et non de copié-collé) .Dans le cadre de l'autodéfense des localités isolées , les autorités algériennes ont eu recours aux habitants locaux pour former des "Groupes de Légitime Défense GLD". On peut faire autant pour le combat de nettoyage du mont Chaambi en recrutant des volontaires locaux ayant un minimum d'expérience de combat en milieu montagnard mais maîtrisant parfaitement le terrain dans les moindres coins et recoins de la région Chaabienne. Ces combattants seraient en mesure d'en finir avec cette horde sauvage venue du fin fond des ténèbres.
Au moment de clôturer cette contribution, l'embuscade de Mghila eut lieu .Cela ne fait qu'exacerber notre colère et nous donner l'impression d'avoir fait le plein de frustrations
tellement les bavures se suivent et se ressemblent
Vision pessimiste! Voire.
Comment a-t-on pu sombrer si profondément?!
Est-ce la conséquence d'un travail de sape aussi pervers que méthodique?
Ou plutôt les séquelles polymorphes qui rongeaient l'armée depuis belle lurette?
Sommes-nous, bel et bien, en guerre? Auquel cas, tout mouvement s'effectue en déplacement tactique.Je m'arrête là.C'est polémique.
Pour terminer, je dirais que la sécurité n'est jamais acquise. Elle a un prix.Sommes-nous prêts à le payer? C'est là toute la problématique posée en termes crus. A bon entendeur salut.
Le Colonel(r) Mohamed Kasdallah