News - 15.05.2015
Révélations: Combien coûtent l’instabilité politique, la corruption et l’absentéisme à l’entreprise tunisienne
Trois contraintes sévères, à savoir l’instabilité politique, la corruption et l’absentéisme continuent à pénaliser l’entreprise tunisienne, révèle une étude récente publiée par Institut Tunisien de la Compétitivité et des Etudes Quantitatives (ITCEQ).
Pas moins de 6.5% des entreprises enquêtées ont suspendu leurs activités à cause de l’instabilité politique. Les longs délais de dédouanement des importations qui sont estimés en moyenne de 14.5 jours contraignent les opérateurs économiques à accepter des malversations relevant de la corruption. Les entreprises ayant accepté de répondre à la question, déclarent que la valeur des versements non officiels est estimée à 1.1% de leur CA.
Troisième facteur pénalisant, l’absentéisme dans les entreprises privées dont le taux est de l’ordre de 6.66%, soit 20.5 jours d’absence par employé en moyenne pour l’année 2013 ce qui constitue un manque à gagner de 3.31% du CA.
Ces indicateurs inquiétants sont publiés par l’ITCEQ, organisme gouvernemental relevant du ministère du développement, de l’Investissement et de la Coopération internationale, parmi les résultats d’une enquête sur la qualité du climat des affaires et la compétitivité des entreprises tunisiennes réalisée du 15 septembre au 30 octobre 2014 auprès d’un échantillon d’entreprises privées.
Extraits
Une évaluation récente sur la qualité du climat des affaires et la compétitivité des entreprises en Tunisie a été réalisée à l’ITCEQ à travers une enquête sur terrain du 15 septembre au 30 octobre 2014 auprès d’un échantillon d’entreprises privées.
L’enquête a un triple objectif : Tout d’abord, elle vise à évaluer le climat des affaires en vue d’identifier les principales contraintes auxquelles se heurtent les entreprises dans l’exercice de leurs activités. Ensuite, elle permet d’apprécier les actions et stratégies engagées par les entreprises pour faire face à l’intensification de la concurrence et relever le défi de la compétitivité. Enfin, elle permet de recueillir les anticipations des chefs d’entreprise quant à l’évolution de l’activité, d’investissement et de l’emploi. Cette tribune se focalise sur le premier aspect. Elle tente donc de répondre à la question suivante : quelle perception portent les chefs d’entreprise sur le climat des affaires en Tunisie?
L’appréciation du climat des affaires est basée sur la perception que se font les chefs d’entreprise sur l’environnement réglementaire et institutionnel dans lequel ils opèrent et qui se rapporte aux domaines suivants : infrastructure, cadre macroéconomique et réglementaire, financement bancaire, fiscalité et charges sociales, insécurité, ressources humaines, procédures administratives et système judiciaire, corruption et instabilité politique. Cette dernière ayant été exceptionnellement introduite en 2014.
L’instabilité politique : principale cause de la détérioration du climat des affaires en 2014 Introduite pour la première fois dans l’enquête, l’instabilité politique est classée parmi les 3 contraintes les plus sévères. L’insécurité a causé la suspension de l’activité pour 6,5% des entreprises.
Pratiques dans le marché : contrainte accentuée par rapport à 2013.
Il n’y a pas de doute que la présence de certaines pratiques telles que la concurrence déloyale et les pratiques anticoncurrentielles nuisent à la compétitivité et portent préjudice aux entreprises respectant les règles du marché. La décision de créer un conseil de la concurrence ne semble pas être suffisante pour lutter contre ces pratiques dans la mesure où elles se sont davantage aggravées après la révolution.
Cette situation rend encore plus difficile la tâche des entreprises œuvrant dans la transparence et la légalité pour être compétitives, notamment, dans une conjoncture de plus en plus incertaine et difficile
Financement : Contrainte structurelle qui perdure
Les besoins de financement des entreprises se sont accrus en 2014 et ce, essentiellement pour le financement d’exploitation (42% contre 38% besoin de financement d’investissement), synonyme d’une situation financière difficile. L’examen de la chaîne de financement des entreprises a montré que le financement bancaire continue à constituer la principale source de financement externe de l’entreprise si bien que ce mode a toujours été considéré comme contrainte sévère.
Procédures administratives et dédouanement : 14.5 j pour le dédouanement des importations
Les appréciations des chefs d’entreprise au niveau des procédures administratives apparaissent moins favorables qu’auparavant. Ainsi et pour accélérer un service, les responsables sondés déclarent qu’ils sont contraints à faire des malversations. De telles réponses laissent déduire que les délais de prestation de certains services sont longs et freinent, en quelque sorte, le bon déroulement des affaires. Pour l’année 2014, les déclarations des chefs d’entreprise nous ont permis de calculer le délai moyen entre le moment où les produits arrivent au point d’entrée du territoire et le moment où les procédures douanières sont effectuées, soit 14,5 jours.
Corruption
La corruption génère un coût difficile à estimer à cause de la dimension, morale de l’acte. Pour les entreprises ayant accepté de répondre à la question, la valeur des versements non officiels est estimée à 1.1% de leur CA.
Fiscalité et charges sociales : Une perception en amélioration
Le système fiscal tunisien a été toujours considéré comme une contrainte majeure à plus d’un titre. En effet, toutes les études ont montré qu’il ne tend pas vers les quatre piliers de l'exemplarité : l’efficience, l’équité, la transparence et la globalité et qu’il n'a pas aidé à la mise en place d'une bonne gouvernance, ce qui a engendré un manque de confiance entre les autorités et les contribuables et a favorisé l'évasion fiscale. Toutefois, il semble que le premier pas vers la réforme fiscale marqué par la loi de finance 2014, tant attendue, a eu un impact positif sur la perception des chefs d’entreprise. En effet, les appréciations recueillies en 2014 montrent un certain relâchement au niveau de cette contrainte. La réforme fiscale devrait donc privilégier la simplification des procédures, lutter contre l’évasion fiscale, élargir le champ d'application de l'impôt sur les sociétés, rationaliser les avantages fiscaux, renforcer la transparence et la neutralité de l'impôt, réduire le champ d'application des sanctions fiscales pénales…etc. autant de dispositions susceptibles d’accroître le sentiment d'équité fiscale.
Ressources humaines : un taux d’absentéisme de 6.66% et un manque à gagner de 3.31% du CA
Le facteur relatif aux RH a toujours constitué un point fort de la Tunisie. Toutefois cette appréciation n’a pas empêché les chefs d’entreprise à soulever certaines insuffisances. En effet, la contrainte relative à la formation et qualification se reflète à travers les difficultés que rencontrent les entreprises pour trouver le profil adéquat, surtout que 27% d’entreprises déclarent avoir des postes vacants en raison, essentiellement, des profils non disponibles sur le marché du travail, et ce, aussi bien pour les ouvriers qualifiés que pour les diplômés du supérieur. Ainsi, l’accent doit être mis sur le relèvement du niveau de qualification afin de mieux répondre aux besoins des entreprises.
D’autre part, il y a lieu de signaler que le tissu économique après la révolution est devenu plus confronté qu’auparavant à des tensions sociales, revendications, grèves…etc. Autant d’éléments favorisant l’absentéisme. Ce dernier, souvent synonyme d’un dysfonctionnement ou d’un malaise social, a fait l’objet d’un traitement spécifique dans l’enquête 2014. Les investigations, à ce niveau, nous ont permis de calculer un taux d’absentéisme dans les entreprises privées de l’ordre de 6.66%, soit 20.5 jours d’absence par employé en moyenne pour l’année 2013.