La défaite de Jaloul Ayed à la BAD : un échec cuisant pour la diplomatie tunisienne
Abidjan – De notre envoyé spécial – S’il est encore trop tôt pour tirer les enseignements de la non-élection de Jaloul Ayed à la tête de la Banque africaine de Développement (BAD), tous ici parmi les amis de la Tunisie dans la capitale ivoirienne déplorent "un échec cuisant de la diplomatie tunisienne". Ayant déjà perdu la direction de l’Alecso et de l’ASBU, la Tunisie s’est essayé à l’Afrique en présentant Nidhal Ouerfelli à la BADEA et Jaloul Ayed à la BAD. Pour essuyer un échec aux deux postes.
« Pour la BAD, l’ancien ministre tunisien des Finances présentait un bon profil : une bonne vision pour l’avenir de l’Afrique et celui de la Banque, un carnet d’adresses international assez fourni et un style de management modernes », affirment à Leaders nombre de Gouverneurs continentaux et non-régionaux. Maintenant, il faut voir ce qui n’a pas fonctionné : essentiellement le soutien logistique et politique. Certes, le chef de l’Etat et celui du gouvernement l’ont assuré de leurs appui, le président Béji Caïd Essebsi n’a pas manqué de dépêcher des envoyés spéciaux auprès de ses pairs pour demander l’appui de la candidature tunisienne. Mais, l’intendance n’a pas suivi.
Il faut voir tout le lobbying déployé, rien que depuis lundi ici à Abidjan par les différents autres candidats. Leurs ministres, ambassadeurs, communicants et conseillers étaient au créneau. Des suites entières servaient de QG, en plus des résidences de leurs ambassadeurs. Ceci sans compter les ressources financières mobilisées. Quant au candidat tunisien, il devait compter avec ce qu’il avait, c’est-à-dire presque rien. Sans jeter l’anathème sur quiconque, on perçoit les limites de l’exercice tunisien
Même le ministre, gouverneur pour la Tunisie à la BAD, Yassine Brahim n’a rejoint la capitale ivoirienne que mardi tard dans la nuit, ce qui ne lui laissait que la matinée du mercredi pour mener les consultations nécessaires. De son côté, l’ambassade, avec des effectifs et un budget réduit, ne pouvait apporter à Jaloul Ayed que du réconfort.
Pour une nouvelle conduite à tenir
En attendant une évaluation détaillée, approfondie, et précise, absolument nécessaire à faire par les services du Chef du gouvernement, pour ne pas dire la présidence de la République, de premiers éléments méritent d’être pris en compte.
Les candidatures officielles au nom de la Tunisie à des fonctions élevées à la tête et/ou au sein du système des Nations Unies et grandes institutions financières et autres doivent être décidées au plus haut niveau (et non le ministère des Affaires étrangères) et gérées par un point focal central (pouvant être les Affaires étrangères) qui réunit les représentants dûment mandatés et exécutifs (pas besoin de revenir à leur hiérarchie pour demander des instructions) des divers départements ministériels concernés.
Une fois désignée candidat officiel de la Tunisie, après évaluation de l’opportunité pour le pays et de ses chances effectives, la personne choisie doit bénéficier d’un budget conséquent et de toutes les autres conditions à même de lui garantir des chances réelles, avec un plan d’action précis et un agenda fixé.
Outre l’équipe qui sera constituée autour du candidat, des agences de communication, mais aussi de relations publiques sont à mandater dans les principaux pays les plus concernés.
Le pilotage à bonne fin de l’opération doit rester entre les mains, non pas du candidat qui n’appartient plus à lui-même, mais à son pays, mais d’un directeur de campagne, nommé par le chef du gouvernement après concertation avec le candidat.
L’élection à la BAD nous en a offert une nouvelle confirmation : le candidat peut être techniquement le meilleur. Il fait bien son travail préparatoire, puis il s'en remet à la diplomatie de son pays pour le conduire à la victoire.
Tout-au-long du processus d’élection, Jaloul Ayed a été très bon. On sait par qui il a été lâché et d’où provenaient les défaillances. La BAD le regrettera sans doute. Toujours est-il qu'à ce rythme-là, la Tunisie risque de perdre pied au niveau des grands postes internationaux et régionaux. Ce serait dommage !
Taoufik Habaieb
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