Sfax : Le récent limogeage du PDG de la Société TAPARURA, entre les ressentiments des citoyens et les réactions attendues
Il était notoirement connu que, sous son règne sans partage, Ben Ali mutait de SFAX et dégradait tout responsable ou fonctionnaire qui s’appliquait à y défendre - comme il se doit - les intérêts de la région. Dans la ville marquée par ce frustrant constat, on ne peut s’empêcher de penser que M Mohamed Gouider (muté de la Société Taparura) subit aujourd’hui ce même sort pour ces mêmes raisons.
En effet, dès sa prise de fonction Monsieur Gouider s’est employé avec zèle à activer et à préserver les intérêts de la Société qu’il dirige ; or, il ne pouvait le faire efficacement sans s’impliquer dans la demande citoyenne pressante de dépollution du littoral Sud (fermeture de la SIAPE) et dans l’opposition largement partagée à l’extension vers le Nord du port de Sfax limitrophe du projet Taparura ; c’est ce qu’il a fait ouvertement, ce qui lui fut vraisemblablement reproché et ce dont il paye maintenant le prix.
M Gouider qui n'a donc fait que son devoir et qui méritait le maintien au poste sinon une promotion vient d’être brusquement et sans égards limogé, en apparence dans le cadre d’une opération classique de « mutations de cadres » au Ministère de l’Equipement ; à Sfax, le citoyen averti le ressent autrement et y voit une mesure ("sur mesure" et de circonstance) qui vise encore une fois à étouffer toute velléité de « résistance justifiée » aux négligences répétées qui accablent la région. Tout concorde et laisse en fait entendre que l’Administration, qui semble avoir gardé ses vieux réflexes, continue de considérer et de vouloir faire savoir à ses fonctionnaires que tout « zèle à Sfax » est malvenu et passible de sanction. A bon entendeur… dirait-on !!!
Quoi qu’il en soit le problème n’est pas maintenant d’être informé ou rassuré sur les qualités (en principe certaines) de l’honorable personne qui succéderait éventuellement à M Gouider ; ce qui est étrange et qui dérange c’est qu’un tel remaniement à la tête d’une entreprise aussi déterminante pour l’avenir de la Cité ait pu se faire en ce moment précis, dans la chaude conjoncture régionale actuelle, au risque évident de soulever à Sfax une légitime opposition des citoyens (fortement sensibilisés par les maltraitances passées) mais aussi et surtout de retarder encore plus et pour longtemps la concrétisation du « projet Taparura » qui n'en finit plus de rester à l’état de projet. Il est par ailleurs et en premier lieu inadmissible qu’une telle mesure ait pu être prise et traitée comme « une banale décision administrative », sans aucune concertation préalable avec les divers représentants de la légitimité locale, dont fait partie l’incontournable Société Civile bien entendu.
Voici encore une décision provocante par son dédain évident de la convenance démocratique, avec « un sursaut de dignité citoyenne et une réaction de rejet catégorique » en perspective.
Qui peut se permettre d’oublier par les temps qui courent que « gouverner, c’est prévoir » ??? …
Dr Mohamed Aloulou
Sfax, le 22 Juillet 2015