Maux et jeux de mots: Courses particulières!
Le ministre de l’Éducation semble bien décidé à couper court aux cours particuliers. Une loi serait même en cours, pour les interdire définitivement. Voilà donc court-circuités les enseignants qui vivaient grassement de «l’étude» ! Et ils encourent des sanctions sévères s’ils passent à la clandestinité.
Ils doivent donc laisser libre cours … à leur imagination pour détourner la loi, comme ils avaient, auparavant, fait preuve d’imagination pour le recrutement des candidats aux cours particuliers, par le biais notamment de deux tactiques fort célèbres : « la chasse à courre » et « le cours très court » !
La » chasse à courre « consiste à faire le siège de l’élève jusqu’à ce qu’il tombe . A la place des chevaux et des chiens, utilisés dans ce genre de chasse, lorsqu’il s’agit d’un véritable gibier, on use, pour l’élève, de procédés qui varient entre la motivation, l’intimidation, ou le chantage tout court.
Deuxième tactique, « le cours très court « en classe : cela consiste pour l’enseignant, de présenter quelques notions par ci, quelques exercices par là, juste de quoi allécher le » client », un peu comme dans la promotion des films au cinéma. Le reste suivra son cours… au domicile du prof. Pour ces enseignants mal intentionnés qui se reconnaîtront, les leçons données en classe, c’est comme les blagues : les plus courtes sont les meilleures. Mais cela ne fait pas rigoler tout le monde. Et surtout pas les parents !
Ces cours, en effet, les rendent malades. Tellement malades que certains d’entre eux ont parfois envie de chanter avec Michel Sardou :
Elle court, elle court
La maladie des cours
Dans les poches des parents
Et ça se répète tous les ans
Mais, en toute philosophie, ils avouent quand même que c’est un mal nécessaire par les temps qui courent . Car, pensent-ils , sans cours particuliers, leurs enfants ne seront jamais dans la cour des grands.
D’autres parents, moins philosophes et plus terre à terre, vous diront que les cours particuliers, c’est comme les cours d’eau, ils arrosent les terrains des uns ( entendez : les caisses des enseignants) et érodent les terrains des autres ( les poches des parents, bien entendu). Et ils n’ont pas tellement tort, s’il s’avère, comme l’a affirmé le ministre de l’Éducation, que les cours particuliers représentent un chiffre d’affaires annuel de 700 milliards de millimes ! Avec un tel chiffre, les cours particuliers pourraient facilement avoir accès au cours… de la Bourse de Tunis, et soyez sûrs et certains que les actions de cette société, vraiment anonyme et bientôt clandestine, seront des plus prisées.
Et les élèves que pensent-ils de tout cela ? A vrai dire, du coût des cours ils n’ont pas cure. Normal ! C’est papa ou maman qui casquent. Mais ils sont conscients quand même que les cours particuliers constituent le carburant de la réussite scolaire. Un carburant qui, contrairement, au cours mondial du pétrole, ne connaît jamais de baisse.
« Et maintenant, que vais-je faire ? » . C’est la question que doivent se poser, à l’instar de Gilbert Bécaud, les professionnels des cours particuliers. Entrer dans la clandestinité ? Les cours ressembleraient alors aux réunions des sociétés secrètes, avec des messages codés, des rendez-vous, minutieusement arrangés, des rencontres dans les arrière-cours… Pour éviter tous ces tracas, l’élève riche et paresseux a déjà une solution toute prête : » Je ferai comme la rivière : suivre le cours dans mon lit »… Et l’enseignant viendra à son chevet.
Ceux, parmi les enseignants qui n’oseront pas la clandestinité, pourront toujours suivre l’exemple de certains fonctionnaires et professeurs d’un pays frère : se convertir en chauffeurs de taxi pendant leur temps libre. On appellera ça « des courses particulières ». Leur activité n’aura changé que de genre !.
P .S. Toutes nos excuses aux enseignants qui auraient pris en mauvaise part nos propos. Nous avons voulu, donner libre cours à notre humour, à propos d’une affaire de cours…encore en cours.
Adel Lahmar