La police des polices : Efficacité et indépendance
Que faisait-on, jadis, des grands commissaires de police limogés ? Pour leur garder honneurs et avantages, on les envoyait, en voie de garage, à l’IGSN? C’est la tradition dans la plupart des polices à l’étranger. Un placard où on pouvait pantoufler béatement en attendant des lendemains meilleurs et retrouver un jour un bon poste. Les temps ont changé. En Tunisie aussi. Ce sont les meilleurs qu’il faudrait désormais y affecter, avec des indicateurs de performance mesurables et incontestables, des moyens et une grande indépendance.
Le grand défi pour l’IGSN est en effet de gagner en efficacité et conquérir son indépendance. Erigée en bureau d’études pour mener les audits nécessaires, en amont et en aval, elle fait ainsi face à un travail d’experts qui exige des ressources humaines qualifiées fournies en nombre et dotées de moyens appropriés. Revoir toutes les procédures, quitte à tout réécrire, les expliquer et veiller à leur mise en œuvre et à leur respect est une œuvre essentielle. Examiner les plans et dispositifs lors des grandes opérations et manifestation et y apporter correctifs et recommandation est aussi important. Se prononcer sur les nominations aux postes sensibles et sur les mouvements fait partie de ses tâches aussi délicates qu’utiles. Une véritable tête pensante, un laboratoire d’idées nouvelles et une autorité de régulation. Tout à la fois.
Ce défi ne saurait être relevé sans soustraire l’IGSN de toute influence. Combien de fois, du temps de Bourguiba, un directeur général de la Sûreté ou un ministre de l’Intérieur avait demandé à consulter son propre dossier et a reçu pour toute réponse un refus poli de la part des patrons de la Police ? Combien de fois aussi s’était-il hasardé à exiger de l’Inspection une sanction, en fixant lui-même le « tarif », en vain ? Les vétérans en témoignent. Rien ne sert d’avoir une IGSN si elle est vassalisée. Le risque est encore plus grand avec les tiraillements politiques qui secouent le pouvoir, la succession des gouvernements de diverses obédiences idéologiques et les tentatives de mainmise sur l’appareil sécuritaire, comme cela avait été essayé ces dernières années.
Ni sauf-conduit, ni immunité, mais un statut à inscrire : les membres de l’IGSN doivent bénéficier, à l’égard des magistrats, de leur totale indépendance. Un droit à leur garantir et à préserver. Une lourde responsabilité qu’ils auront, de leur côté, à assumer.
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