Consultants sportifs ou faiseurs de rois?
Dans leur course à l'audimat, nos chaînes de télévision ont finalement trouvé le bon filon: les émissions sportives. Et peu importe qu'elles soient diffusées en access prime time, en prime time ou en fin de soirée; qu'elles parlent de foot, de hand (une discipline qui a la cote en ce moment après la victoire sur l'Egypte au Caire même), ou de sports individuels. Il se trouvera toujours des téléspectateurs pour les regarder. A l'étranger, ces émissions sont très suivies. Alors, pourquoi pas chez nous d'autant plus que ce n'est pas-là leur seul avantage. Comme il s'agit généralement de talk shows, elles ne sont pas très coûteuses. Un argument-massue à lui seul, connaissant les moyens limités de nos chaînes. Réunissez un quarteron de journalistes, d'anciens joueurs ou d'entraîneurs en chômage, convertis dans la consultance, faute de mieux, autour d'une table et confiez-leur le soin de commenter -de préférence a posteriori- un match important ou un évènement sportif. Vous en aurez pour deux ou trois heures de discussions souvent passionnées, parfois même houleuses, mais rarement ennuyeuses. Des débats contradictoires comme les Tunisiens aiment... et en rêvent.
Il faut dire que le recours aux consultants est un phénomène relativement récent dans notre pays. Dans les pays anglo-saxons, ailleurs, en Europe et de plus en plus dans le monde arabe, c'est une profession à part. Ceux qui l'exercent sont choyés, traités comme de grandes vedettes. Grassement payés, ils sont à la fois admirés et craints, traitant d'égal à égal avec les présidents de clubs et a fortiori avec les joueurs, distribuant le satisfecits et les blâmes au gré de leurs humeurs et leurs caprices. En somme, de véritables faiseurs de rois.
Détenteurs de la science infuse?
Les consultants politiques passent leur temps à refaire le monde. Plus modestes, les consultants sportifs se contentent de refaire les matches. Et à ce niveau, ils ont le beau rôle. Et pour cause, il est très facile de dire après coup ce qu'il aurait fallu faire pour gagner. "Y a qu'à": c'est leur expression favorite; elle revient comme un leit motiv dans leurs discussions comme s'ils possédaient le science infuse. Le problème, c'est que, parfois, ces consultants, si sûrs d'eux quand il s'agit de décortiquer un match ou d'expliquer les mauvaises raisons d'un choix tactique ou de personnes, ont rarement terminé l'année avec leurs clubs respectifs pour insuffisance de résultats, ce qui les décrédibilise aux yeux des téléspectateurs et les expose, à juste titre, à leurs quolibets.
Comme quoi, si la critique est aisée, l'art est difficile. Il serait bon que certains de nos consultants descendent de leur piédestal, qu'ils fassent preuve d'humilité dans leurs jugements, qu'ils ne monopolisent pas la parole, qu'is évitent les discussions oiseuses, les remarques désobligeantes envers les dirigeants et les joueurs, les plaisanteries de mauvais goût qu'ils affectionnent, peut-être, dans leurs discussions privées, mais qui passent très mal à la télévision, qu'ils fassent preuve de retenue et de sang froid même quand leurs invités n'acceptent pas la contradiction et se gardent d'aborder des sujets qui les dépassent comme l'a fait malheureusement l'un de nos plus talentueux consultants sur une chaîne arabe.
On ne s'improvise pas consultant, on le devient. Comme toute activité humaine, elle nécessite beaucoup de travail et de recherche.
Comme il s'agit d'une nouvelle spécialité dans notre pays, soyons indulgents et mettons tous ces travers sur le compte de l'inexpérience et patientons. Ils feront bientôt de bons consultants.
Hedi